Une nouvelle venue a fait son apparition à l’été 2015 aux côtés d’Ariane Meertens, déjà en charge du développement des séries belges à la RTBF.
Scénariste française, Séverine Jacquet avait, dès 2014, accepté une mission de suivi et de conseil éditorial sur les projets en cours de développement.
Depuis cet été, elle est devenue la responsable de l’Unité Fiction. Un choix qui, dans le chef de la RTBF, s’explique par un CV élogieux (formation à Paris, stage aux Etats-Unis; assistanat aux programmes chez Arte, réalisation de documentaires mais aussi postes de scénariste, de directrice littéraire et de directrice de collection). Et par l’absence de candidats au parcours équivalent, pour le moment, sur notre territoire.
Avant tout terre de documentaires et de longs métrages (cinéma), la Belgique francophone n’en est qu’aux balbutiements en matière de séries. Depuis la mise sur pied du Fonds des séries belges en partenariat avec la Fédération Wallonie-Bruxelles, les couloirs ertébéens ont donc vu défiler bon nombre de consultant(e)s français(es) et suisses afin de faire éclore ce « printemps de la création » en séries voulu par Fadila Laanan (à l’époque) et François Tron, patron des chaînes RTBF.
Reste à savoir ce qui a pu attirer une scénariste reconnue (Peps, Les malgré-elles, Un village français, Famille d’accueil) en nos contrées…
« J’ai postulé au poste de responsable de la Fiction car je suivais déjà 5 séries en interne pour la RTBF (cf. ci-contre) et que je voulais être certaine que le développement artistique serait protégé jusqu’au bout. Quand j’ai postulé, les scénarios de La Trêve étaient déjà finis. J’ai donc vraiment commencé avec le suivi artistique d’‘Ennemi public’. »
Les projets belges ne sont pas formatés
« Ce qui m’a séduite c’est d’être face à un vivier créatif belge francophone surtout nourri de séries anglo-saxonnes et scandinaves, donc déjà très ambitieux et d’une certaine manière ‘formé’ à un certain type d’exigence. Les jeunes auteurs belges n’ont pas les réflexes d’autocensure que s’imposent beaucoup de Français. Même s’ils n’ont pas encore la technique – il y a un besoin de formation sur les séries, tant pour les scénaristes que pour les nouveaux producteurs -, ils ont une vraie liberté de ton et ne se sentent pas obligés de proposer des projets ‘formatés’ », souligne Séverine Jacquet.
Et, « même si les budgets sont plutôt ‘middle cost’ pour des séries de 10 x 52 minutes, les enveloppes d’écriture sont tout à fait correctes soit 17 500€ bruts minimum par épisode. Cela peut sembler beaucoup pour des néophytes, mais c’est 10 000 euros de moins qu’un scénario en France et cela représente des mois de travail intensif, surtout pour des auteurs juniors », poursuit-elle.
C’est en effet là, principalement, que le bât blesse : la plupart des formations en Belgique restent très théoriques car le taux de production est bien trop faible (une série belge tous les deux ans, en moyenne) pour permettre aux jeunes de se faire la main. « Il y a un grand savoir-faire en cinéma mais pas en écriture ni en développement de séries : comment organiser l’écriture, la production, le tournage. Or tout se joue dès ce moment-là, sinon c’est la cata. »
Quant aux raisons qui l’ont poussée à abandonner l’écriture pour se lancer dans le coaching, elles sont multiples.
« Je faisais déjà de la direction de collection en France, qui est très proche de ce que j’ai fait ici au début. C’est une activité qui permet d’améliorer ton écriture car tu prends du recul sur ton propre travail. Et puis, j’ai eu un coup de foudre pour le projet d’Ennemi public. »
Chaque série défend une vision
Arrivée à un moment de « blocage et de doute » dans le développement du scénario, Séverine Jacquet se souvient qu’en « discutant beaucoup avec les auteurs, ils ont pu en sortir. Ils ont vraiment été à la hauteur. C’était un très beau moment car tout le monde y croyait et tout le monde se disait que ce serait dommage de ne pas y arriver. Parfois il suffit de peu de chose pour bloquer ou dégripper l’écriture. »
Le plus important dans une série est de savoir « quelle est la vision, le postulat dramatique que l’on veut défendre », insiste Séverine Jacquet. « Une série doit permettre de développer des histoires à l’infini : c’est une réflexion qui ne s’arrête jamais sur des situations en apparence insolubles. Ensuite, il faut être capable de maîtriser et développer l’univers traité. » En mettant en place une organisation efficace (écriture, préparation, etc.)
« Il y a la volonté qu’un Belge occupe ce poste un jour », poursuit Séverine Jacquet. « Le fait d’être française, cela m’aide pour garder ma neutralité vis-à-vis des producteurs. Puis, je travaille avec Ariane Meertens qui, elle, connaît bien le secteur. Ce qui est génial c’est que tu vois le fonctionnement de toute la chaîne de production. A terme, j’aurais envie de réécrire des séries, je ne fais pas du tout une croix là-dessus. Sans cela, d’ailleurs, mon expérience deviendrait vite obsolète », conclut-elle.
Entretien: KT
Séries belges et Festival « Are you series » à Bozar
La Trêve. Vendredi à 19h, la première série écrite par de jeunes auteurs (Matthieu Donck, Benjamin d’Aoust, Stéphane Bergmans) soutenus par le Fonds séries de la RTBF et de la Fédération Wallonie-Bruxelles sera projetée au Festival Are you series? à Bozar. Un événement qui s’inscrit au terme d’un long processus : sélection, écriture des 10 scénarios, tournage, post-production… Sa diffusion est prévue en janvier à la RTBF.
Ennemi public, le projet suivant, est en cours de tournage jusqu’à la fin décembre. Ecrit par Antoine Bours, Matthieu Frances, Gilles de Voghel et Christopher Yates, c’est le premier projet accompagné par Séverine Jacquet à la RTBF.
Neuf autres séries sont en cours de développement : « Invisibles », « Geek et flics », « Pionniers », « Ouesterne » et « Champion » dont les scénarios sont en cours d’écriture. Quatre projets viennent d’entamer ce parcours : « S001 », « Comme les autres », « Le pont » et « Section fermée ».
nb: Les deux photos de Séverine Jacquet ont été prises dans le cadre de la Journée professionnelle organisée par la RTBF et le Pôle Image de Liège ce jeudi 26 novembre. Sur la deuxième, on la voit en compagnie d’Ariane Meertens, son « bras droit » belge.
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