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Comme Unité 42, la saison 5 de Skam accueille un personnage sourd. Mais ces exemples restent l’exception. Quels sont les mécanismes mis en place par la RTBF pour favoriser la mixité au sein des castings et évoluer vers plus d’inclusivité dans les séries belges ?


« On veut que nos séries ressemblent à la Belgique. Ce n’est pas seulement un positionnement politique, on est persuadés que plus les équipes sont diverses, meilleures sont les séries. » Une diversité qui se voie à l’écran mais débute dès l’écriture.
« On a affaire à des inégalités et des mécanismes de discrimination complexes contre lesquels la RTBF peut difficilement se battre seule mais la conscientisation fait partie intégrante de nos missions » souligne Marc Janssen, responsable du pôle Fiction à la RTBF.

A la clé, ni document formel, ni quotas établis mais des « discussions ouvertes avec les équipes créatives, les producteurs ou productrices« . « C’est une conviction artistique aussi, souligne Marc Janssen. Si on prend l’exemple de la médecin légiste sourde et muette d’ Unité 42 campée par Danitza Athanassiadis, NdlR – c’est super parce que très peu de rôles sont offerts à ces catégories de personnes mais, en plus, dans les séries policières et procédurales, toutes ces scènes se ressemblent. Le fait que le rôle ait été confié à une personne sourde fait que la scène gagne en originalité et en force, donc on fait d’une pierre deux coups. On colle à la réalité de la société, en mettant en avant des personnes en situation de handicap, et on rend des scènes et des personnages plus intéressants. La volonté de diversité est toujours double : l’authenticité et l’originalité vont de pair, cela donne un caractère de nouveauté à des scènes déjà vues mille fois » insiste-t-il.

Ce qui est le cas de la saison 5 de Skam en intégrant le Youtubeur Lucas Wild, alias Camille personnage sourd et muet.

Favoriser des castings plus ouverts, loin des clichés et des stéréotypes

Cela passe aussi par la « conscientisation » des agences de casting, admet Marc Janssen.
« En mai ou juin dernier, on a réuni les quatre, cinq principales agences qui travaillent sur les séries en Belgique. On leur a dit qu’on soutiendrait toute initiative pour caster les personnages de façon originale. On travaille avec les auteurs pour les encourager à avoir des personnages qui reflètent la diversité. Et quand on ne spécifie rien dans le scénario, cela ne veut pas dire qu’il ou elle doit être forcément blanc ou blanche. » Si les agences semblent être sur la même longueur d’onde, elles avouent avoir parfois des difficultés lorsque les directives de casting sont trop précises. « Parce que certaines nationalités sont moins représentées en Belgique ou alors elles ne le sont pas par des comédiens suffisamment professionnels. »

« Pour nous, la seule question est celle du talent, poursuit Marc Janssen. C’est le cas du casting d’Invisible, la nouvelle série RTBF en cours de tournage. Myriem Akheddiou (photo ci-dessous) y tient le rôle principal: celui d’une femme médecin bourgeoise installée en Wallonie. Et récemment, Yasmina Douieb portait le personnage de la psy dans La Trêve. Personne ne se pose la question de leurs origines. »

Si on peut espérer que des jeunes de toutes origines sortent aujourd’hui des écoles (l’IAD, l’Insas, le Conservatoire, etc), on sait que les étudiants d’origine maghrébine ou africaine y sont moins nombreux et que dire des comédiens d’origine asiatique. Y a-t-il moins de candidats ou n’ont-ils pas été suffisamment encouragés ?
« C’est toute la question, admet Marc Janssen. Et celle des comédiens en situation de handicap est forcément encore plus délicate. Difficile de savoir quel est le potentiel inexploité d’acteurs, reflets de cette diversité… D’où les encouragements adressés aux agences de casting. »

« La diversité, c’est la parité, la mixité des origines mais aussi la diversité sociale »

« On essaie d’encourager nos auteurs à voir des séries qui reflètent des réalités sociales différentes. On a quand même beaucoup d’auteurs issus du même milieu social. Nous avons envie d’avoir des séries belges qui parlent de l’éventail des questions économiques et sociales. C’est pour cela qu’on est ravi qu’arrive la série Baraki qui parlera de cette composante populaire de notre société avec humour et tendresse. Au-delà de la comédie, on a besoin de séries qui montrent la diversité de la Belgique aujourd’hui. C’est un point sur lequel les Britanniques sont très bons. C’est clair qu’on rêve d’avoir une Happy Valley belge drôle, palpitante avec des comédiennes extraordinaires, reflets d’une réalité sociale » qui passe souvent sous les radars de la fiction.
« Par exemple, on travaille sur une série qui parle de la rencontre entre une société de camionneurs de Wallonie picarde et le milieu des antiquaires du Sablon, c’est très intéressant. Il y a une richesse, une diversité et un potentiel très fort. » La série baptisée Mascarade, produite par Matching Socks Ventures, est encore en développement.

« Lorsqu’on est face à une équipe très jeune, on les encourage à trouver des partenaires qui aient d’autres profils sociologiques et d’âges que le leur mais on ne peut rien imposer et on ne veut pas risquer de les déstabiliser dans l’écriture qui reste un exercice compliqué, nécessitant entraide et proximité. On a refusé des sujets qui nous semblaient trop caricaturaux ou parce que les auteurs ne connaissaient pas suffisamment la réalité dont ils voulaient parler », précise Marc Janssen.

Pour toutes ces questions de diversité et de mixité, la RTBF discute d’ailleurs avec la Fondation Roi Baudouin « qui organise des rencontres avec des experts du vécu » (santé mentale, pauvreté, vie des seniors, etc.) « On prépare une journée spéciale dans le cadre de l’Atelier du Fonds. Pour stimuler l’imagination des auteurs et leur montrer qu’on peut trouver des expériences de vie fascinantes, fortes, différentes qui puissent les inspirer. »

Karin Tshidimba