Arte récolte trois prix au Festival de la Fiction de la Rochelle, France TV aussi dont le prix de la meilleure série pour « Une belle histoire » (photo). Les séries courtes et web se distinguent avec Mental, Stalk et Lost in Traplanta… Retour sur le palmarès de cette 21e édition.
Naturel et sincérité des comédiens, destins qui se croisent, dialogues qui sonnent juste : Une Belle Histoire est une belle découverte. Librement inspirée de la série anglaise Cold Feet, la nouvelle création de Frédéric Krivine dépeint les tribulations de trois couples d’amis trentenaires, placés face à des choix cruciaux : deuil, naissance, divorce… Les créateurs du Village français, Frédéric Krivine et Emmanuel Daucé, y optent pour un ton empreint de légèreté et de bons mots portés avec talent par Sébastien Chassagne et Tiphaine Daviot, sacrée meilleur espoir féminin Adami samedi soir à La Rochelle. Une promesse à confirmer et à creuser dans la suite du récit.
Dans la catégorie 26 minutes, Mental qui suit l’évolution de quatre adolescents dans un service pédopsychiatrique, a été couronnée par le jury (photo). Un choix audacieux puisque la série, inspirée d’un format finlandais et produite par France TV Slash, se veut pédagogique : «il faut dire qu’il n’y a pas de mal à aller mal», souligne son producteur.
Avec des fictions comme Laetitia, Intime connexion, Pour Sarah (à voir dès mardi sur La Une RTBF), Mental et Stalk, un fil rouge autour de l’adolescence – en roue libre ou en danger – s’est dessiné au fil de la 21e édition du festival de la Fiction de La Rochelle. On y a vu des fictions françaises davantage en prise avec la réalité ou avec les troubles et remous qui traversent notre société, suivant en cela une tendance très européenne. PMA (Procréation médicalement assistée), dérives adolescentes (alcool, drogue, pornographie, réseaux sociaux), migrations, difficultés financières : même si certaines réalisations pèchent encore par manque de naturel ou d’originalité ou peuvent sembler édulcorées, les thématiques, elles, sont plus diversifiées qu’auparavant.
Arte soigne l’humour décalé
Le fait de se frotter au réel n’empêche pas de le tordre ou de s’en moquer, Arte le prouve avec deux fictions résolument barrées. Temps de chien d’Edouard Deluc, où Philippe Rebbot interprète un capitaine de bateau-mouche à la dérive, a été sacré meilleur téléfilm tandis que le prix du meilleur scénario revient à Etgar Keret et Shira Geffen, créateurs de la série L’agent immobilier portée par Mathieu Amalric (à voir dès jeudi sur Be tv).
Arte a encore été couronnée dans la catégorie Web avec sa série déjantée Lost in Traplanta, où s’illustre l’humoriste belge Kody Kim, prêt à tout pour reconquérir son grand amour. Une série (10 x 7 minutes) coproduite par la RTBF. Enfin, deuxième succès pour France TV Slash : le prix de la meilleure réalisation récompense Simon Bouisson pour la série Stalk, histoire d’une vengeance post-bizuth inscrite dans l’arène d’une école d’ingénieurs en informatique.
L’empreinte du réel
Tonalité nettement plus sombre du côté des fictions unitaires avec Connexion Intime, Itinéraire d’une maman braqueuse et Un homme abîmé dont les interprètes ont tous été récompensés à La Rochelle. Dans le détail: le prix de la meilleure interprétation féminine a été décerné ex aequo à Luna Carpiaux, pour Connexion Intime sur France 2, et Cécile Rebboah pour Itinéraire d’une maman braqueuse sur TF1. Quant à Yannick Choirat, il remporte le prix d’interprétation masculine pour son rôle de victime de viol dans Un homme abîmé (France 2 et TV5 Monde). Enfin, deuxième succès pour France TV Slash : le prix de la meilleure réalisation récompense Simon Bouisson pour la série Stalk, inscrite dans l’arène d’une école d’ingénieurs.
Au coeur de la sélection européenne, le jury a couronné la série espagnole Arde Madrid (meilleure fiction européenne), la finlandaise Invisible Heroes (prix spécial du jury, à découvrir prochainement sur le Séries Corner de la RTBF, photo) et la suisse Helvetica (sacrée meilleure série francophone étrangère).
Belle moisson encore, ou plutôt bonne pêche, au Festival de la Rochelle qui a noté le retour des fictions en costumes, façon grandes sagas avec Le Bazar de la charité, présenté hors compétition par TF1, une nouvelle incursion dans la politique avec Les Sauvages de Canal+, série portée notamment par Roschdy Zem, et une influence indiscutable des faits divers avec La Part du soupçon, Un homme ordinaire ou Laetitia…
Cette édition 2019 a permis d’interroger la place du genre dans les fictions françaises et a été traversée de belles annonces – faites par Arte, France TV et TV5 Monde – en attendant de voir plus clair dans la réforme de l’audiovisuel, promise par le nouveau ministre Franck Riester.
Karin Tshidimba, à La Rochelle
nb: Présentée vendredi au Festival de Toronto, la série Les Sauvages a marqué la clôture du Festival de la Fiction de La Rochelle, samedi après-midi. L’équipe, emmenée par sa réalisatrice Rebecca Zlotowski et le rappeur Sofiane Zermani, a été longuement applaudie à l’issue de la projection du 1er épisode en salle. On y suit le destin d’Idder Chaouch, personnage campé par Roschdy Zem qui accède à la présidence de la République française mais est rejeté à la fois par une partie de l’électorat français et une partie de la communauté algérienne. Une série attendue le 12 octobre sur Be tv.
Et ne pas oublier de dire que Luna Carpiaux, lauréate du prix d’interprétation féminine pour « Connexion Intime » est une jeune comédienne belge !