Disparitions d’enfants, expériences scientifiques et crimes : Syndrome E s’inscrit aux frontières du genre et bouscule l’image de TF1. A voir également sur Tipik

Quels démons poursui(ven)t Sharko (Vincent Elbaz) flic bourru et solitaire qui vient de se défenestrer en pleine bagarre avec un suspect sous les yeux d’une étrange gamine ? Pour ne rien arranger, la route de ce flic, hanté par un drame personnel, croise celle du lieutenant Lucie Henebelle (Jennifer Decker), elle-même sujette à des troubles de la conscience et témoin d’un meurtre étrange. Sharko est chargé d’enquêter sur cette affaire.

Entre ces deux policiers un peu paumés se dessine peu à peu un lien qui les rend inquiétants aux yeux de leurs proches. Les deux inspecteurs luttent en effet au quotidien contre des hallucinations envahissantes. Or ce n’est que le début d’une série de morts violentes et inexpliquées. Et pendant ce temps, au Maroc, quatre gamins disparaissent mystérieusement alors que rôde une étrange camionnette blanche.

Sharko et Henebelle sont les personnages centraux de Syndrome E, adaptation du fameux thriller éponyme publié par Franck Thilliez en 2010 aux éditions Fleuve noir. Un polar vendu à plus de 320 000 exemplaires qui retrace une enquête glaçante ancrée dans le sillage d’expérimentations scientifiques troubles, via la manipulation mentale et les neurosciences.

Recherches scientifiques et faits divers réels

Sous le vocable Syndrome E se cache un ensemble de signes et symptômes qui mènent à la transformation d’individus lambda en tueurs répétitifs, un syndrome décrit par le neurochirurgien Ithzak Fried.

L’intrigue emprunte la voie des neurosciences pour mieux aborder ce phénomène aux contours mystérieux qui implique un vieux film amateur bourré de messages subliminaux. Sous ses dehors complexes et entremêlés, l’affaire est inspirée de faits réels survenus au Canada dans les années 60.

Après une tentative avortée de le porter sur grand écran aux États-Unis, ce thriller mâtiné d’horreur et de science-fiction a été transposé en série par Mathieu Missoffe, le créateur de la série Zone blanche, amateur d’atmosphères étranges et d’univers inexplorés. Le défi d’adapter Franck Thilliez, auteur français largement reconnu à l’international pour son exploration des frontières de la science, ne pouvait que l’enthousiasmer.

Imprégné de l’univers créé par le maître français du polar à travers ses douze romans – entre scalpel, corps mutilés, cervelles et larmes de sang – son parti pris est de « croiser d’emblée les itinéraires de Sharko et Henebelle qui étaient indépendants, au départ, dans le roman ». Cet univers sombre et graphique marque la volonté de TF1 d’explorer le genre et d’aborder une fiction qui ne soit pas uniquement destinée au grand public. Même si elle cède parfois à l’appel de vieux réflexes narratifs très ancrés. En résultent six épisodes tendus, oscillant entre réelle prise de risques et ressorts éprouvés, mis en images par Laure de Butler (La Promesse) avec une ambition esthétique affirmée.

Une saison 2 déjà en écriture

A travers son personnage sombre et fracassé, Vincent Elbaz révèle un talent très éloigné de son goût habituel pour la comédie (La Vérité si je mens, Les Randonneurs), mais déjà mis en lumière notamment dans la série No Limit. Son rôle entre en résonance avec la résilience dont fait preuve Jennifer Decker (de la Comédie française) en inspectrice faussement fragile et déboussolée. Dans cette ambiance crépusculaire d’un Paris peuplé de tours, la clé du mal mystérieux qui frappe l’inspectrice Henebelle doit être recherchée du côté de son adolescence.

Tissant sa toile de la France au Maroc et même vers le Canada, cette nouvelle création de TF1, découverte en avant-première lors du festival Séries Mania, explore certaines dérives technologiques et scientifiques à travers un casting éclectique. Outre l’auteur de polars très prisés du grand public, la chaîne a réuni aux côtés de Vincent Elbaz et de Jennifer Decker, Emmanuelle Béart, Kool Shen (Engrenages), Bérangère Krief (Bref), Samy Seghir, Anne Charrier et Dominique Blanc.

Le Syndrome E, huitième roman de Franck Thilliez, s’inscrit en tête de sa trilogie sur la violence poursuivie avec Gataca et Atomka. En cas de succès d’audience, il pourrait donc ouvrir la voie à d’autres développements inscrits aux frontières de la science et des neurosciences. La saison 2 est d’ailleurs déjà en écriture. La série est à suivre au choix sur Salto, Tipik, TF1 ou Pickx.be.

Karin Tshidimba

Syndrome E** – Spectres et neurosciences – Création Mathieu Missoffe, d’après le roman de Franck Thilliez – Réalisation Laure de Butler – Avec Vincent Elbaz, Jennifer Decker, Emmanuelle Béart, Kool Shen – Sur Tipik et TF1 Les 28 et 29 septembre (6 x 52’).