Malgré les minijupes, les imprimés léopard et les ongles XXL, Morgan Gillory n’est pas Morgane Alvaro. L’adaptation américaine est bien plus sage que son modèle français: elle garde les capacités intellectuelles mais gomme les outrances d’Audrey Fleurot. Résultat à évaluer sur Disney+ dès ce jeudi
D’un simple coup d’oeil, Morgane Alvaro peut repérer les erreurs et détails qui clochent dans un dossier éparpillé devant ses yeux. Cette capacité d’observation et cette force de déduction hors normes, elle les doit à son impressionnante mémoire visuelle et à son cerveau fonctionnant de façon très particulière. Un Haut potentiel intellectuel (HPI) que ne tardent pas à repérer les policiers du commissariat de Lille dans lequel cette femme de ménage atypique, par ailleurs mère célibataire de trois enfants, travaille la nuit. Cette introduction de personnage, découverte en avril 2021 sur TF1, grâce au bagout et au dynamisme détonant d’Audrey Fleurot se retrouve presque trait pour trait dans la série High Potential développée aux Etats-Unis par Disney.
Les fans d’HPI pourront aisément jouer au bingo et relever les nombreuses similarités entre la série originale et son adaptation américaine. Pas sûr qu’il soit possible d’établir une liste de plus 7 différences entre le déroulement des deux intrigues. Tenues, coiffure, allure,… Le souci de coller au modèle est poussé jusque dans les moindres détails : le détective Adam Karadec (Daniel Sunjata) présentant même une ressemblance physique indéniable – d’allure, pas de carnation – avec son homonyme français, Mehdi Nebbou.
Gommer les aspérités du personnage
Du côté de Morgane en revanche, les points de divergence sont légion et ne portent pas que sur le physique. Si Morgan Gillory (Kaitlin Olson, vue dans les séries It’s Always Sunny in Philadelphia et Hacks, notamment) arbore bien minijupe, ongles démesurés et longues bottes, elle n’affiche, en revanche, ni décolleté ravageur, ni maquillage outrancier, ni chevelure rousse « flamboyante ». La consultante américaine n’est pas seulement (un peu) plus sobre, elle est est aussi bien plus posée que la bimbo du Nord de la France, volontiers ingérable et casse-pieds. Des traits de caractère qui font tout le sel de la création de Stéphane Carrié et Alice Chegaray-Breugnot pour TF1.
La tonalité générale de la série, en huit épisodes, écrite par Drew Goddard (The Good Place) est beaucoup plus proche de l’enquête policière « classique » que de la comédie, tendance choc des contraires, que propose son modèle. Une grande partie de la saveur de la série française repose sur l’affrontement entre une Morgane Alvaro, volontiers excessive et brute de décoffrage, assurément sans complexe et givrée et un Adam Karadec placide et rigoureux.
La vie privée de la consultante prend davantage de place dans l’intrigue et influe nettement plus sur le déroulement des enquêtes policières en cours. Face à elle, Karadec, campé par un formidable Mehdi Nebbou, tente de cadrer le mieux possible l’indisciplinée aux brillantes facultés mentales, de freiner ses excès de langage et son comportement outrancier, afin de ne pas nuire à la résolution des affaires. Le résultat façonne un personnage nettement plus déjanté que celui mis en lumière par sa collègue US.
Lancé en septembre dernier sur ABC, le premier épisode d’High Potential a attiré 11,5 millions de curieux en tout, sur antenne et via le streaming de Disney. Deux épisodes d’High Potential seront disponibles sur Disney+ dès le 23 janvier. La suite de la série sera proposée, ensuite, au rythme d’un épisode par semaine.
Grace à Morgane, HPI tutoie les sommets
Les succès d’audience d’HPI en France ont attiré sur elle les regards de nombreux producteurs. En 2021, la saison 1 attirait 10 millions de fans en moyenne, ce qui n’était plus arrivé à une série française depuis 2010. Démarrée devant près de 10 millions de fans, la saison 4 s’est achevée en octobre dernier, entraînant 6 millions de fidèles en moyenne (soit 31 % de parts de marché) dans son sillage. Un très joli score pour une série hexagonale qui confirme l’attractivité exceptionnelle de Morgane Alvaro. Pas sûr qu’en rabotant les aspérités et excentricités de la série originelle, et de ses personnages, High Potential parviendra à attirer un public aussi fidèle sur la longueur.
Audrey Fleurot, principale héroïne d’HPI, s’est en tout cas déclarée “extrêmement déçue” de ne pas voir la série, déjà vendue dans 105 pays, être diffusée telle quelle sur les antennes américaines. Comme l’avait été le thriller Engrenages avant elle, avec sous-titres à la clé. Il faut dire que les fictions diffusées en VO sous-titrée restent largement marginales aux Etats-Unis. Comme c’est le cas d’ailleurs dans de nombreux pays européens. Le succès d’autres séries françaises, telles Dix pour cent et Le Bureau des légendes, parviendra peut-être un jour à inverser la tendance.
Karin Tshidimba
★★ High Potential Elémentaire, mon cher Karadec Création Drew Goddard, d’après la série française “HPI” Réalisation Alethea Jones, Rebecca Asher Avec Kaitlin Olson, Daniel Sunjata, Javicia Leslie, Judy Reyes Sur Disney+ Le 23/01 (8 x 52’).
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