Le combat de Garry Kasparov contre Deep Blue (Rematch) et la lutte solidaire d’ouvriers contre leur patron (Machine) ont été primés à Lille, mettant ainsi quadruplement Arte en tête du palmarès. Le Belge Jérémy Gillet a été récompensé pour son rôle dans “Une Amitié dangereuse” d’Alain Tasma.

En 2010, 2 ou 3 000 spectateurs se pressaient au Forum des Images à Paris pour découvrir des séries inédites au fil d’une vingtaine de séances de la première édition du festival Séries Mania. Du 15 au 22 mars, 98 000 personnes se sont pressées à Lille pour découvrir 50 séries dont 26 avant-premières au fil de la centaine de séances proposées dans différentes salles lilloises et en région. Ce chiffre de fréquentation reprend aussi les milliers de visiteurs attirés par la formidable expo sur « L’envers du décor » des séries, imaginée par la journaliste et documentariste Charlotte Blum sur le site du Tripostal. Une déambulation immersive, ludique et passionnante qui a mis en lumière des artisans formidables et permis de découvrir des métiers méconnus de l’univers sériel : créateurs de langues, styliste culinaire, crieuse professionnelle, maquilleur d’effets spéciaux, créatrice de costumes, chef-op sous-marin,… Tous ces professionnels de l’ombre qui rendent les séries si poignantes et si réelles.

A la grande satisfaction de l’équipe du festival Series Mania, emmenée par sa directrice générale Laurence Herszberg et son directeur artistique Frédéric Lavigne, la curiosité du public grandit au fil des ans et les séances de la compétition internationale sont de plus en plus suivies : avec une moyenne de 1100 spectateurs chaque soir dans la salle du Nouveau siècle. Preuve de cet engouement : le public a accordé son prix à Soviet jeans, série venue de Lettonie, pays qui participait pour la toute première fois à Series Mania.

Un palmarès mêlant stratégies, mystères et sentiments

Le Grand prix de la compétition internationale revient cette année à la série Rematch qui rejoue la rencontre au sommet entre Garry Kasparov et l’ordinateur Deep Blue, préfigurant nos craintes et démêlés actuels avec l’intelligence artificielle. Le jury, présidé par le formidable créateur créateur Zal Batmanglij (Murder at the end of the world) a également récompensé le travail du scénariste Thomas Wendrich pour la série Herrhausen, the banker and the bomb, produite par la chaîne ARD. Une fiction qui évoque ce moment crucial de l’histoire allemande où le tabou de la dette des pays émergents a volé en éclats.

Le prix de la meilleure comédienne revient à Annette Bening pour son rôle dans la série Apples never fall, production Peacok. Tandis que le formidable Kamel El Basha est salué pour sa prestation dans la série House of Gods, explorant les dilemmes de la famille d’un imam modéré pour la chaîne ABC Australie.

Annette Bening a été primée à Lille pour son rôle dans la série « Apples never fall ».

Machine, première création commune de Fred Grivois et Thomas Bidegain (Soudain seuls) est sacrée meilleure série française. Ce pari osé, mêlant kung-fu et marxisme pour Arte, est porté notamment par Margot Bancilhon (De Grâce) et JoeyStarr.

Le Belge Jeremy Gillet, après s’être distingué dans Mytho et dans Le Jeune Voltaire est récompensé pour son rôle délicat de Louis XIII dans Une amitié dangereuse, produite par France Télévisions.

Tiphaine Daviot (Les Randonneuses) est, quant à elle, sacrée meilleure actrice pour son rôle dans Murder Club, série produite par M6.

Le talent de Julie Roué est récompensé pour la musique imaginée dans Le monde n’existe pas, d’Erwan Le Duc (Sous contrôle) pour Arte.

Espagne, Lettonie et Norvège

La très originale série norvégienne Dates in Real life se classe en tête du Panorama international. On y suit le parcours d’une jeune fille très renfermée tentant de vivre sa vie au-delà de la « protection » des écrans. L’impressionnante réalisation du duo Javier Ambrossi et Javier Calvo dans La Mesias est primée sans surprise. La production Movistar+ est également récompensée du prix des étudiants frappés par cette histoire d’enfermement familial.

La série espagnole « La Mesias » a été primée au festival Series Mania.

Robyn Malcolm, qui prête son subtil mélange de force et de fragilité au très interpellant drame néo-zélandais After the party, y est sacrée meilleure actrice. Tandis que Karlis Arnolds Avots est récompensé pour son rôle dans la série lettone Soviet Jeans.

Enfin, émotion partagée pour Ceux qui rougissent, produite par Arte.tv, sacrée meilleur format court.

On aurait bien sûr voulu voir l’épatante série britannique Boarders et la très touchante comédie romantique suédoise All and Eva figurer dans ce palmarès. Mais nul palmarès n’est parfait…

Des activistes dans la salle du Nouveau Siècle

La révélation du palmarès a d’ailleurs été interrompue à deux reprises, vendredi soir à Lille. La première fois, en début de soirée, par des étudiants manifestant en faveur du peuple palestinien « injustement frappé par Israël » et, ensuite, par une jeune écologiste montée sur scène avec des fumigènes, obligeant le jury à s’interrompre, le temps que la fumée se dissipe et que la jeune femme soit évacuée par la sécurité.

Qui dit festival dit forcément frustration de ne pas avoir pu tout voir et d’avoir loupé certaines conférences ou rencontres. Grâce au la plateforme Sériesmaniaplus de nombreuses personnes ont quand même pu vivre l’événement en direct à distance et assister aux masterclasses très animées d’Audrey Fleurot, Patricia Arquette ou Peter Mullan. Il reste jusqu’à dimanche minuit pour découvrir les séries primées à Lille sur la plateforme du festival. Vous auriez tort de ne pas en profiter…

Karin Tshidimba, à Lille