La plainte d’une journaliste norvégienne pointe du doigt les nombreux dysfonctionnements dont souffre l’Association de la presse étrangère à Hollywood (HFPA) qui, chaque année, remet les prestigieux Golden Globes. La soirée de ce dimanche, qui aura lieu en mode virtuel, s’annonce pimentée
«Il est vrai que nous devons inclure plus de membres noirs, mais aussi de membres représentant des horizons différents, et nous allons travailler immédiatement à la mise en place d’un plan pour atteindre ces objectifs dès que possible.»
Cet aveu, concédé par les membres de la HFPA, met en lumière un reproche adressé de longue date à la Hollywood Foreign Press Association qui remet les Golden Globes au début de chaque année, ouvrant ainsi la saison des récompenses à Hollywood.
Contrairement aux Oscars, remis chaque année par environ 8000 membres de l’Académie du cinéma, tous issus de la profession, les Golden Globe Awards sont attribués par 87 personnes seulement, 87 journalistes internationaux représentant à Los Angeles des médias étrangers. La règle en vigueur veut que les nouveaux membres ne sont accueillis que si leur candidature est soutenue et validée par deux parrains, membres de l’HFPA. Les membres actuels étant pratiquement reconduits d’année en année, ceci explique à la fois le manque de diversité et le vieillissement de l’association.
Manque criant de diversité
Consciente des reproches récurrents qui lui sont adressés depuis de nombreuses années, une porte-parole de la HFPA a ajouté, par voie de communiqué, que « tous les journalistes de tous horizons ethniques et culturels basés dans le sud de la Californie qui écrivent pour des médias internationaux peuvent (désormais) postuler », ajoutant que le groupe actuel est en majorité féminin, avec 35% de membres non-européens. Mais cette déclaration ne trompe personne…
Cette annonce du prochain changement des statuts de la HFPA est la conséquence directe de la plainte déposée il y a trois mois par Kjersti Flaa, journaliste norvégienne spécialisée dans le divertissement. Elle a en effet assigné l’HFPA en justice après que sa candidature a été rejetée une nouvelle fois. Elle accusait l’association d’avoir « institutionnalisé une culture de corruption » et rejeté des candidatures pourtant parfaitement valables. Elle pointait notamment le manque d’éthique des membres de l’association acceptant, selon elle, des « milliers de dollars de la part des studios ou des célébrités à qui, ensuite, ils attribuent des trophées ».
Le juge a finalement rejeté sa plainte, estimant notamment que la journaliste n’avait pas subi de préjudices financiers en raison du refus de sa candidature. Mais certains membres de l’HFPA eux-mêmes regrettent cette décision « qui aurait pu faire bouger les choses » comme ils l’ont confié, sous couvert de l’anonymat, au Los Angeles Times.
Le scandale de la série « Emily in Paris »
Au terme d’une longue enquête, le Los Angeles Times pointe aussi le traitement particulier accordé à de nombreux membres de l’HFPA ayant voyagé à Paris, aux frais de la production, pour assister au tournage de la série Emily in Paris. Série qui, malgré des critiques très négatives dans la presse internationale – pointant les clichés et les nombreuses invraisemblances de son scénario – s’est miraculeusement retrouvée en très bonne place parmi les programmes ayant engrangé le plus grand nombre de nominations cette année…
Au même moment des films comme Da 5 Bloods de Spike Lee ou Ma Rainey’s Black Bottom se retrouvent snobés et des séries acclamées à travers le monde entier comme I May Destroy You ou Lovecraft Country n’ont engrangé aucune nomination. Ce qui n’avait pas manqué de susciter colère et stupéfaction au début du mois de février. Points communs de toutes ces productions reparties bredouilles ou presque : leurs interprètes et créateurs sont tous noirs. Rappelons qu’aucun noir ne figure parmi les 87 membres de l’HFPA. Et ce, depuis la création de l’association…
Une campagne est menée en ce moment même sur les réseaux sociaux avec les hashtags #ReformGoldenGlobes #TimesupGlobes et #cleanupHFPA. On est curieux de voir l’écho qui en sera donné demain soir durant la cérémonie d’une remise de prix vraisemblablement pimentée…
Pour rappel, la cérémonie, coanimée par les comédiennes Amy Poehler et Tina Fey, aura lieu en mode virtuel à la fois depuis une salle de spectacle à New York et une autre à Los Angeles.
Karin Tshidimba
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