dexter.jpgLa fin est proche. Du moins, si vous suivez Dexter au rythme de sa vie à Miami.
Dans à peine plus d’un mois, le serial killer préféré du petit écran entamera sa tournée d’adieu sur Showtime: le 30 juin très exactement.
En Belgique, on n’en est, bien sûr, pas encore là puisque Be tv ouvre l’album de la saison 6 ce lundi à 20h55.

Pour les plus mordus d’entre nous, il est cependant temps de se préparer à l’inévitable: l’heure des adieux. Même si, pour certains, cela s’annonce plutôt coton. Dexter est en effet la deuxième série la plus téléchargée illégalement en 2012, juste derrière Game of Thrones: 3.850.000 téléchargements pour 2.750.000 téléspectateurs estimés aux Etats-Unis. Un score qui donne une bonne idée du phénomène Dexter, détaillé ci-dessous…

un générique fascinant
Il y a d’abord cette « mise en bouche », bijou de maîtrise et de suggestion. Là où ne se dessinent que les banals gestes du quotidien (Dexter ouvre un oeil, se rase, prépare son petit-déjeuner, l’engloutit et s’habille), chaque geste est parfaitement cadré et chorégraphié pour suggérer le début d’une tension qui ne va pas lâcher le téléspectateur. La goutte de sang tombée dans l’évier, la viande tranchée et jetée sur le gril, le ketchup qui enserre bientôt l’oeuf sur le plat, l’orange sanguine pressée avec force, le visage collé contre le T-shirt jusqu’à l’étouffement… Autant de scénarios de mise à mort symboliqument suggérés.

Une série d’anthologie se reconnaît d’abord à son générique, qui signe d’emblée une atmosphère. Rien, absolument rien n’est laissé au hasard. Couleurs, qualité de l’image : une esthétique assumée. Sur ce plan, « Dexter » n’a rien à envier à ses prédécesseurs : « Weeds », les « Soprano » ou « Six feet under »… D’autant que les points communs avec les séries précitées ne manquent pas, y compris sur le plan de l’intrigue : double personnalité, vernis de respectabilité, névroses à peine cachées ; bref, « l’american way of life » joliment détourné. Mais Dexter va plus loin.

un personnage unique
Son « héros », à l’image de celui de « The Shield », applique sa propre loi en se moquant des conséquences et en ne cachant pas sa fascination pour les individus borderline ou pour la violence. Traumatisé dans l’enfance, et incapable de ressentir aucune émotion, Dexter est parfaitement hermétique à la souffrance d’autrui, d’où son absence de compassion et sa cruauté réelle lors de ses mises à mort millimétrées de criminels multirécidivistes.

Expert médico-légal le jour, il devient serial killer à la nuit tombée, sans même sourciller. Les producteurs ont l’intelligence d’éluder les scènes les plus sanglantes mais ce qu’on imagine est aussi glaçant que ce que l’on voit. On est donc bien loin de l’image du héros sans peur et sans reproche qui fait en sorte que le monde tourne plus rond en éliminant les bad guys.
Outre son attirance pour le sang, Dexter ne peut nier un sadisme certain ainsi que les limites d’un libre arbitre qui veut qu’il est seul à décider « qui » mérite de passer de vie à trépas.
Quant à sa quête du « découpeur de prostituées », elle cache une part de fascination et d’admiration complètement assumée… Ainsi se dessine une personnalité bien sombre et bien tourmentée qui bouscule à l’envi le téléspectateur, se jouant de sa fascination pour les faits divers et les personnalités troubles.

un univers sondé en profondeur
Jouant la carte de l’ultrafidélité au roman d’origine (« Darkly dreaming Dexter ») de Jeff Lindsay, la série a ensuite pris un certain nombre de libertés affirmées par rapport au second tome (« Dearly devoted Dexter ») mais le succès de la deuxième saison ne s’en est pas ressenti, se terminant sur une audience record. La troisième, annoncée à l’automne *, devrait être encore plus glaçante que les précédentes : « Nothing stops a serial killer like a serial killer », annonce-t-elle.

Dexter rend tangible une règle implicite de la fiction: notre propension à nous faire peur. Les séries américaines en jouent et font, de la transgression, la règle et non l’exception. C’est pour cela qu’elles nous fascinent…
KT
(publié en mai 2008*)