Sa carapace d’agent grand bourgeois un peu rigide s’est fendue au fil des épisodes… Thibaut de Montalembert nous parle de son personnage, Mathias Barneville, inspiré d’un grand agent artistique de la place parisienne et de l’impact que la série Dix pour Cent a eu sur sa vie depuis trois saisons…

Dominique Besnehard est à l’origine de la série Dix pour Cent . « Il est un peu la mémoire du cinéma français. Il a été comédien chez Pialat dans À nos amours , a été directeur de casting, a découvert des tas d’acteurs comme Mathilda May… Il a été agent chez Artmedia et puis est devenu producteur. Il n’y a que le métier de réalisateur qu’il n’a pas exercé. Il connaît toutes les facettes du milieu et a des histoires plein sa sacoche. En tant qu’agent, il a vu tant de choses, d’où l’idée de les raconter », explique l’acteur Thibault de Montalembert qui campe Mathias dans la série.

Grâce à l’impressionnant carnet d’adresses de Besnehard, la saison 3 de Dix pour Cent*** affiche une classe internationale : Jean Dujardin, Monica Bellucci, Gérard Lanvin, Isabelle Huppert, Béatrice Dalle et quelques retours aussi: Line Renaud, Françoise Fabian, Julien Doré, Joey Starr…

« Dix pour cent » a permis à des acteurs de se glisser dans la peau de leur agent. Et d’avoir un autre regard sur le métier…

L’idée était d’avoir des agents qui représentaient les différentes sensibilités de la profession. On a tous des modèles différents. Le mien, c’est Bertrand de Labbey qui a créé Artmedia. Camille Cottin, c’est Elisabeth Tanner. Un jour, elle est venue sur le tournage et elle a vu Camille bouger. Elle n’en revenait pas parce qu’elle trouvait que Camille avait la même gestuelle qu’elle… Grégory joue plutôt Besnehard. Arlette représente une ancienne agent d’Artmédia qui se promenait toujours avec son chien…

Qu’est-ce qui vous a décidé à accepter le projet ?

Je me suis dit que l’idée était très bonne. Il y avait un côté comédie humaine formidable, un côté balzacien très fort. Que ce soit la présence de Besnehard ou celle de Klapisch, qui a fait le design et donné le ton de la série en saison 1, tout cela m’a donné envie d’y aller.

Avez-vous appris des secrets sur le métier d’agent ?

Non, mais cela m’a fait prendre davantage conscience de la disponibilité qui leur est demandée et de l’invasion que ce métier peut constituer. Je ne suis pas quelqu’un d’invasif, je n’appelle pas mon agent tous les matins. Il y en a qui le font et parmi les plus grands ! Il faut gérer leurs angoisses, etc. C’est un métier très dur. Mon agent, Laurent Grégoire, a une femme, une famille. C’est miraculeux de voir comment il a réussi à maintenir le cap.

« Mathias était psychorigide, grand bourgeois, coincé, soûlant et arrogant »

Il y a peu d’acteurs qui travaillent sans agent…

Michel Piccoli a eu un agent pendant quelques années jusqu’au moment où il en a eu marre et il a pris un avocat pour discuter de ses contrats. Aujourd’hui, c’est assez rare de ne pas avoir d’agent et c’est de plus en plus compliqué avec les droits de suite, les produits dérivés, etc. Les contrats sont de plus en plus complexes. Il faut donc s’entourer de juristes…

Quelles sont les stars de la saison 3 ?

Je suis aussi impatient de découvrir les « stars » que l’est le public. Les « guests », c’est la chasse gardée de Dominique. Même si aujourd’hui tout le monde veut venir, alors que pour la saison 1, c’était un peu compliqué [La production a essuyé quelques refus cinglants, NdlR]. Mais il y a parfois des incompatibilités de tournage de dernière minute.

Quel destin souhaitez-vous à Mathias Barneville ?

Je suis prêt à aller dans toutes les directions. Les gentils sont plus payants parce que ce sont les héros qui plaisent aux filles, mais le bad guy est plus intéressant à jouer parce qu’il a toujours des secrets. À partir de là, tout est possible dans le jeu. Dans la première saison, Mathias était psychorigide, grand bourgeois, coincé, soûlant et arrogant. Dans la saison 2, il pète les plombs, il quitte sa femme et couche avec sa secrétaire, il picole, prend du ventre et il ne sait plus comment il s’appelle. Il devient humain, plus proche de nous, en somme. La troisième saison sera peut-être celle du retour à la raison…

Ce qui me plaît ? C’est qu’il y ait le plus de comédie possible. Les gens ont attendu que mon personnage casse sa carapace, en fin de saison 1, pour venir vers moi. Et ils m’ont dit : « on croyait que vous étiez un vrai salaud ! » C’est incroyable comme les gens vous identifient à ce que vous jouez. Comme si l’habit faisait vraiment le moine. Les gens qui me croisent dans la rue m’appellent Mathias…

« Je suis fan des séries anglaises »

Le succès de la série vous a étonné ?

On espérait le succès mais ce qui est étonnant, c’est le succès international : en Angleterre et aux États-Unis, la série est diffusée en VO sous-titrée (sous le titre Call my agent) et aussi via Netflix. Cela m’a ouvert des castings américains et anglais. J’ai joué en anglais dans la série franco-anglaise The Tunnel .

Cela a changé votre regard sur les séries ?

Mon regard sur les séries a changé depuis longtemps. Avec les séries, on est dans une liberté de ton, d’écriture et de propos qu’on ne trouvait plus ailleurs dans le cinéma. HBO a montré le chemin. Pour moi, Six feet under reste un must absolu ; j’ai vu tout Downton Abbey, je suis fan de Peaky Blinders et de Black Mirror. Je suis un fan absolu. Je regarde beaucoup de séries anglaises, c’est vrai. C’est comme pour les polars : les anglais et les américains me séduisent davantage. Ma mère est irlandaise donc j’ai des affinités avec cet univers.

Quel agent auriez-vous choisi dans la série ?

J’aurais choisi Camille/Andréa. Elle a un rapport humain, esthétique et artistique que Mathias n’a pas. Lui, c’est un peu un capitaine d’industrie qui ne fait pas de sentiment. Il est un peu rude, parfois…

Entretien: Karin Tshidimba, à Monte-Carlo