Au fil de quatre fictions se dévoile le côté obscur de la Suisse. Avec Fanny Ardant, Kacey Mottet Klein, Dominique Reymond, Michel Vuillermoz. Sur Arte, ces jeudi et vendredi, vers minuit.

Qui dit Suisse, pense chalet, alpages, ski et fromage. L’image du banquier et des montres de prix ne vient que plus tard. Pourtant, derrière la façade proprette, la Confédération helvétique a aussi son lot de dysfonctionnements et de petites magouilles, de sombres affaires et de faits divers. C’est dans ce vivier-là que puise la collection Ondes de choc★★★ qui renvoie, comme son nom l’indique, à la stupeur et aux tremblements causés par certaines affaires sur l’entourage et les proches des personnes concernées, mais aussi sur le reste de la société.

Rassemblés au sein de la société de production Bande à Part, quatre réalisateurs ont scruté des affaires récentes qui ont défrayé la chronique suisse et le résultat est évidemment gratiné : parricide, tueur en série, bavure policière et suicide collectif. De quoi durablement écorner le portrait suisse…
On a parfois tendance à l’oublier mais c’est bien à Genève qu’a été fondé l’Ordre du temple solaire. Cette réalité violente et crue est rappelé dans la fiction Sirius réalisée par Frédéric Mermoud (Moka), épaulé par deux acteurs saisissants : Dominique Reymond (Pour Djamila) et Carlo Brandt (E-Love). Un récit qui rappelle que les dérives sectaires se cachent parfois derrière la (fausse) douceur et la foi, un style de vie 100 % bio et un défilé de toges blanches.

Cerveaux embrumés

Tout aussi dérangeant est Journal de ma tête★★★ filmé par Ursula Meier pour lequel elle s’appuie sur les talents de Kacey Mottet Klein et de Fanny Ardant. Posé et très juste, l’acteur campe avec une maîtrise impressionnante ce jeune homme d’apparence paisible hanté par des idées de meurtre et lui confère une troublante humanité. Fanny Ardant est comme toujours à fleur de peau dans le rôle de cette professeure de Littérature peu à peu rattrapée par le doute et la culpabilité, elle qui incitait ses élèves à confier leurs tourments et leurs sombres pensées à leur journal intime.
Au casting, on croise aussi Stéphanie Blanchoud avec laquelle Ursula Meier vient de réaliser le drame familial La Ligne sorti en salle la semaine dernière.

Dans la foulée, on pourra encore découvrir La Vallée★★ et Prénom: Mathieu, deux autres variations sur des jeunes hommes en difficultés. Le premier, Riyad, s’est laissé convaincre par un petit caïd de sa cité de voler une voiture de luxe pour son compte, mais l’expédition vire au drame. Et Riyad n’a pas d’autre choix que de fuir dans la montagne et de tenter la traversée vers la France sous la neige…
Signée Jean-Stéphane Bron, cette fiction ultra-réaliste est portée par un magnétique acteur débutant, Iliès Kadri, jeune recrue issue des rangs d’un bataillon de Chasseurs Alpins.

Enfin, Lionel Baier (La Vanité) se penche sur le calvaire vécu par un jeune homme qui a échappé aux griffes d’un tueur en série, à qui la police demande de tracer le portrait robot de son agresseur. Maxime Gorbatchevsky et Michel Vuillermoz se font face dans Prénom: Mathieu, thriller qui, comme Journal de ma tête, a été présenté dans la section Panorama de la Berlinale en 2018. Démontrant que si la Suisse a des vices cachés, elle possède de nombreux talents à exposer.

Karin Tshidimba