honourable woman.jpgPas une semaine sans que l’actualité ne soit secouée par les tensions au Proche-Orient. Un territoire tellement explosif et miné que l’on est en droit de douter de la possibilité d’en faire une aire d’exploration pour la fiction. Le pari a cependant été relevé par Hugo Blick, scénariste et créateur de l’étonnante Honourable woman.

La série a commencé à dérouler son écheveau dans la torpeur de l’été ce qui explique sans doute qu’elle n’ait pas encore réellement connu le retentissement qu’elle mérite, mais tous ceux qui l’ont croisée en gardent un souvenir fort et précis. Et pour cause.
Au sujet explosif du conflit israélo-palestinien s’ajoute une interprétation épatante. Notamment celle de l’actrice Maggie Gyllenhaal (photo) qui campe Nessa Stein, femme d’affaire israélo-britannique fraîchement anoblie pour son implication dans le processus de paix entre Israéliens et Palestiniens. Ses partenaires brillent également par leur jeu nuancé: Lubna Azabal, Stephan Rea et Andrew Buchan.

Hugo Blick (« The shadow Line ») opte pour une réalisation léchée et une narration lente et soignée qui permettent de se familiariser avec toutes les strates d’une société malade de sa méfiance et de ses trop lourds secrets. A ce petit jeu de dupes, il devient très vite impossible de déterminer qui ment le plus et qui cherche le plus à nuire à son adversaire. Dans ce super poker menteur tous les adversaires – Américains, Britanniques, Israéliens, Palestiniens – semblent insondables.

honourable woman 1.jpgThe honourable woman*** est d’abord une belle série, maîtrisée et très bien réalisée. Mais c’est aussi un thriller politique noir, dense et efficace qui implique tous les aspects même les plus intimes de la vie d’une famille emblématique de l’Etat d’Israël où le rêve initial a parfois fait place à la désillusion, voire au cauchemar.

Chaque épisode (il y en a 8 en tout) apporte sa pierre à l’édifice, révélant une facette du mystère global d’une région où les origines les plus diverses semblent étroitement s’emboîter, pour former un noeud inextricable de relations plus ou moins troubles, plus ou moins avouées. A l’image des millions de kilomètres de câbles installés par la Fondation Stein afin de favoriser le désenclavement des territoires palestiniens et assurer l’égalité de chances pour les générations futures dans chaque communauté.

Bien qu’il se garde de prendre parti pour l’un ou l’autre camp – renvoyant régulièrement les terroristes des deux bords, dos à dos, et plaçant le téléspectateur dans la position du juge ultime – Hugo Blick, réalisateur et producteur, confirme avec cette série que rien de ce qui se passe au Proche-Orient n’est jamais ni simple ni totalement innocent. Et que lutter pour la paix peut s’avérer très violent, même (ou surtout?) lorsqu’on est la fille d’un ex-grand marchand d’armes lâchement assassiné.

Avec sa construction complexe, pleine de flashbacks et d’enchâssements, on progresse à tâtons entre les points d’interrogation de cette fiction où le dessous des cartes a autant de poids, si pas plus, que les enjeux et les intérêts mis sur la table.
The Honourable woman a été coproduite par la BBC et Sundance Channel, un double gage de qualité. Preuve supplémentaire que la fiction peut très bien rendre compte de la réalité.
KT

à suivre: la saison 2 d’Hatufim, autre regard sur le quotidien d’Israël