les revenants 3.jpgLes Revenants, la série de Canal +, va être bientôt diffusée au Canada et en Australie, en VO sous-titrée, comme elle l’a été cet été sur Channel  4. Un accord de diffusion a aussi été établi avec Sundance Channel et Music Box pour le territoire américain. Et bientôt, la Hongrie, la Suède et la Turquie découvriront la première saison… À croire que le fantastique “à la française” est devenu tendance…

Fabrice Gobert, son créateur (photo ci-dessous), invité du récent Festival de Deauville, évoque la saison 2 en préparation tandis que sa série s’apprête à s’afficher au prochain Marché international des programmes de télévision (Mipcom) à Cannes.
« Je me rends moyennement compte de son impact. La série a requis beaucoup d’énergie de la part de gens très talentueux (dont Patrick Blossier, mon chef opérateur), donc j’ai surtout été très content que cela ait bien fonctionné. Je savoure ma chance mais j’ai aussi envie de tenter d’autres choses. Disons que je me réjouis raisonnablement. Je n’ai pas l’impression d’avoir atteint quelque chose. Cela peut donner trop de pression, alors je ne veux pas trop y penser. Pour la saison 1, on a tout imaginé, il ne faut pas que cela nous empêche d’avoir la fraîcheur et la liberté de créer aujourd’hui. »

Sa technique? Se remettre tout de suite à l’écriture «parce que j’avais l’impression que Canal voudrait lire la suite. Sur la saison 1, nous avions travaillé en amont avec Emmanuel Carrière, pour établir la trame générale et développer les 4 premiers épisodes. Ensuite, j’ai écrit avec Fabien Adda. Sur cette saison 2, on a eu le même mode opératoire de départ, ensuite, deux auteurs sont venus me rejoindre: Céline Humbert et Audrey Fouche, qui a travaillé sur les Borgia. L’histoire globale est définie; maintenant, nous travaillons sur les épisodes. Il faut que nous puissions entrer en préparation à la fin de l’année.» Pour un tournage en février 2014.

les revenants 2.jpg«Ce sont les producteurs de « Haut et Court » qui m’ont proposé le projet à cause de mon film «Simon Werner a disparu». Je n’avais ni l’idée ni la volonté de renouveler le genre mais bien de creuser le travail déjà réalisé sur mon précédent film. C’est rassurant, en fait, de ne pas avoir de modèle français, cela enlève de la pression. Nos références étaient américaines. Quand j’ai commencé à écrire, il y avait cette envie d’exister entre réalisme et étrangeté et d’évoluer graduellement vers le fantastique. C’est le cas avec le personnage de Claire qui a tellement envie de retrouver sa fille disparue. Confrontée à elle, Claire fait comme si elle ne voyait pas que Camille (à droite sur la photo, Ndlr) est différente. Le plus important pour elle, c’est d’être avec Camille même si pour cela, il faut aller vers le mystère et la horde. C’est ce chemin là qu’on souhaitait que le téléspectateur emprunte.»

Dans la saison 2, il n’y aura pas de surenchère, promet Fabrice Gobert. «Nous allons voir comment retrouver un semblant de normalité après les événements qu’ils ont vécu: retrouver un nouvel équilibre en repartant des événements traumatiques pour aller vers le quotidien. La question reste la même: voir ce qu’on est capable d’accepter pour retrouver nos disparus. Quand quelque chose n’est pas explicable, on ne se contente pas de poser la question ou de croire que c’est la faute à «pas de chance» comme dans «Simon Werner» où il est beaucoup question de fatalité. Ici, il y a un refus de ce qu’on ne peut pas expliquer. Cette volonté de dire: les choses ont un sens, il y a une justice, est sans doute le reflet de l’éducation religieuse que j’ai reçue et dont je me suis un peu écarté.»

Même thématique, même tonalité, mais aussi mêmes lieux. «On a envie de continuer à tourner là-bas car le lieu nous a beaucoup apporté. Et puis, je connais très bien le barrage de Tignes car j’y allais enfant. On s’est rendu compte en faisant nos recherches sur place qu’il y avait vraiment eu un village englouti . Il y a des images assez poignantes de villageois qui perdent leur maison que nous avons retrouvées à l’Ina.»

les revenants 4.jpg« Quand j’ai commencé à réfléchir aux Revenants, je suivais Mad Men, Breaking Bad et j’avais été un fan des Soprano. Ce que j’aime dans ces séries, c’est qu’elles nous plongent tout de suite dans l’histoire. Il n’ y a pas de longues scènes d’exposition qui sont d’ailleurs souvent contreproductives avec beaucoup de dialogues et de situations forcées pour introduire tous les personnages. Le problème des séries en France, c’est qu’elles reproduisent trop souvent ce schéma. »
L’autre influence revendiquée est celle du film «Morse» de Thomas Alfredson «qui est parvenu à traiter le thème des vampires de façon très intime en ancrant son histoire dans la banlieue suédoise. Mais les influences sont nombreuses: Hitchcock, Kubrick, Alain Resnais, etc. dont j’aime la générosité.»

«Le marché des Etats-Unis, c’est le monde. Notre marché, c’est la France, la Belgique et la Suisse et puis basta. Je pense qu’il faut que nous regardions davantage comment font les Danois et les Suédois. Au départ, on pourrait croire que leurs histoires sont trop ancrées ou intimes mais finalement, elles sont universelles. Ils n’ont pas plus d’argent que nous, ni un marché plus étendu et pourtant ils y arrivent. Il ne faut pas se comparer aux Etats-Unis. Quand on voit la série Real Humans, on voit qu’on peut aussi explorer le fantastique sans effets spéciaux hors de prix. On peut dépasser ce handicap.»

les revenants 5.jpgEt la suite du récit, il l’imagine comment? «L’histoire, je la conçois bien en trois mouvements; là, on vient de terminer le premier. Il faut envisager la fin dans pas trop longtemps. Cinq saisons, c’est vraiment beaucoup, surtout avec notre rythme de production… (Il sourit)
Trois saisons, cela correspond bien à l’histoire que nous avons posée. J’ai une responsabilité vis-à-vis des téléspectateurs et de l’équipe. Je continue tant que je ne m’ennuie pas et que je trouve cela génial.»
«Quand on pense aux Américains qui arrivent à produire 24 épisodes en un an alors que nous on en produit huit en deux ans, je suis admiratif. Bien sûr, il faut essayer d’aller vite mais il faut aussi prendre le temps d’être satisfait de ce qu’on fait.»
Karin Tshidimba, à Deauville

nb:
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