Du bayou brûlant de La Louisiane où elle est née, la série a mis le cap sur le froid piquant de l’Alaska, mais son ADN demeure inchangé. Dix ans après sa première apparition, True Detective revient au sommet… dans la nuit du dimanche 14 janvier sur Be tv


Ennis, Alaska. Luttant contre le vent, un troupeau de rennes défie le froid polaire de la toundra en quête d’une nourriture trop rare. Seules les lumières lointaines s’échappant des maisons permettent de repérer la ville dans l’immensité neigeuse. Dans la station de recherche scientifique Tsalal Arctic toute proche, chacun vaque à ses occupations : cuisine, sport, lecture, lessive. Mais un incident survient et les huit hommes, appelés à travailler au sein de cette équipe internationale, disparaissent soudain. Certains détails de la « scène de crime » font penser à une ancienne affaire non élucidée qui hante encore les consciences de ce coin perdu du globe, soumis à la loi des longues nuits. Les enquêtrices Liz Danvers (Jodie Foster) et Evangeline Navarro (Kali Reis) se rendent sur place. Hostiles et méfiantes, elles vont devoir surmonter leurs ressentiments réciproques et affronter des vérités douloureuses, enfouies dans leur passé, pour tenter de résoudre cette mystérieuse disparition collective.

Un duo féminin fort en caractère

Après la Louisiane, en 2014, avec Matthew McConaughey et Woody Harrelson ; la Californie en 2015, avec Colin Farrell et Rachel McAdams et l’Arkansas, en 2019, avec Mahershala Ali et Stephen Dorff, True Detective met le cap sur l’Alaska, pour une nouvelle enquête aux frontières de l’inconscient.

En femme de caractère et policière intransigeante, Jodie Foster démontre rapidement que son charisme demeure intact, même si elle était nettement moins présente sur les écrans ces derniers temps. Son personnage taiseux et cassant s’inscrit dans la continuité de celui qui l’a révélée dans le film Le Silence des agneaux. La comédienne affirme que son goût pour les séries s’est forgé grâce au True Detective de Nic Pizzolatto, raison pour laquelle elle a accepté de venir se confronter au froid polaire.

Avec son physique athlétique, la championne de boxe, Kali Reis, s’était distinguée dans le film Catch The Fair one de Joseph Kubota Wladyka, en 2021. Elle endosse avec un impressionnant mélange de force et de self-control le rôle de la jeune Evangeline Navarro, sa partenaire au lourd passé familial, tentant d’épauler sa jeune sœur souffrant d’épisodes de terreur récurrents et d’élucider un meurtre qui hante les membres de sa communauté.

Difficile de surpasser les souvenirs du polar poisseux imprimé dans la mémoire collective par le duo magnétique des enquêteurs Rust (McConaughey) et Marty (Harrelson) lors de la saison 1. Mais outre ses deux enquêtrices au tempérament d’amazones, la nouvelle saison bénéficie de l’atmosphère très particulière que lui confère la succession des jours sans soleil. Elle offre aussi une plongée au sein du mode de vie et des traditions des Inuits, bousculés par l’exploitation effrénée des ressources minières et le développement d’opaques recherches scientifiques.

Spectres, coutumes et personnalités fêlées

Déclinée en six épisodes, et toujours produite par son créateur originel Nic Pizzolatto, cette saison 4 de la série policière d’HBO a été écrite, réalisée et dirigée par la créatrice mexicaine Issa López (Tigers are not afraid, Secondary Effects). Celle-ci n’hésite pas à empoigner des thèmes comme le racisme et le sexisme ou la protection de l’environnement en s’appuyant sur un casting éclectique : Fiona Shaw (Killing Eve), Christopher Eccleston (Doctor Who), John Hawkes (3 Billboards), Finn Bennett et Isabella Star LaBlanc.

A la production exécutive, on croise un certain Barry Jenkins, ce qui explique sans doute les ombres horrifiques qui planent sur l’immensité polaire. De quoi réveiller le souvenir de séries telles que Fortitude, portée en 2017 par Sofie Grabol, où il était déjà question des dangers que l’exploitation minière fait courir à la nature et aux habitants du cercle polaire. Ou du thriller Trapped, également tourné en Islande.

Outre son duo électrique, un autre lien est entretenu avec la première saison de True Detective : le signe de la spirale de Carcosa, tracé sur le front de l’une des victimes, hantait déjà les cultures autochtones du bayou lors de la saison 1. Les traditions du peuple Inuit infusent cette nouvelle saison comme le faisaient les esprits de La Louisiane en 2014. A croire qu’au-delà des latitudes et des saisons, se glissent, au coeur de ces enquêtes criminelles, quelques images en miroir inversé dominées par des détectives aux personnalités fêlées.

Karin Tshidimba