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real humans saison 2.jpg« Si la technologie est une drogue, quels sont ses effets secondaires ? » interroge, depuis le 1er mai, la très perturbante série Black Mirror*** diffusée sur France 4, le jeudi vers 22h30.

Que l’on ait envie de détourner les yeux ou pas, la question affleure également de façon lancinante dans la saison 2 de Real Humans*** qui arrive ce jeudi soir à 20h50 sur Arte.

La première saison d’Akta Manniskor (en VO) avait connu un important succès au printemps dernier et la trame renforcée de cette saison 2 ne devrait pas relâcher son étreinte sur un public oscillant entre trouble et fascination.
Si la question de la cohabitation (harmonieuse) et de la dépendance aux machines était posée dans la première salve de 10 épisodes, la deuxième envisage les relations que nous nouons avec les êtres humains à travers notre rapport aux machines.

Si certains hubots sont de plus en plus tentés par le mode de vie humain, espérant connaître l’amour, fonder une famille et avoir des enfants, comme le confie la jeune hubote Florentine au look digne d’une chanteuse d’Abba. D’autres, comme Bea (photo), veulent libérer les hubots de leur condition de machine en retrouvant le code source de David Eischer, créateur d’une lignée de hubots «autonomes» (ses « enfants »). Un code source qui doit leur permettre d’accéder au libre arbitre.

Entre les êtres humains tentés par le clonage, voire par le mirage de l’immortalité, et les robots humanoïdes désireux de trouver leur place au sein de l’espèce humaine, les frontières sont de plus en plus brouillées et le malaise est consommé. Le plus troublant étant, bien sûr, que cette fiction d’anticipation nous projette dans un monde étrangement semblable et proche du nôtre.

real humans s2.jpgComme le confirmait Lars Lundström, créateur de la série suédoise, lors de son passage au Festival Séries mania à Paris : « C’est déjà là : on travaille sur des robots soldats et des robots qui feront office de prostitués, Google photographie la planète sous tous les angles et banalise le transhumanisme avec les Google glass… » Ces questions n’ont donc rien de «douces» utopies.

« La métaphore et la force de l’identification permettent de parler, dans « Real humans », du racisme, de l’homophobie ou de l’esclavage moderne. Et de notre responsabilité : nous avons créé ces robots, nous devons les assumer ! » insiste France 4, en écho d’Arte, soulignant son intention de parler aux jeunes adultes, directement concernés par ces questions de dépendance aux écrans, via une série comme Black mirror plutôt que par le biais d’un débat traditionnel.

Sous le couvert de la fiction, Real Humans pose donc des questions fondamentales sur la nature humaine: le clonage avec scannage des mouvements, des attitudes et d’une partie des souvenirs permet-il de récréer un être humain? Peut-on transférer sa conscience à l’intérieur d’un hubot? S’il ressent des émotions, un hubot devient-il humain pour autant ? L’utilisation d’Hubots «dotés de sentiments» à des fins de pur divertissement (dans le Hub Battle land ou dans l’industrie sexuelle) est-elle éthique ?

Par contraste, on note à quel point ces questions entrent en résonance avec celles posées dans les prémices de la série Revolution (dont la 1e saison vient d’être éditée en DVD). Qu’adviendrait-il de nous si nous étions subitement coupés de toute énergie (électrique), que nous ne disposions plus d’aucune technologie et qu’il nous fallait tout réinventer? Assisterait-on au chaos ou un autre mode de vie en commun serait-il possible? Serait-ce l’avènement d’une nouvelle humanité ?
Cédant régulièrement aux sirènes du suspense et de l’aventure, cette série, signée Eric Kripke et JJ Abrams, n’a pas oublié de poser quelques questions de fond. Mais de façon nettement moins poussée et cinglante que nos voisins britanniques et suédois, toujours prompts à sonder les angoisses et les peurs qui hantent nos esprits.
KT