Le créateur signe une lettre d’amour à Hollywood, dans les années 40, et imagine ce que l’industrie aurait pu (ou pourrait devenir) si elle avait décidé de lutter pour plus d’inclusivité et de diversité à l’écran. A voir sur Netflix
Si elle faisait déjà rêver dans les années 40, la Mecque du cinéma était loin de se révéler un paradis pour ceux qui s’y étaient établis. Humiliations, sexisme, contrats coercitifs, misogynie, racisme et homophobie y étaient le lot quotidien de tous les apprentis, qu’ils souhaitent faire carrière devant ou derrière la caméra. En revisitant l’âge d’or de l’industrie cinématographique, Ryan Murphy (American Crime Story, Pose) et son complice Ian Brennan (The Politician) imaginent ce que ce temple de l’image animée aurait pu devenir si courage et inclusivité y avaient été cultivés, au lieu de privilégier l’entre-soi, l’abus de pouvoir, les stéréotypes et les passe-droit. Le résultat est une mini-série en sept épisodes mise en ligne le 1er mai par Netflix qui charrie un parfum mêlé de soufre et de bleuet.
Une industrie sans pitié
Pourquoi le soufre ? La série Hollywood** retrace, notamment, l’histoire vraie de Peg Entwistle, actrice britannique qui s’est suicidée en 1932, en sautant du haut du « H » du panneau Hollywood, accroché sur les hauteurs du mont Lee, surplombant Los Angeles. Un destin tragique qui illustre à quel point l’industrie pouvait se révéler cruelle avec les rêves de nombreux jeunes artistes.
Touché par cette destinée, un scénariste débutant (Jeremy Pope) rêve de l’adapter sur grand écran, mais ce souhait est d’autant plus difficile à réaliser pour ce jeune Afro-Américain gay. Au fil de ses rencontres avec différents aspirants acteurs et un jeune réalisateur (Darren Criss), Archie Coleman se met pourtant à croire que les portes d’Hollywood pourraient finir par s’ouvrir devant lui.
C’est à ce moment-là que s’élève le parfum de bleuet. Cette mini-série est une uchronie : partant de faits historiques, elle imagine un futur différencié. Que serait-il arrivé si Ace Studios (dont le siège ressemble à s’y méprendre à celui de la Paramount) avait été dirigé par une équipe courageuse et progressiste ? Réécrivant l’histoire de cet âge d’or, les deux créateurs adressent une lettre d’amour à Hollywood devenu l’épicentre de la lutte pour plus de diversité, d’égalité, d’inclusivité.
Une époque parfaitement reconstituée
Certains regretteront les excès de ce récit qui colle pourtant à son sujet jusque dans les moindres détails formels : costumes, décors, ambiance, sentiments exacerbés et rebondissements à volonté. Voilà une série qui charrie une tonne de paillettes dans son sillage, magnifiant le cinéma de l’après-guerre auquel elle tend un miroir déformant. Pour le meilleur, sur le plan sociétal, s’entend.
Qu’on ne s’y trompe pas. Si le script d’Hollywood est pavé de noms illustres – Georges Cukor, Vivien Leigh, Rock Hudson, Tallulah Bankhead, Hattie McDaniel, Eleanor Roosevelt – le scénario prend quelques libertés avec ces destinées individuelles pour mieux embrasser son propos humaniste*.
Attention, la bande-annonce ci-dessous dévoile les grandes lignes de l’intrigue.
Aux côtés des fidèles de l’équipe Ryan Murphy – Darren Criss (Glee) et Jim Parsons (The Big Bang Theory) – on croise les formidables Patti Lupone et Holland Taylor, en femmes de coeur et de tête et l’impeccable Jeremy Pope. Malgré quelques excès ou cabotinages (conformes à l’époque ?), le casting – David Corenswet, Laura Harrier, Dylan McDermott – est à la hauteur des attentes, offrant une belle composition à l’unisson et un moment d’évasion à l’esthétique enveloppante.
Karin Tshidimba
*La série est librement inspirée des mémoires de Scotty Bowers qui évoquait dans son ouvrage, avec moult détails piquants, la station-service devenue lieu de rencontres averties, dévoilée dans le premier épisode de la mini-série : Full Service: My Adventures in Hollywood and the Secret Sex Lives of the Stars. La série mêle ensuite habilement faits vérifiés, destins réels et utopie.
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