Dix ans après la fin de sa première diffusion, entamée en 1999, The West Wing*** (A la Maison Blanche) est toujours considérée comme l’une des meilleures séries politiques à travers le monde.
Au-delà de la peinture ultra réaliste de l’exercice du pouvoir, elle a bâti sa réputation d’excellence sur la conjonction de différents ingrédients : une vision claire des enjeux internationaux et du bien commun, des personnages impliqués et attachants, une virtuosité verbale qui a fait date dans l’histoire des séries (le fameux walk & talk, NdlR), et une haute conception de ses téléspectateurs.
Les récents affrontements entre Hillary Clinton et Donald Trump ont réactivé la nostalgie de la série portée par Martin Sheen (au centre) à laquelle divers observateurs n’ont pas hésité à faire référence, en déplorant l’indigence des débats et des objectifs visés par le milliardaire républicain.
Alors que ce dernier s’approche du Bureau ovale, Carole Desbarats, professeure de cinéma, ravive nos mémoires et en appelle à nos souvenirs. Elle a consacré à la création d’Aaron Sorkin, un ouvrage riche en anecdotes politiques et en analyses cinématographiques, qui prouve que cette série partageait d’abord le goût du défi avec son auditoire.
Ambitieuse dans son propos, The West Wing l’était aussi dans ses visées et son décryptage du système politique américain. Surtout, elle pariait sur l’intelligence de son public qui, malgré une méconnaissance ou quelques lacunes au départ, finissait par trouver son chemin dans ce dédale de mesures et de règlementations parfois obscures.
Certains lui ont reproché son côté idéaliste mais The West Wing a aussi démontré que quelles que soient les convictions humanistes de son locataire, le Bureau ovale accouchait bien souvent de souris légales. Même pavé de bonnes intentions, l’itinéraire du président Josiah Bartlett – inspiré de nombreux faits réels de politique contemporaine – ne menait que très rarement à la gloire. Et pourtant, l’attachement du public à ce président foncièrement démocrate ne s’est jamais démenti. Comme on le constate encore aujourd’hui.
Engouement populaire, admiration des politiques
Pour une fois, l’engouement populaire et l’avis des critiques se sont même rejoints puisque The West Wing a glané au fil de ses 7 saisons plus de 50 Emmy Awards et autres récompenses télévisuelles, dont plus d’une vingtaine pour sa seule première année de diffusion.
Sept ans plus tard, quelque dix millions d’Américains ont suivi le 155e et dernier épisode de la série diffusée sur la chaîne NBC. C’est dire si son créateur Aaron Sorkin jouit encore aujourd’hui d’un statut particulier dans la galaxie télévisuelle américaine.
Servie par une facture remarquable, la série d’Aaron Sorkin fascine : « le suspense émanant des questions politiques, traitées avec glamour, élégance, humour, complexité, compétence, gravité et idéalisme séduit le plus souvent » écrit à son propos Carole Desbarats, dans son livre paru aux éditions PUF.
Et «même si, parfois, cette vision optimiste du monde politique agace», on ne compte plus les politiques et autres «grands de ce monde» qui lui vouent une véritable admiration : Steve Jobs, les époux Clinton, les français Aurélie Filipetti et Nicolas Sarkozy ou le britannique Ed Miliband, poursuit l’auteure.
Proposant une plongée dans la genèse et les rouages de la série en même temps qu’une exploration du parcours de son créateur, Carole Desbarats livre les clés de sa fascination pour ce thriller politique, éclairant du même coup celle de nombre de ses contemporains.
Séries, les nouveaux territoires des Presses universitaires
Objets d’étude et d’analyse jusqu’au sein des universités, les séries ont donné naissance à une littérature dont la vitalité ne cesse de se confirmer. Les Presses universitaires de France leur consacrent depuis 2012, une collection spécifique. Dirigée par Jean-Baptiste Jeangène Vilmer et Tristan Garcia, elle s’attache à analyser les séries en tant qu’objets culturels et a pour objectif de comprendre les raisons de leur prospérité et d’en apporter des clés de lecture.
Les séries Lost, Six Feet under, 24 heures chrono, Sons of anarchy, Le Prisonnier, Cold Case, In Treatment, Oz et The Wire, notamment, y ont déjà suscité d’éclairantes analyses. L’ouvrage consacré à The West Wing est le dernier rejeton de la collection.
KT
>> The West Wing, au coeur du pouvoir, PUF, 189 pp., environ 13 €
J’ai adoré cette série !