Même si les tonalités diffèrent et les personnages surprennent, de nombreuses séries présentées au Festival Séries Mania sont directement inspirées du réel et des préoccupations qui le parsèment. L’occasion de découvrir la façon dont chaque pays sonde le passé ou imagine l’avenir… La preuve avec We own this city, Oussekine, Sunshine Eyes ou Turbia…
L’un des plaisirs des festivals est de pouvoir dénicher de nouvelles pépites avant tout le monde, de défricher de nouveaux territoires : Argentine, Chine et Colombie rejoignent les convives habituels de Séries Mania : Allemagne, Australie, Canada, Danemark, États-Unis, France, Grande-Bretagne, Israël, Italie…
Sur 331 séries reçues en provenance de 46 pays (6 continents), 58 ont été sélectionnées, venues de 21 pays (5 continents). Un menu roboratif qui, rappelons-le, reste gratuit et accessible à trente minutes en train de Bruxelles… Ajoutez à cela, les rencontres et séances de dédicaces, les invités et master class et l’attractivité des Hauts-de-France en sort encore renforcée… Il faut dire que les comédiennes Cécile de France et Shira Haas (Unorthodox), le réalisateur Berkun Oya (Ethos), l’acteur Christian Berkel (Furia) et la chanteuse Yseult ont été rejoints pas la productrice ukrainienne Julia Sinkevych, ce qui place le jury de la Compétition internationale au coeur de l’actualité.
La présidente ukrainienne lance un « appel au monde culturel »
Productrice ukrainienne, Julia Sinkevych (photo) endosse son rôle de présidente du jury lillois avec beaucoup de sérieux et d’engagement. L’occasion pour l’ex-déléguée générale de l’Odessa International Film Festival “d’appeler le monde de la culture à agir”. Avant même son arrivée en France, elle se félicite de cette opportunité d’attirer l’attention sur son pays “et ses réalisateurs”. “Nous faisons partie du monde du cinéma et des séries. Nous sommes un pays progressiste et européen”, a-t-elle souligné.
“En proposant cette présidence à Julia Sinkevych, nous souhaitons témoigner du rôle des festivals dans un monde en crise”, ont indiqué les organisateurs de Séries Mania. “Nous avons toujours dit que les séries étaient le miroir d’une époque et résonnaient à travers leurs histoires, leurs personnages […]. C’est pourquoi il nous paraît indispensable aujourd’hui de tourner notre regard vers la situation dramatique qui secoue l’Ukraine et le monde entier.”
Une fiction toujours plus ancrée dans la réalité
Les sujets politiques ne manquent pas dans cette édition 2022: le désastre écologique avec Turbia (Colombie), l’intégration des immigrés avec Outlaw (Danemark), le travail des modérateurs de contenus sur Internet avec Je ne suis pas un robot (Québec). La pandémie s’immisce sur les écrans avec la saison 2 d’En Thérapie, la série américaine Station Eleven (photo) sur une poignée de survivants, et l’allemande Sunshine Eyes sur le confinement.
Même plongée sociétale avec We Own this City (photo en tête), de David Simon (The Wire), Oussekine, sur le décès tragique de Malik Oussekine, victime de violences policières, et Sentinelles d’OCSTV sur la force militaire française Barkhane. “Soulignons le tournant enfin réalisé par la fiction française pour plus de diversité et pour s’intéresser à notre société et à notre histoire. On avance !” a twitté Laurence Herszberg, la directrice de Séries Mania.
La face B de la France
Même la fiction française sort des beaux quartiers et de la classe moyenne ou aisée pour sonder de nouvelles sphères et se confronter à son histoire récente. Ce sera le cas de deux nouveautés présentées à Lille.
Le Monde de demain confirme la nouvelle passion des séries francophones pour l’univers du rap (Validé, Fils de). Katell Quillévéré et Hélier Cisterne s’emparent de ce tournant des années 80 qui a vu l’émergence du hip-hop et la formation du groupe NTM. Retour sur un parcours hors norme, de la fascination adolescente à la fondation du groupe de rap légendaire. Une production Arte/Netflix portée par Anthony Bajon et Melvin Boomer.
Le 25 mars, la soirée de clôture prendra une tonalité plus sombre avec la série Oussekine (photo) d’Antoine Chevrollier, sur le tragique fait divers qui a marqué les esprits en 1986. Produite par Disney, la série en quatre épisodes se penche sur la tragédie qui a coûté la vie au jeune Malik, le 6 décembre 1986. L’histoire de cette bavure policière avait secoué la société française. Le comédien Sayyid El Alami endosse le rôle du jeune étudiant de 22 ans, Kad Merad campe l’avocat de la famille Oussekine et Olivier Gourmet sera Robert Pandraud, ancien ministre à la Sécurité. Les parents du jeune homme sont joués par Hiam Abbass (Succession) et Slimane Dazi (Le Bureau des légendes). Mathieu Demi, Laurent Stocker, Thierry Godard et Gilles Cohen complètent la distribution.
Une petite touche d’humour
Quelques touches plus légères égaient toutefois le programme. A commencer par Drôle, la nouvelle comédie produite par Netflix de la talentueuse Fanny Herrero (Dix pour cent), qui ouvre le bal ce vendredi 18 mars avec sa plongée dans les coulisses du stand-up parisien. Une belle mise en bouche avant la Nuit des comédies prévue le samedi 19.
La 4e édition (lilloise) de Séries Mania, toujours entièrement gratuite, se déroule du vendredi 18 au vendredi 25 mars, mais aussi en ligne. «Cette année encore, on pourra regarder les séries, suivre les rencontres, poser des questions aux talents, même à distance, via la plateforme Series Mania» rappelle l’équipe du Festival.
Karin Tshidimba
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