La collection documentaire signée Charlotte Blum revient pour une troisième saison entièrement consacrée aux parcours de six réalisatrices de talent qui ont façonné des séries mondialement reconnues de Game of Thrones à The Walking Dead, en passant par Breaking Bad et Euphoria. A voir ce vendredi sur Be Séries, à 20h

Dans l’univers de la série où le showrunner et le scénariste sont rois, on pourrait croire, à tort, que les réalisateurs sont réduits aux rôles de simples exécutants. « Mais pour tirer la meilleure part d’une collaboration, on doit laisser chacun s’investir artistiquement, être véritablement impliqué. Michelle m’a appris la puissance des silhouettes », souligne Vince Gilligan, scénariste et créateur de Breaking Bad et de Better Call Saul. L’homme reconnaît avoir « volé » à la réalisatrice Michelle MacLaren certains de ses plans zénithaux lorsqu’il est lui-même passé derrière la caméra pour boucler le parcours de Jimmy McGill aka Saul Goodman, campé par le comédien Bob Odenkirk.

Après deux saisons où elles constituaient clairement l’exception qui confirme la règle, le focus de The Art of Television*** est mis cette fois sur le parcours de six réalisatrices qui s’imposent dans toute leur complexité et leur diversité. Lancée en 2017, la collection de documentaires produits par OCS aborde sa troisième saison avec ce nouveau volet 100 % féminin qui balaie le large spectre de la création sérielle actuelle : de Breaking Bad à Occupied, d’Euphoria à The Night Manager, en passant par Game of Thrones et The Rings of Power.

Ce faisant, la collection aborde aussi la question de la place des femmes dans cet univers encore très masculin. Largement minoritaires dans l’industrie cinématographique (7%), elles le sont presque tout autant dans la création pour le petit écran. En 2022, seul un quart des séries a été réalisé par des femmes. Un chemin de Damas, entre doutes et quête de légitimité, fatigue et réactivité qui a forgé leur caractère et imprimé leurs images.

Storyboards, bibles et croquis

La beauté de The Art of television naît du fait que la collection met en lumière les qualités humaines qui font de ces six personnes des cinéastes à part, dont les réalisations ont réussi à toucher le public à travers le monde entier. Deux d’entre elles – Helen Hunt et Jennifer Morrison, devenue réalisatrice autodidacte – sont d’anciennes actrices, la première continuant d’ailleurs à jouer. D’autres, telles Marti Noxon et Michelle MacLaren, sont passées par la production ou le travail de scénariste auparavant. Quant à Susanne Bier et Charlotte Brändström, elles prouvent que tous les chemins, y compris celui de l’architecture et du cinéma, peuvent mener à la série aujourd’hui.

Ces six personnalités, la journaliste Charlotte Blum les rend à la fois proches, limpides et éclairantes, que ce soit pour le public qui aime leurs séries mais aussi pour ceux qui regardent ces documentaires avec un œil plus professionnel, cherchant à percer le mystère de la création ou à en faire une source d’inspiration.
Comme lors des précédentes saisons, chacune ouvre à la caméra une partie de ses archives personnelles : scénarios, storyboards, bibles, croquis… afin que l’on puisse percevoir comment naît véritablement la magie sur l’écran.

Influences majeures et itinéraires sinueux

Ce nouveau volet documentaire rappelle que réaliser, c’est trouver comment oser, comment créer et prendre des risques pour raconter l’histoire de façon à la fois belle et pertinente. Mais aussi qu’une histoire peut être racontée d’une infinité de manières différentes et que chaque série doit trouver sa voie ou plutôt sa propre voix. Toute la difficulté, pour le réalisateur, étant de trouver comment imprimer ses idées et son style visuel tout en respectant l’esprit de l’œuvre originelle et ses codes…

Direction des actrices et des acteurs, choix du cadre, du type de plans, science du montage, anecdotes de tournage, influences et obsessions sont au coeur de la conversation. Des rencontres qui dévoilent aussi à quel point les choix posés par chacune d’elles entrent en résonance avec leur personnalité et leur parcours humain.

Karin Tshidimba