orange-is-the-new-black.jpgLa prison est le nouveau lieu dont on cause. Coup sur coup, deux séries se sont glissées dans ce cadre anxiogène et étroit pour en explorer les contours et règles tacites, mais aussi pour y exploser les formes et limites du récit. Résultat: les deux séries offrent des parcours de vie extrêmes mais nettement moins sombres et clichés qu’on pourrait le penser, au départ.

On a déjà écrit ici tout le bien qu’on pensait de Rectify*** qui suivait le parcours du combattant d’un ex-condamné à mort, innocenté et relâché après 19 années passées en prison. Un récit riche en impressions et sensations pour ce tout jeune homme emprisonné du jour au lendemain et relâché tout aussi brusquement sans avoir vu le monde changer. Portée par un Aden Young, impressionnant et fébrile, cette formidable série a d’emblée marqué le destin de Sundance Channel, la petite chaîne qui monte aux Etats-Unis.

Avec Orange is the new black**, Netflix propose de suivre le chemin inverse: l’entrée en prison d’une innocente jeune femme qui a préféré se rendre plutôt que de se perdre dans un long et difficile procès pour complicité de trafic de drogue.

Peu après sa sortie du collège, Piper était tombée éperdument amoureuse d’une dealeuse qui s’est jouée d’elle et de son physique de petite sainte-nitouche blonde. Issue d’un milieu plutôt aisé et «éduqué», Piper Chapman a été propulsée du jour au lendemain, dans un univers dont elle ignore tout mais dont elle tente d’étudier les règles, accentuant encore son profil d’oie blanche.

orange is the new black.jpgLa série est inspirée d’une histoire vraie, celle de Piper Kerman, emprisonnée pendant quinze mois entre 2004 et 2005 dans une prison du Connecticut. Une expérience qu’elle raconte dans son livre « Orange Is the New Black: My Year in a Women’s Prison » (paru en 2010), qui sert de base au scénario.

Les contrastes sont un peu la marque de fabrique de Jenji Kohan comme le suggère sa précédente série, Weeds. On y suivait le parcours d’une tranquille petite femme au foyer de banlieue devenue dealeuse de cannabis pour assurer les traites de sa maison et le train de vie de sa famille, à la mort de son mari. Humour et grincements de dents, quiproquos et situations tendues alternaient au fil d’un récit qui était, forcément, de moins en mois rose et léger.

On ne sait pas encore ce qu’il en sera pour Orange – dont nous n’avons vu que les trois premiers épisodes, touchants et prometteurs – mais, d’emblée, le ton est celui de la tragicomédie: mélange entre humour et tensions, flash-backs des jours heureux et présent sous pression. S’intéressant aux répercussions sur la vie de Piper (Taylor Schilling) et de Larry, son fiancé (Jason Biggs), Jenji Kohan élargit son propos en explorant les coups du sort qui ont conduit, en ce lieu, les principales détenues que Piper est amenée à côtoyer. A commencer par la redoutable Red, puissante matrone russe qui règne sur la cuisine, mais pas seulement.

Dans cette petite prison de sécurité minimale, la violence est bien plus larvée que frontale. La référence à Oz – série fondatrice sur l’univers carcéral – est d’emblée présente dans le discours «d’accueil» du directeur de la prison. «Ici, ce n’est pas Oz, les filles se battent plutôt à coup de rumeurs» tente-t-il de la rassurer. Un univers où le respect se conquiert pourtant de haute lutte comme Piper va en faire l’amère expérience.

Comme ce fut le cas précédemment pour House of cards de David Fincher, la première saison (13 épisodes) est disponible intégralement depuis le 11 juillet dernier pour les abonnés de Netflix. A chacun de gérer son rythme de découverte en fonction de sa disponibilité.
Sûre de l’attractivité de sa série, Netflix en a déjà commandé une deuxième saison dont le tournage devrait bientôt démarrer…

KT