Écrit par Abi Morgan et porté notamment par Nicola Walker, ce drama juridique spécialisé dans le droit de la famille offre un riche état des lieux du couple dans la décennie 2010-2020. Les saisons 1 et 2 seront disponibles sur Arte.tv dès le 3 décembre.

Cela fait six semaines qu’Hannah Stern (Nicola Walker, vue notamment dans Unforgotten) a quitté le cabinet familial où elle travaillait avec sa mère et sa sœur cadette Nina (Annabel Scholey) pour rejoindre la prestigieuse équipe d’avocats de Noble & Hale.

Son premier gros client, le millionnaire Davey McKenzie (Stephen Tompkinson) annonce sans ménagement à sa femme Goldie qu’il a pris rendez-vous pour sceller leur divorce. Stupeur et tremblements pour la quinquagénaire bon chic bon genre (Meera Syal) qui tombe littéralement des nues. La douceur et la sollicitude d’Hannah lui valent d’emblée la reconnaissance de celle qui a passé sa vie, en toute confiance, dans l’ombre de son mari. Pour la rassurer, Hannah lui confie qu’elle a été à bonne école pour « apprendre à regarder les gens se déchirer » et qu’elle pourra lui être de bon conseil. Hannah était en effet à peine adolescente lorsque son père est parti au bras de leur jeune fille au pair âgée de 24 ans. Or voilà que trente ans plus tard, la bouche presque en cœur, Oscar (Anthony Stewart Head) vient faire sa réapparition dans leur vie.

Ruth Defoe et ses trois filles: Nina, Hannah et Rose

L’état du couple en 2018

Sous l’œil alerte d’Abi Morgan (The Hour, River ), tout un pan de la bonne société londonienne se dévoile dans des moments de crise souvent épiques et blessants où se révèlent les ambitions cachées, les infidélités, les mesquineries et les mensonges. Ainsi se tisse The Split , tragi-comédie moderne qui, d’un contrat prénuptial sourcilleux à un divorce calamiteux, en dit long sur la nature humaine et l’état de santé du couple et du mariage en tant qu’institution.

Autant de tensions et de frictions qui testent la réserve de lucidité et de sang-froid dont Hannah fait preuve d’ordinaire pour conseiller les hommes et les femmes qui se présentent face à elle. Mais la réapparition de son père et le futur mariage de sa plus jeune sœur, Rose (Fiona Button), risquent de fissurer cette belle façade imperturbable. D’autant qu’Hannah peine à maintenir à flot son agenda d’avocate très sollicitée et de mère de famille nombreuse plutôt complice. En outre, l’intérêt que lui porte Christie Carmichael (Barry Atsma), son collègue mais ancien complice d’unif, ne va sans doute rien arranger…

Le naturel de Nicola Walker, la réalisation extrêmement fluide de Jessica Hobbs et les dialogues tranchants d’Abi Morgan font merveille dans cette série étonnamment lumineuse où s’entremêlent pourtant les destins de nombreux couples célèbres ou d’individus anonymes. Un petit théâtre d’ombres découvert à travers le prisme de relations amoureuses et intimes mises à mal par l’usure du temps, le manque d’honnêteté, l’absence de sincérité ou les fantômes d’un passé compliqué.

Chacune des trois avocates de la famille, à commencer par la mère Ruth Defoe (Deborah Findlay) – qui a construit sa carapace autour du traumatisme vécu il y a trente ans – semble être passée maîtresse dans la gestion des rêves envolés et des illusions perdues.

La BBC planche sur la saison 3

Découverte en 2018 au Festival Séries Mania, la série, coproduite par Sundance Channel aux Etats-Unis, arrive enfin sur Arte qui propose l’intégralité des 2 premières saisons, soit 12 épisodes, dès ce 3 décembre. La BBC vient d’ailleurs de confirmer la prochaine mise en production d’une saison 3 afin de clore cette brillante exploration sociale au parfum de thérapie collective déclinée en trois actes.

À l’image de l’oignon qui dévoile ses couches les unes après les autres, The Split suit les vies perturbées des quatre femmes de la famille Defoe, tout en effeuillant différents cas de divorce, plus ou moins retentissants et en accompagnant les époux McKenzie dans leur épineux bras de fer : autant de niveaux de récits opposant des adultes blessés et souvent déboussolés. Un univers sur lequel plane l’ombre tutélaire d’une autre grande série mêlant l’intime et le judiciaire, l’américaine The Good Wife portée par Julianna Margulies.

Karin Tshidimba