Bauhaus: la série historique marque le centenaire de la célèbre école artistique allemande, la plus importante du XXe siècle. Six épisodes à suivre deux jeudi soirs  d’affilée sur Arte, à 20h55

Weimar 1919, la jeune Dorte Helm (Anna Maria Mühe) découvre avec enthousiasme l’aventure artistique du Bauhaus**, fondé par Walter Gropius. L’architecte prône un concept de « communauté forte et de regroupement de tous les arts de la construction ». Un projet qui confère au lieu des allures de ruche cosmopolite, propice aux expérimentations en tous genres, encourageant la liberté créative parfois jusqu’à l’excès. Les étudiants y développent un esprit débridé et foncièrement novateur qui marque la genèse de l’école aujourd’hui mondialement reconnue pour le constructivisme ou le design en série.
« Une communauté forte repose sur des individus forts qui développent des idées personnelles et pas les idées de leurs professeurs » scande intraitable le codirecteur Johannes Itten.

Luttes politiques et rébellion artistique

La série, diffusée deux jeudi d’affilée, entre dans les coulisses du fameux mouvement qui a révolutionné la peinture, le design et l’architecture au lendemain de la Première Guerre mondiale. Au fil de ses 6 épisodes, elle met en avant le personnage d’une jeune peintre ayant réellement existé.
S’insurgeant contre une vision conservatrice de l’art, le Bauhaus a été lui-même au cœur d’une rébellion interne, une fronde menée par les étudiantes contre la domination masculine et la place insignifiante que leur réservaient les ateliers de Weimar. Dorte alias Dorothea Helm va en effet tout faire pour changer les mentalités et obliger les maîtres à réévaluer la place des femmes dans l’enseignement, comme l’avait initialement annoncé Walter Gropius (campé par l’acteur August Diehl) au moment de la création de l’école.

Défini comme apolitique par son créateur, le Bauhaus s’est aussi retrouvé pris en tenaille – en même temps que son staff et ses étudiants – lorsque le destin politique de l’Allemagne a basculé à la suite du putsch militaire de Kapp. Une période qui a réveillé « une Allemagne embourgeoisée ayant peur des Juifs cosmopolites et des femmes déterminées, des esprits libres et avides de connaissance » tels que cultivés par le mouvement artistique.

Sur fond de tensions avec les communistes et d’émergence de divers mouvements politiques, la série s’intéresse, au travers d’une galerie de personnages, à la lutte contre le patriarcat et le sexisme ordinaire que voulait aussi endosser cet enseignement. Les coups de force de Dorte pour offrir une vraie place aux femmes au sein de l’école vont entraîner des jalousies parmi les étudiants et des soupçons de liaisons avec le directeur Walter Gropius.

Une bande-son primée à CanneSéries

Alternant, dans son récit, séquences tournées caméra à l’épaule et clichés en noir et blanc façon archives, la réalisation cherche à traduire la vitalité et l’anticonformisme qui ont guidé les premières années de ce mouvement auquel ont contribué de grands artistes comme Paul Klee, Oskar Schlemmer et Vassily Kandinsky.

Lars Kraume, scénariste et réalisateur primé de Fritz Bauer, un héros allemand, signe une série historique et romanesque retraçant les fondements du mouvement artistique révolutionnaire, à l’occasion de son centième anniversaire. Imaginant une bande son originale, mariant jazz d’époque et électro, Bauhaus a remporté le prix de la meilleure musique au festival CanneSéries 2019.

Karin Tshidimba