p'tit quinquin 2.jpgNon, Canal n’a pas le monopole de la création originale en France. Il suffit de regarder les cartes jouées ces dernières années par Arte pour s’en rendre compte: la chaîne culturelle européenne a quelques très beaux atouts en main. Elle a surtout le chic pour dégotter des histoires à nulle autre pareille. Jeudi, 1,5 million de curieux (6,3 % de parts de marché) se sont pressés devant leur petit écran pour découvrir P’tit Quinquin la première série macabre et décalée de Bruno Dumont (photo). Un score impressionnant qui fait figure de record pour la case fiction 2014 sur Arte et qui ne lasse pas d’étonner ceux qui avaient l’habitude de son cinéma plutôt austère.

« Faire entendre la voix des auteurs dans leur singularité » est le credo d’Arte, un leitmotiv qui lui a déjà permis de remporter plusieurs batailles sur le front des audiences. Fiction d’anticipation, thriller politique, comédie musicale: 2015 jouera toutes ces cartes.

Avec une case du jeudi rassemblant régulièrement 3% de parts de marché (700 000 curieux) et une case du vendredi affichant fièrement ses 2,6% (614 000 fidèles), la fiction fait figure de très bon élève, tous types de programmes confondus. En misant sur «le contemporain, le mélange des genres et des univers et l’ouverture sur les arts et à l’international», Arte a réussi à marquer les esprits et ce n’est visiblement pas fini.

Les auteurs jouent les prolongations

Pour prendre le contre-pied de sa réputation parfois austère, Arte a ainsi annoncé sa volonté de placer l’ensemble de ses fictions unitaires en 2015 sous le signe de la comédie. «On abordera le social, le fantastique, le burlesque,…: notre volonté est d’explorer le genre au coeur d’une collection spécifique.»
Un pari déjà en partie relevé avec le succès de « P’tit Quinquin ». Ravie de sa collaboration très fructueuse avec Bruno Dumont, Arte annonce vouloir « aller plus loin sur un projet encore plus fou »: une comédie musicale sur l’enfance de Jeanne d’Arc, Jeannette d’après les écrits de Charles Péguy. La BO de cet ovni sera confiée à un groupe pop « assez connu », sans oublier le talent d’un chorégraphe.

3 x Manon.jpgArte jouera également les prolongations avec Jean-Xavier de Lestrade qui proposera Manon, 20 ans pour prolonger sa formidable mini-série 3 x Manon. «Ce n’était pas du tout prévu au départ mais Jean-Xavier en a eu l’idée et les synopsis sont extraordinaires, on n’a pas pu résister» explique Judith Louis, la directrice de l’unité Fiction d’Arte.

Le 2 octobre se dévoilera la saison 2 d’Ainsi soient-ils, série sur le destin de jeunes séminaristes – et la saison 3, en tournage depuis août, devrait être prête pour la rentrée 2015. La nouvelle année démarrera en compagnie de Virage nord de Virginie Sauveur sur le milieu du foot, de Paris et sa ronde des destins tourmentés dans la faune citadine, ou d’Intrusion, série mêlant thriller psychologique et fantastique dans l’univers musical, avec Jonathan Zaccaï à la baguette. Trois séries récemment présentées au Festival de La Rochelle.

Egalement à cheval sur deux mondes – le thriller politique et la fiction d’anticipation – la série Trepalium entrera en tournage au mois d’octobre. Avec un sujet qui, d’emblée, électrise: les 80% de sans emploi sont séparés du reste de la population mondiale par un mur infranchissable, une situation tendue explorée par quatre auteurs. La réalisation a été confiée au Belge Vincent Lannoo et le casting se compose de Léonie Simaga, Ronit Elkabetz, Lubna Azabal et Aurélien Recoing.

Trente projets développés par an

«Le pas de coté qu’on affirme par rapport aux autres diffuseurs génère d’importantes attentes du côté des producteurs et scénaristes, attentes auxquelles nous ne pouvons malheureusement pas répondre» explique Judith Louis. Sur 1000 projets reçus, seule une trentaine partira en développement. Avec des fortunes diverses puisque la directrice de l’unité Fiction reconnaît qu’un tiers des projets développés ne sont pas allés jusqu’à leur terme. Le budget de la fiction demeure en effet inchangé: 25 millions dont 4 consacrés aux achats et préachats de séries étrangères.

Dans ce domaine, Arte se montre éclectique avec une prédilection clairement européenne: au Tandem franco-allemand mis en selle autour de la question nucléaire, répond Occupied, un thriller d’après une idée originale de Jo Nesbo où on voit la Norvège occupée par la Russie qui a fait main basse sur ses ressources pétrolières.

l'hôpital - riget.jpegTout ceci sans oublier des succès de haut vol comme Rectify, Lilyhammer ou «L’hôpital et ses fantômes», toute première série signée par Lars Von Trier (photo) attendus sur antenne à partir d’octobre. Tandis que Peaky Blinders, Gomorra, Hatufim, Indian summers ou Breaking Bad s’annoncent déjà en 2015.
Cette curiosité et cette sélectivité restent gages de qualité comme le prouvent la croissance des audiences d’Arte et l’intérêt suscité par la chaîne auprès des sériephiles.
KT, à La Rochelle