L’Opéra, nouvelle série française pour la chaîne OCS, vient de boucler son tournage masqué en Belgique. Elle a réuni de nombreux talents belges devant et derrière la caméra. C’est la deuxième série coproduite par Belga Productions après Moloch d’Arte. Après les musiciens de Philharmonia, place au corps de ballet de Garnier
Cela faisait longtemps que le lieu n’avait plus connu une telle effervescence. Il faut dire qu’au siège de cette grande entreprise bruxelloise du secteur de l’énergie, le télétravail s’applique largement et les quelques employés encore présents sont priés de manger dans leur bureau et d’éviter tout rassemblement. En ce lundi de décembre, la cafétéria connaît donc une très brève renaissance le temps d’une journée de tournage de la série L’Opéra. Une fiction produite par la chaîne OCS dans laquelle le public suit les trajectoires de trois danseurs aux destins contrastés.
Un tournage très encadré
Les scènes du jour concernent à la fois le début et les derniers développements de l’intrigue. La jeune Flora (Suzy Bemba) y vit son premier repas « contrarié » à la cafétéria de l’Opéra de Paris, prestigieuse école qu’elle vient d’intégrer. Dans une autre scène, on la voit tenter de convaincre les autres élèves de se mobiliser contre une injustice flagrante. Distribution de pétitions et discours devant une assemblée abasourdie ou amorphe. La jeune danseuse a le feu sacré et répond sans faiblir aux indications et demandes du réalisateur. Cette scène n’avait pas pu être filmée précédemment car la jeune fille a dû s’arrêter de tourner pendant un mois, fin octobre, pour cause d’entorse. Il n’y a pas que le Covid dont il faut se méfier…
De nombreux figurants, jeunes ou plus âgés, sont présents sur le plateau, ils portent tous le masque entre deux prises. L’équipe le porte en permanence. Des distributeurs de gel hydroalcoolique parsèment le plateau et les techniciens les plus proches des comédiens en usent avec assiduité. « Au fil des mois, le protocole s’est bien rodé », souligne Gladys Brookfield, directrice de production pour la société Belga Productions, qui a suivi tout le tournage depuis l’interruption du mois de mars.
Un arrêt inopiné qui a nécessité pas mal de réaménagements de planning, notamment en termes d’équipe. Ainsi, il a fallu remplacer deux des trois réalisateurs prévus pour la série. Les Flamands Inti Calfat et Dirk Verheye (Over Water) n’étaient plus libres lors de la reprise en juillet. Un troisième réalisateur français a donc été recruté pour mener à bien les huit épisodes aux côtés de Cécile Ducrocq, également scénariste principale de la série.
Un château à Lessines, devenu le coeur bruissant de l’Opéra Garnier
Pour cette ultime journée de tournage, les deux équipes sont mobilisées. La première, réunie autour du réalisateur Stéphane Demoustier, frère de la comédienne, a investi la cafétéria ; la deuxième tournera dans l’après-midi l’ultime scène de la série dans un appartement proche de la gare du Nord bruxelloise, sous la direction de la réalisatrice Laïla Marrakchi (The Eddy, Rock The Casbah).
« Au départ, les comédiens étaient testés toutes les semaines ainsi que les plus proches de l’équipe. Nous avons appliqué les gestes barrières et engagé un Covid manager. Même avec 40 techniciens présents et parfois jusqu’à 30 figurants, nous n’avons connu aucun souci Covid », se félicite Fabrice Delville, créateur et directeur général de Belga Productions.
Plus de 80% de l’équipe est belge et plus de 80% du tournage a eu lieu en Belgique »
« Nous avons passé beaucoup de temps au château de Lessines dans lequel deux équipes de tournage étaient présentes, soit jusqu’à 60 personnes sur le plateau, mais avec les précautions d’usage » et une sorte de bulle qui s’est créée, par la force des choses, autour de chaque équipe.
« C’est là que nous avons installé les principaux décors de l’école de danse, soit tous les décors ‘backstage’ (coulisses, loges, classes, couloirs) de l’Opéra Garnier. Nous avons utilisé le château comme un studio géant car il est inoccupé et en bon état. On espère pouvoir y retourner pour y faire la saison 2. J’ai été aux deux endroits, Paris et Lessines, et l’équipe déco a fait un travail formidable. La couleur des murs et des couloirs y est plus vraie que nature », confie Gladys Brookfield, les yeux pétillants au-dessus de son masque.
Le tournage n’a séjourné que deux jours au sein du Palais Garnier, notamment pour des scènes nocturnes, et quatre autres jours pour filmer des extérieurs dans Paris.
Le montage de la série, effectué à distance pour cause de Covid, sera également réalisé en Belgique.
Une troupe de danseurs-comédiens
La crédibilité de la série se joue avant tout face caméra et a donc nécessité un casting très soigné : « Tous les comédiens choisis pour les scènes dans l’école soit savent danser (même s’ils ne sont pas professionnels), soit il s’agit de danseurs qui savent jouer. Nos comédiennes ont une bonne formation de base et elles ont suivi deux mois d’entraînement et de répétitions pour les spectacles filmés dans la série. Mais il y a quelques scènes de ballet où certains rôles ont été remplacés par des danseurs professionnels », précise Gladys Brookfield.
« Plus de 80 % de l’équipe technique est belge car plus de 80 % du tournage a eu lieu en Belgique avec un bel équilibre (50-50) entre francophones et néerlandophones. Seuls le réalisateur et les réalisatrices, les assistant(e)s réalisateurs(trices) et scriptes sont français », poursuit Fabrice Delville.
Une implication belge qui n’est pas seulement technique mais aussi financière et productionnelle. « C’est un des rares projets réunissant les trois fonds de soutien régionaux (wallon, flamand et bruxellois) », se réjouit Fabrice Delville. La société Belga Productions, bien connue dans le milieu du cinéma, signe avec L’Opéra sa deuxième production de série, après Moloch, coproduite avec Arte et avant Renaissances en cours de production avec TF1.
Le nouveau terrain de jeu des séries
« Ce projet a occupé nos équipes durant toute l’année 2020 car au-delà des 16 semaines de tournage (4 mois), il y a toute la phase de levée de fonds (3,5 millions d’euros levés par Belga Films Fund), de soumission de projet au tax shelter, de recherches de financements complémentaires, dont ceux provenant des Fonds régionaux (wallon, flamand et bruxellois), sans oublier l’accompagnement de la production », précise Fabrice Delville.
« Avec la réforme du crédit d’impôts en France, moins de films français se tournent en Belgique mais notre pays reste attractif: moins cher et moins compliqué pour les longs projets de séries. Cette diversification de projets est donc une évolution normale pour Belga Productions », souligne Fabrice Delville.
Les huits épisodes seront livrés cet été « pour une diffusion à la rentrée 2021 ». Les discussions sont encore en cours pour une diffusion en Belgique. Ce qui représenterait une suite logique et attendue pour tous les talents belges impliqués…
Visite en coulisses: Karin Tshidimba
Photos du tournage: Jean-Luc Flémal
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