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En en 4 épisodes, la mini-série « Mr Bates contre le Post Office » retrace l’histoire vraie de ce David gallois opposé au Goliath londonien. Une fiction qui a permis de relancer son combat judiciaire, vieux de 20 ans, devant les tribunaux… A voir sur Arte et Auvio

Vingt ans. 555 plaignants, des milliers de pages de dossiers et des centaines d’accusations mensongères visant des responsables de bureaux de poste britanniques soupçonnés d’avoir pris de l’argent dans la caisse. Résultats de cette sombre affaire ? Au moins quatre suicides avérés et des centaines de familles jetées dans l’opprobre et la précarité.

L’affaire du Post Office est celle d’un scandale sans précédent qui a éclaté en 2003 mais s’est poursuivie jusque très récemment. Le grand public n’a d’ailleurs pris conscience de son ampleur que lors de la diffusion de la série sur l’antenne d’ITV. L’histoire est vraie tristement vraie même si pour les besoins de la fiction quelques noms ont été modifiés.

« Mr Bates contre le Post Office »: une série inspirée de faits réels qui a défrayé la chronique en Grande-Bretagne.

Des employés condamnés sans preuve

À l’écran, le combat est porté par le formidable comédien Toby Jones, (vu notamment dans Harry Potter et la chambre des secrets). Il campe Alan Bates, modeste gérant d’un bureau de poste-mercerie au Pays de Galles, devenu, bien malgré lui, le fer de lance de la révolte des postiers britanniques. Après avoir été accusé, à tort, de détournement de fonds, il va découvrir qu’il n’est pas le seul à avoir rencontré des sérieuses difficultés avec le nouveau logiciel de comptabilité Horizon, mis en place par la Direction générale de la Poste britannique.

En réalité, plus de 700 autres postmasters ont constaté, durant plusieurs mois que des milliers de livres sterling s’évaporaient mystérieusement de leur bilan comptable informatisé. Malgré leurs protestations et leurs demandes répétées de voir ce bug informatique corrigé, ils ont été accusés publiquement de détournements de fonds et de mauvaise gestion et intimés l’ordre de rembourser les sommes manquantes. La direction générale ne les a jamais écoutés, sûre de la totale fiabilité de ce logiciel acheté à prix d’or à une firme japonaise. Condamnés sans preuve, sur base de chiffres erronés, certains ont purgé des peines de prison et tous ont vu leur nom et leur réputation ruinés. Beaucoup ont quitté leur village, leur région, forcés de vendre leur maison pour rembourser les sommes exigées et ne supportant plus le regard de reproche de certains voisins ou d’anciens clients.

Persuadé qu’il n’est pas le seul à avoir été dénigré et floué, déterminé à prouver son innocence et à obtenir réparation, Alan Bates se met en quête d’autres postiers ayant vécu la même mésaventure. Des hommes et des femmes simples qui pensaient qu’il leur suffirait de montrer leurs tickets de caisse pour prouver leur bonne foi. La série en quatre épisodes retrace leur long combat judiciaire semblable un interminable chemin de croix.

Un combat judiciaire toujours en cours

La diffusion de la série sur la chaîne ITV en janvier 2024 a créé une énorme vague d’indignation et de soutien à travers tout le pays et relancé cette affaire enlisée après vingt ans de combat. Le verdict et les compensations financières, pour les postiers injustement accusés, devraient être connus prochainement.

Dans cette relecture à peine romancée d’une affaire qui a défrayé la chronique en Grande-Bretagne, la scénariste Gwyneth Hughes (Vanity Fair, Tom Jones) et le réalisateur James Strong font preuve d’une grande sensibilité pour dépeindre ces vies ordinaires percutées de plein fouet par la bureaucratie aveugle et l’absence d’humanité d’une certaine « élite » managériale refusant toute remise en question. Une forme de mépris des faibles trop souvent répandue.

De nombreux comédiens britanniques de premier plan (Monica Dollan, Will Mellor, Alex Jennings, Lesley Nicol) se sont mis au service de ce récit touchant d’un combat sans fin du pot de terre contre le pot de fer. Une affaire qui illustre aussi les risques que fait courir une confiance aveugle dans la technologie.

Karin Tshidimba

***Mr Bates contre le Post OfficeChronique judiciaireCréation Gwyneth Hughes Réalisation James Strong Avec Toby Jones, Will Mellor, Alex Jennings, Lesley Nicol,… Sur Arte.tv et Auvio 4 x 52’