De nombreux scénarios ont déjà vécu le grand frisson du transfert du grand vers le petit écran. Cette semaine, c’est le tour de Dead Ringers et Fatal Attraction. Voici dix exemples d’adaptations réussies, en attendant les séries Harry Potter et Twilight

La tentation du remake est presque aussi vieille que le cinéma lui-même. De tout temps, les créateurs ont tenté de dupliquer ou d’adapter un succès d’un univers (livre, cinéma) vers un autre (théâtre, cinéma, série). Et ce, dès les débuts du petit écran. Ainsi le succès insolent de la célèbre série Mash (106 millions de fidèles lui ont dit adieu lors de son épisode final en 1983) ne doit pas faire oublier qu’elle était elle-même un produit dérivé du film de 1970 de Robert Altman, récompensé à Cannes.

Beaucoup plus près de nous, on l’oublie souvent mais Buffy, elle-même, grande maîtresse de l’univers sériel (1997) ne doit son salut qu’à un film dont la tonalité de comédie, voulue par les studios, n’avait pas plu à son créateur originel. Joss Whedon s’était alors empressé de plaider sa cause auprès de Warner Bros pour que la chaîne le laisse créer le drame fantastique adolescent dont il avait rêvé. Sept saisons et 144 épisodes plus tard, un véritable mythe était né.

L’appel du succès

Avec l’évolution de la pratique du streaming, l’appétit des studios est de plus en plus grand concernant les succès et franchises célèbres du passé.

Comment résister à l’appel d’un public nostalgique et à l’attrait d’une marque bien implantée qui ne semble pas avoir encore livré tout son potentiel ? Le remake permet à la fois de minimiser les risques, en faisant appel à un personnage ou à une histoire reconnue et appréciée du plus grand nombre, tout en revivifiant une marque qui avait peut-être tendance à un peu prendre la poussière. En choisissant de respecter l’esprit du film originel, tout en imposant leurs nouvelles intrigues et leur nouveau casting, quelques séries ont réussi à tirer leur épingle du jeu et à imposer les libertés prises avec le scénario de départ.

C’est le cas des remakes des films Rush Hour, L’Arme fatale et L’Exorciste de William Friedkin qui, sans révolutionner le genre sériel, ont su imposer leur regard et leur rythme singuliers, mais aussi des personnages plus développés et en partie redessinés. Et ce, malgré la pression de fans très impliqués et scrupuleux.

Faire un pas de côté

Le plus souvent ces adaptations en série choisissent de faire un pas de côté. Ainsi Les Chroniques de Sarah Connor, sequel de Terminator, ont modifié l’identité du grand méchant, avec un certain succès à la clé. Malgré l’interprétation réussie et les ambitions de départ, le road-trip n’a duré que deux saisons.

La série prend parfois le parti de raconter la genèse d’un grand succès cinématographique. C’est le cas de Bates Motel qui, malgré quelques étonnantes digressions au départ, est parvenu à capturer et explorer le ferment de la relation entre Norman (Freddie Highmore) et sa mère Norma (Vera Farmiga) qui fait toute la singularité du film Psychose d’Alfred Hitchcock.

La Guerre des mondes avait déjà connu plusieurs vies sur grand écran avant d’être transformée en série par Howard Overman en 2019. Déplacée du XIXe au XXIe siècle, l’intrigue internationale (entre France et Royaume-Uni) aborde des questions comme le réchauffement climatique, l’immigration ou le nationalisme.

Nouveaux visages

Pari tout aussi osé : doter le plus célèbre des tueurs en série Hannibal Lecter d’un nouveau visage, et pourtant. En s’inspirant davantage des romans originaux que du film de Jonathan Demme, Bryan Fuller a réussi à imposer un nouveau duo – le très torturé Hugh Dancy et le machiavélique Mads Mikkelsen – dans un univers baroque et coloré à souhait. Où la réalité et le songe s’entremêlent pour mieux analyser l’attrait de certains hommes pour la violence et la bonne chère.

On ne donnait pas cher de la peau des nouveaux inspecteurs de Fargo, tant le polar des neiges collait à l’ADN des frères Coen. Pourtant la série a réussi à attirer de nouveaux admirateurs et à séduire les fans de la première heure, prouvant que le matériau de départ avait encore de la ressource et que le scénariste Noah Hawley ne manquait ni d’audace ni de suite dans les idées. Dotée d’un casting quatre étoiles (Kirsten Dunst, Billy Bob Thornton, Ted Danson, Ewan McGregor) truffée de trouvailles visuelles, l’anthologie a su composer sa propre petite musique…

Histoires sans fin ?

Aujourd’hui, de plus en plus d’univers et de héros semblent pourtant surexploités et même les fans peuvent se lasser de ces histoires éternellement ressuscitées. Dernier écueil de cette tendance lourde : l’originalité même de l’apport de la série, censée permettre d’explorer en profondeur des univers et points de vue singuliers, est ainsi déniée au profit d’un pur calcul de rentabilité. Sans oublier que le risque de décevoir les fans de la première heure ne doit pas être sous-estimé.

Ainsi, tout récemment la série Le Seigneur des anneaux malgré un investissement conséquent (on évoque le chiffre de 465 millions pour la 1ère saison) et une marque mondialement reconnue n’a pas entraîné le raz-de-marée espéré par Prime Video. Ce qui ne veut pas dire que la série est ratée mais bien que même un succès impressionnant sur grand écran n’assure pas forcément un formidable retour sur investissement. Disney peut presque en dire autant au sujet de sa série Star Wars. Quant à Netflix, elle a annulé sa série Resident Evil après une unique saison (été 2022).

Une réalité à laquelle les futurs showrunners des séries Harry Potter et Twilight feraient bien de songer avant de développer leurs nouveaux projets…

Karin Tshidimba