Créée par Erwan Augoyard et Sophie Kovess-Brun, avec l’aide de Christophe Beaujean pour la bible, eLegal**, nouvelle série 100 % belge de la RTBF, plonge dans le quotidien d’un petit cabinet d’avocats bruxellois, De Facto, spécialisés dans la cybercriminalité.
À sa tête, Valentine Dhénaut (Olivia Harkay à gauche), avocate ambitieuse, a quitté le confort d’un grand cabinet à l’américaine pour se lancer à la conquête de ce nouveau Far West légal : Internet.
Dans ce secteur « où les lois sont toujours publiées avec un temps de retard », Valentine s’appuie sur son expertise juridique, les capacités de sa demi-sœur Fran Gerrits (Raphaëlle Bruneau, à droite), hackeuse repassée « du côté clair de la force », et celles de Théo Jacobs (Adrien Letartre, au centre), brillant stagiaire spécialisé en droit des nouvelles technologies. Ensemble, ils tentent de sauver leurs clients, « qu’ils soient coupables, innocents ou victimes, et parfois tout cela à la fois ».
Entièrement tournés en région bruxelloise, les dix épisodes ont été réalisés par Alain Brunard et produits par To Do Today productions; ils sont à suivre le samedi sur La Une à 20h55.
Nous avons exploré la genèse de la série avec ses deux principaux scénaristes.
Le Net et la loi
« On a eu cette idée il y a quatre ans, et l’actualité (avec la Russie et les élections américaines, notamment) a prouvé, depuis, que ces problématiques prennent des proportions toujours plus importantes. L’idée était de faire une série urbaine et contemporaine et de pouvoir traiter plein de sujets différents puisque la série propose des enquêtes bouclées (une enquête par épisode) : harcèlement sur le web, e-santé, cyber-djihadisme, e-réputation, commerce en ligne, « revenge porn », drogues de synthèse, etc. en conservant toujours le lien avec les nouvelles technologies et internet. »
« Ce sont des sujets qui sont dans l’air du temps et en même temps, il y avait une volonté de la chaîne de renouer avec l’enquête, le procédural, et de l’allier aux nouvelles technologies. En travaillant sur À tort ou à raison (série RTBF qui a connu 2 saisons, NdlR) , on s’était rendu compte qu’il y avait un vrai enjeu sociétal sur la législation autour des nouvelles technologies », expliquent Erwan Augoyard et Sophie Kovess-Brun, en charge de l’écriture de la série eLegal.
Série classique et débats dans l’air du temps
« La série reste classique dans son déroulé mais repose sur deux outsiders : Valentine, par le fait d’avoir monté son cabinet seule, et Fran qui est presque une cyborg, en fait, en raison de son implant cochléaire. Nous avions la volonté d’aborder le handicap et la société dans toute sa diversité. » La surdité, grâce aux applications dédiées, offre ainsi un champ de possibles à explorer.
« On essaie de garder une proximité et de ne pas être manichéens, poursuit le duo de scénaristes. Dans chaque épisode, il est question de personnes du quotidien prises dans un engrenage judiciaire. On s’intéresse, via des « guests » [personnages qui n’apparaissent que dans un épisode, NdlR] , à des faits de société, des vies parfois brisées. Mais on n’est pas du tout dans le jugement. »
« C’est aussi une série assez pédagogique. On n’est pas dans une fable politique façon Mr Robot. On tente d’expliquer la complexité de la machine judiciaire belge par rapport à ces nouvelles problématiques et de voir comment chacun tente de s’en sortir en l’absence d’harmonisation de la législation internationale. On traite de drames humains, avant tout. Valentine sent qu’elle arrive dans une espèce de Far West et qu’il y a un truc à jouer là. »
Des exemples ? L’épisode 6 (écrit par le jeune scénariste Julien Gras-Payen) s’attache aux pas d’Etienne, « un petit génie qui a créé une application de géolocalisation des délinquants sexuels ». Et l’épisode 7, écrit par Sarah Schenkel, aborde la problématique des cadences de travail et des contrats intérimaires dans l’e-commerce. « On aborde les dommages collatéraux et les répercussions de nouveaux outils qui échappent à tout le monde. Nous avons déterminé dix thèmes en tenant compte de la force des histoires et de la faisabilité économique. Nous les avons soumis à nos consultants [juristes et spécialistes de la cybercriminalité, NdlR] pour voir si, du côté de la loi, il y avait des choses intéressantes à exploiter. Nos sources, ce sont les faits divers et l’air du temps, qui charrient pas mal de débats. Les intrigues sont aussi le fruit de nos intuitions, nos lectures, nos recherches et nos rencontres avec les consultants. »
Écriture et réalisation, deux univers distincts
Six auteurs ont participé, en tout ou en partie, à la création de la série. Deux jeunes scénaristes, Julien Gras-Payen et Sarah Schenkel, ont écrit des épisodes entiers, seuls ou en duo (épisodes 5 à 9). « L’important avec cet atelier d’écriture était de laisser à chacun sa liberté d’expression » soulignent les deux scénaristes « seniors ». Le travail d’écriture s’est étalé sur dix-huit mois au total.
Une fois le dernier texte validé, le flambeau a été transmis au réalisateur Alain Brunard, seul en charge des dix épisodes. Contrairement à ce qui s’est passé et se passe encore sur les saisons 2 de La Trêve ou Ennemi public – séries portées par des auteurs-réalisateurs -, il n’y a plus d’intervention des scénaristes durant le tournage.
Entretiens: Karin Tshidimba
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