la rochelle 2014.jpegMême si le ciel affiche un bleu frondeur au-dessus de La Rochelle, les nuages ne seront pas bien loin cette semaine, du moins dans les esprits. A l’heure où s’ouvre la 16e édition du Festival de la fiction TV, l’arrivée prochaine de Netflix, le service de vidéos en ligne américain, donne des sueurs froides à plus d’un opérateur européen.

La question de sa possible montée en puissance est sur toutes les lèvres et sera même au coeur du grand débat de vendredi matin où sont attendus les principaux patrons de chaîne: Nonce Paolini (TF1), Rémy Pflimlin (France Télévisions), Thomas Valentin (M6), ainsi que deux représentants des professionnels du secteur: Thomas Anargyros pour les producteurs (USPA) et Pascal Rogard pour les auteurs (SACD). Un débat auquel participera d’ailleurs la ministre de la Communication et de la Culture fraîchement nommée, Fleur Pellerin.

Avec l’arrivée de Netflix le 15 septembre, c’est non seulement le sacre de la «culture internet» (regarder ses programmes sur son PC plutôt qu’attendre leur diffusion en télévision), mais aussi le sacre du «tout mobile» (passer d’un écran à un autre sans perdre le fil de l’histoire regardée) qui est confirmé. Cette arrivée fait aussi planer le spectre de séries innovantes et de qualité auxquelles les chaînes belges et françaises n’auront bientôt plus accès.

Car si House of cards, programme-phare de Netflix, leur a bien été vendue, il n’en sera pas de même, en 2015, lorsque les nouvelles séries du service de vidéo en ligne seront prêtes pour diffusion. «Il faudra pallier la disparition de ces fictions de nos grilles de programmes par des fictions produites en France. Saurons-nous le faire? » interroge Pascal Josèphe, responsable de la sélection à La Rochelle et fondateur de International Media Consultants Associés (IMCA), une société de conseil et d’ingénierie spécialisée.

les revenants 1.jpgLe noeud du problème est là. Car en termes de production, la France et la Belgique affichent encore un sérieux retard à l’allumage. Et si quelques programmes dont Les Revenants ont effectivement fait l’événement en 2013, parvenant à s’exporter dans de nombreux pays, le suivi n’est pas assuré. Ainsi la série de Canal+ est très loin d’avoir bouclé sa saison 2. Or plus l’attente se prolonge, plus le risque est grand que les acheteurs se détournent d’une production trop erratique.

Echange de savoir-faire
L’étude, publiée mardi, par le CNC (Centre national du cinéma et de l’image animée) et TV France International vient de le souligner: les programmes français – animation, fictions et documentaires – se portent un peu mieux à l’export *. Pourtant, ils sont encore très loin de rivaliser avec leurs voisins britanniques, allemands ou même turcs. Ces derniers ont d’ailleurs réalisé une incroyable percée au cours des dernières années, se plaçant devant les Américains en matière d’exportations mondiales !

Ce sont des succès tels que ceux-là que souhaite analyser le Festival de La Rochelle qui invite, pour la première fois, des créateurs étrangers à venir partager leur savoir-faire lors de masterclass et d’études comparées. On pourra ainsi écouter Hugo Blick, auteur et réalisateur et Greg Brenman, producteur de The Honourable woman, thriller politique qui s’est fait remarquer cet été en Grande-Bretagne. Ou entendre Berkun Oya, scénariste, et Fredrik Af Malmborg, distributeur, au sujet de l’incroyable succès du format turc The End.

rouge sang bonnaire le coq.jpgAu-delà de cet instructif tour d’horizon de la création, la rencontre est aussi l’occasion d’une compétition au sein de laquelle s’affrontent 43 oeuvres françaises et étrangères inédites.
Soumises à un jury emmené cette année par le comédien Bernard Le Coq (en photo avec Sandrine Bonnaire dans la fiction « Rouge sang » qui a ouvert le Festival hier soir) elles seront départagées, entre autres, par les comédiens Rachida Brakni, Bruno Todeschini et Sabrina Ouazani. A l’issue des votes, samedi, 14 prix seront décernés venant saluer le meilleur de la fiction de 2014.
En attendant que diffuseurs et producteurs aient trouvé comment doper leur créativité pour 2015 et 2016…
KT, à La Rochelle

nb: *Selon le CNC, les ventes des programmes français ont atteint un niveau historique en 2013 avec une croissance de 8% pour atteindre 137,1 millions d’euros, soit le plus haut niveau observé depuis 12 ans. Trio de tête de cette «expertise» bleu-blanc-rouge: l’animation, les documentaires puis la fiction. Ce résultat encourageant ne doit pas masquer le problème lancinant de la lenteur de la production française.