Cette série retrace l’histoire de l’entreprise à la croissance « la plus rapide au monde » dans les années 1960. Son arme secrète ? Le bigoudi électrique, une révolution qui changé la vie de millions de femmes. A découvrir sur Be à la demande

L’histoire des inventions est jalonnée d’anecdotes délectables. Celles qui entourent la mise au point du bigoudi électrique sont à la fois savoureuses et symptomatiques de l’époque qui l’a vu apparaître. Dans les années 60, cette trouvaille technologique a non seulement permis à son inventeur – Arne Bybjerg Pedersen – de s’affirmer comme inventeur et entrepreneur de génie, mais elle a aussi permis à son fidèle bras droit, l’ingénieuse et débrouillarde Birthe Windfeld (Maria Rossing), jusqu’alors fermière de son état, de faire reconnaître ses talents et d’assurer son indépendance financière.

L’histoire vous semble tirée par les cheveux ? Pourtant, il n’en est rien. Et si la scénariste Mette Heeno a décidé de rebaptiser le héros de Carmen Curlers*** Axel Byvang, c’est pour pouvoir s’éloigner de la stricte biographie de l’inventeur – disparu en 2022 – afin de mieux embrasser l’époque et raconter la société danoise. De la boue de leur ferme natale jusqu’aux foyers douillets de l’Europe et des États-Unis, Arne Bybjerg Pedersen et Birthe Windfeld ont parfaitement réussi à tirer leur épingle (à cheveu) du jeu octroyant à des millions de femmes une liberté insoupçonnée. Et au Danemark, une reconnaissance inédite : celle de l’entreprise « à la croissance la plus rapide au monde » dans les années 1960…

« Carmen Curlers »: série sur l’invention du bigoudi électrique, partie à la conquête du monde.

Mise en pli et coiffures élaborées

Tout commence en 1963, lorsqu’Axel Byvang (Morten Hee Andersen) découvre, via une petite annonce dans le journal, le prototype d’une invention dont il est le seul à percevoir le potentiel : le bigoudi électrique. Il consacre toute sa (maigre) fortune à son développement. Malgré les oppositions, les dettes et les habitants qui le prennent pour un fou, Axel persévère. Il en est persuadé : cette invention lui permettra de faire reconnaître ses dons d’inventeur et d’homme d’affaires et de réparer ainsi son passé de petit paysan rouquin insulté, battu et humilié dans son pensionnat fréquenté par des garçons de bonnes familles.

Pour atteindre son objectif et parvenir à commercialiser son invention, il va être secondé par des alliées inattendues : des fermières et femmes au foyer auxquelles il va assurer une belle indépendance financière. Ainsi, Birthe Windfeld et lui pourront-ils créer un succès international. Les essais, erreurs, revers et déceptions de cette aventure ainsi que la longue bataille pour mener ce projet à bien façonnent les huit épisodes de la première saison. La saison 2 poursuit cette retranscription fidèle du contexte social et des défis relevés par les personnages. À son apogée, l’entreprise a compté jusqu’à 3500 employés, principalement des femmes…

« Carmen Curlers »: l’invention du bigoudi électrique a permis à de nombreuses Danoises de gagner leur liberté.

Nouvelle coiffure, nouvelle vie

L’intérêt de la série repose sur ces deux récits d’émancipation qui progressent en parallèle : celui d’Axel et de sa femme Tove, un couple ordinaire de la classe moyenne danoise très moderne dans leur façon d’être à l’écoute des aspirations de l’un et de l’autre. Et celui de Birthe qui, grâce à sa force de caractère peu commune, passe du statut de simple aidante, dans sa ferme, à celui d’entrepreneuse accomplie.

Le récit s’inscrit dans les années 60 et suit l’entrée du Danemark dans une ère de modernité, dans la foulée des stars du cinéma, du rock et des yé-yé. Une page d’Histoire qui entre forcément en résonance avec la façon dont de nombreuses sociétés (européennes) ont évolué avec l’entrée des femmes sur le marché du travail. Car, si l’invention a d’abord été vue comme un moyen d’économiser de l’argent et de permettre aux femmes de prendre soin de leur apparence au sein de leur foyer, le développement de cette invention a été synonyme de nouvel envol et de liberté pour toutes celles qui y ont été étroitement associées.

Déclinée en huit épisodes, Carmen Curlers rend grâce à l’ambiance sonore et visuelle so chic et pop des swinging sixties. Après une première saison suivie par 1,2 million de Danois en moyenne, son succès ne faiblit pas : les débuts de la saison 2, le 2 octobre dernier, ont enregistré les meilleures audiences de la soirée, battant le grand débat organisé en prévision des élections au Danemark.

Produite par la chaîne DR, Carmen Curlers suit les traces de The Killing et Borgen, conquérant de nombreux téléspectateurs et territoires (dont le Canada, la France et la Belgique). Avec son parfum d’émancipation féminine que ne renieraient ni Mad Men ni la série Berlin 56, la saga a été sacrée meilleure série européenne à la rentrée lors du festival de la Fiction TV de La Rochelle.

Karin Tshidimba

★★★ Carmen Curlers Brushing historique Création Mette Heeno Réalisation Natasha Arthy, Christian Tafdrup Avec Morten Hee Andersen, Maria Rossing, Nicolai Jørgensen, Rosalinde Mynster… Sur Be à la demande Dès le 6/12 (8 x 52’)