Depuis octobre 2017 et l’éclatement de l’affaire Weinstein, «les femmes sont décidées à prendre le pouvoir et à s’organiser.» Pointant la fin des archétypes et des stéréotypes, interrogeant les représentations renouvelées, Iris Brey suit le mouvement en cours dans la société et les médias.
Le temps est enfin venu de changer les règles du jeu à Hollywood, note-t-elle. «Une transition difficilement imaginable sans une forme de violence. Et les séries se chargent de mettre en scène cette violence» écrit-elle en introduction de son livre Sex and the series revenu en version augmentée, après une première édition en 2016. Un ouvrage qui mérite de s’allonger sous le sapin.
Notant que «la culture américaine est bien plus ouverte aux féminismes et à une réflexion poussée sur le genre qu’en France», Iris Brey, titulaire d’un doctorat de l’Université de New York et professeure de cinéma sur le campus français de University of California, reprend et étoffe son propos en même temps qu’elle accroît le corpus de séries décryptées.
«Ce que proposent les séries les plus contemporaines est une nouvelle esthétique du désir», un regard qui sonde le ressenti féminin, qui permet au spectateur de ressentir l’expérience féminine : le femal gaze. « Le personnage féminin n’est plus mis sur un piédestal, comme une star qu’on exhibe en spectacle. L’héroïne doit être moteur du récit, son histoire qui remet en question l’ordre patriarcal, doit être racontée de son point de vue. » Comme l’ont largement démontré des séries comme Girls ou Orange is the new black (photo ci-dessus) notamment.
Rappelant que la série demeure le «lieu parfait pour examiner des sujets personnels» , Iris Brey souligne que «la plupart des séries qui proposent des nouvelles représentations de personnages féminins ont été créées par des femmes» : Shonda Rhimes, Michelle Ashford, Ilene Chaiken, Jenji Kohan, Jill Soloway,…
«Entre ces deux extrêmes (puritanisme excessif et pornographie réductrice sur le net), les séries proposent une vision subversive des sexualités féminines en articulant un discours libérateur.»
Et ce n’est pas tout… Sororité mise en avant dans Big Little Lies (photo ci-dessous), oppression et révolte des femmes scrutées dans The Handmaid’s tale (photo ci-dessus), mécanismes de domination mis à mal dans Jessica Jones ou OITNB : autant de données et de phénomènes que l’universitaire interroge, prouvant que les séries sont bien à l’avant-garde de l’envol féministe.
«Et si le séries avaient tout anticipé ?» interroge Iris Brey. Il est vraiment difficile, même pour les plus réfractaires, d’encore en douter.
Karin Tshidimba
Sex and the Series, Iris Brey, Ed. de L’Olivier, 272 pp. , 16€
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