L’annonce de la prochaine diffusion de la mini-série produite par Netflix a suscité la colère de la famille de l’homme d’affaires français. À tort ou à raison ?

La série ouvre sur l’arrivée de Bernard Tapie en prison alors que des dizaines de détenus crient son nom en signe de défiance ou, au contraire, d’admiration. Maigre consolation et, en même temps, triste épilogue pour un homme qui, toute sa vie durant, a voulu que son talent et son esprit créatif soient reconnus et que son nom s’imprime en grand dans le monde de l’entreprise et sur les murs de la cité.
Dans la mini-série produite par Netflix, c’est Laurent Lafitte, pensionnaire de la Comédie française, qui endosse le costume de l’ancien homme politique et président de l’Olympique de Marseille (OM), décédé en octobre 2021 des suites d’un cancer. Les premiers épisodes permettent de découvrir son environnement, sa famille, ses amis et, surtout, ses rêves d’ascension sociale déjà bien présents.

Une série dont Bernard Tapie ne voulait pas

Si la série est très attendue par ses admirateurs et a suscité une certaine effervescence dimanche soir sur la Croisette, elle a aussi déjà fait couler beaucoup d’encre en raison du refus de la famille et des ayants droit de Tapie de donner leur accord au projet de Netflix. Sa femme Dominique, sa fille Sophie et son petit-fils Rodolphe, notamment, ont exprimé leur dépit sur les réseaux sociaux.

La description de Bernard Tapie en tant que
businessman, homme politique, arnaqueur, patron de l’Olympique de Marseille, chanteur…” dans le trailer mis en ligne par la plateforme internationale, notamment, a provoqué la colère de ses proches et l’appel au boycott par de nombreux fidèles de l’OM. Un agacement d’autant plus grand que, de son vivant, Bernard Tapie avait refusé le projet proposé par Netflix, arguant que “seul son fils Laurent était à même de raconter” son histoire.
Les deux créateurs, Tristan Séguéla et Olivier Demangel, se défendent de tout irrespect vis-à-vis de l’homme et de sa famille. Ce sera un biopic sur l’homme, plus libre qu’un biopic des faits, avec une part de subjectivité très forte. C’est notre regard sur sa trajectoire. Dès que l’idée est venue, je l’en ai informé parce que je trouvais ça bien de le faire. Mais on n’a pas cherché à avoir son aval ou son avis”, a expliqué, dans la presse française, le scénariste Olivier Demangel, qui a notamment œuvré sur la série politique française Baron Noir.

Une série librement inspirée de faits réels


À en juger par les deux premiers épisodes, de facture plutôt classique, présentés en compétition dimanche soir dans le cadre du Festival CanneSeries, l’image qui est donnée de l’homme d’affaires est pourtant loin d’être négative et pourrait même lui apporter la sympathie de nombreux téléspectateurs. Les premiers épisodes, ancrés à la fin des années 60, livrent l’image d’un jeune homme jamais en panne d’idée, roublard mais sympathique, doté d’un bagout et d’une énergie impressionnante. Un esprit audacieux, à l’importante soif de réussir et d’entreprendre, qui pense que la chance se provoque et que
les règles sont là pour être contournées”. Quitte à flirter avec les limites de la légalité.
Fils d’un plombier-chauffagiste et d’une femme au foyer, le jeune Bernard affirme très tôt ses ambitions que ce soit dans l’univers de la chanson ou dans le monde des affaires, avec une capacité à imaginer des “business plans” complexes et audacieux. Une ambition que sa première femme Michèle, campée par Ophelia Kolb, aura parfois du mal à suivre. Dans les deux premiers épisodes, on découvre aussi celle qui deviendra sa deuxième épouse, la jeune Dominique, rôle endossé par Joséphine Japy.
Les deux comédiens ont monté les marches du Palais des festivals, dimanche soir à Cannes, où la série a été présentée en compétition devant une salle comble et plutôt impatiente.
“Je suis un prolétaire et alors ?”, clame Bernard Tapie face à ceux qui doutent de son talent et de ses ambitions. Cette fiction française, réalisée par Tristan Séguéla (16 ans ou presque), présente un “modèle d’homme” qui tente à toute force d’échapper à son milieu d’origine et dont le parcours d’ambitieux et de flambeur pourrait encore éblouir une partie du public (jeune) aujourd’hui. Malgré, ou à cause de, ses nombreuses zones d’ombre.
Déclinée en sept épisodes, la mini-série, baptisée Wonderman à l’international, sera diffusée à partir du 13 septembre sur Netflix.
Karin Tshidimba, à Cannes