Ancien journaliste devenu scénariste réputé, il s’empare des armes de la fiction pour mieux décrypter le réel et sonder les démons de la société libérale américaine, à travers de grandes fresques: The Wire, Treme, The Deuce, Generation Kill et, aujourd’hui, We Own This city.

Autoproclamé « scénariste le plus en colère de la télévision US », David Simon n’a pas sa langue en poche lorsqu’il s’agit de dénoncer les mirages de la société ultralibérale américaine. Il suffit de le suivre sur Twitter pour constater que sa réputation n’est pas juste une légende… Écrivain devenu scénariste, l’ex-journaliste du Baltimore Sun (il y a passé 12 ans) s’est basé sur sa connaissance intime du terrain pour composer ses œuvres, écrites au terme de longues périodes d’immersion, notamment avec la complicité d’Ed Burns, ancien policier reconverti.

Avec Homicide, The Corner, The Wire (2002), Treme (2010), The Deuce (2017), Show me a Hero et We own this city, il a passé au crible Baltimore, La Nouvelle-Orléans et New York, à diverses époques de l’Histoire, se promenant au milieu de personnes et de quartiers relégués, ignorés.

Ses séries exigeantes, au rythme lent et au style documentaire, charrient des intrigues complexes et d’importantes ramifications à travers les différentes strates de la société. On y suit de multiples personnages souvent interprétés par la même troupe d’acteurs et actrices d’une série à l’autre, mais aussi de nombreux acteurs non professionnels pour accentuer le réalisme. Autant de caractéristiques qui lui ont valu d’être comparé à des auteurs comme Balzac et Dickens rendant compte des faillites et défis de leur époque. En mettant en lumière les invisibles et les communautés reléguées loin du rêve américain, David Simon en dit long sur des millions de vies « désenchantées ».

Très critique et engagé, il a notamment dénoncé l’intervention des États-Unis en Irak avec sa série Generation Kill, la gestion désastreuse de l’après-Katrina en Louisiane avec Treme et les risques de l’insidieuse montée du fascisme avec son uchronie The Plot against America. Pessimiste mais résolu, David Simon croit pourtant que, quel que soit le problème, le salut ne peut venir que d’un groupe d’humains investis jusqu’au bout comme on les croise dans ses séries.

Karin Tshidimba