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La mini-série Le Code du tueur retrace sa première utilisation dans une double affaire criminelle en Grande-Bretagne. Un thriller scientifico-policier impeccablement interprété par John Simm et David Threlfall. A voir sur Arte.tv et sur Arte dès le jeudi 21/11

Novembre 1983, la disparition dans la nuit de Lynda Mann, âgée de 15 ans, secoue le petit village de Narborough, dans la région du Leicestershire. Malgré les battues, les appels à témoin et la mobilisation de nombreux policiers, la jeune fille demeure introuvable. Deux jours plus tard, son corps sans vie est retrouvé abandonné à la lisière d’un parc.

Comme tous les habitants de la région, Alec Jeffreys a entendu parler de cette sinistre affaire. Scientifique tenace, il travaille sur un nouveau mode d’analyse tendant à démontrer que chaque être humain est doté d’un code génétique unique. Une découverte qui pourrait révolutionner les méthodes de recherches en paternité.

John Simm campe Alec Jeffreys, le scientifique britannique qui a mis en lumière l’empreinte génétique unique de chaque être humain.

Les mois passent et l’enquête de David Baker sur le meurtre de Lynda Mann est dans l’impasse. Intrigué par un article lu dans la presse, le commissaire s’intéresse alors aux recherches menées par un scientifique local, spécialiste de l’ADN, ce code génétique unique qui pourrait permettre de confondre le meurtrier de Lynda, il en est persuadé. Mais les prélèvements récoltés sur la scène du crime sont peut-être déjà trop anciens…

Quête de vérité et de justice

C’est une mini-série britannique classique et sobre, mêlant l’humain – le soin apporté à la description et aux interactions des personnages – et sens du suspense. Dans Le Code du tueur, si un policier et un scientifique partagent l’affiche, c’est bien le premier qui donne l’impulsion et mène la danse, faisant de la quête de la vérité un enjeu crucial, empoigné avec beaucoup de tact et d’empathie par le second.

Mus par une cause commune, les deux hommes sont déterminés à coincer l’homme responsable de la mort violente de deux adolescentes. Car, dans l’intervalle, une deuxième jeune fille a été retrouvée assassinée. Pour mener l’enquête scientifique de façon efficace, David Baker doit convaincre sa hiérarchie de soumettre des milliers d’hommes, âgés de 15 à 34 ans, habitant dans les villages de Narborough, Littlethorpe et Enderby, à un test ADN afin de tenter de résoudre les enquêtes en cours. Un boulot colossal auquel Alec Jeffreys est résolu à s’atteler « si on lui en donne les moyens ». Ce travail de bénédictin, doublé d’une sinistre course contre la montre, nourrit la dramaturgie de la série qui tire tout son sel des nombreux personnages secondaires que l’enquête fait émerger.

David Threlfall, il s’est glissé dans l’austère costume du commissaire David Baker, bien loin de son rôle dans la série « Shameless ».

Dans le rôle du scientifique Alec Jeffreys, on reconnaît John Simm, le comédien révélé en 2006 par la série Life on Mars. Qui a également effectué un passage remarqué dans l’iconique série Doctor Who. Quant à David Threlfall, il s’est glissé dans l’austère costume du commissaire David Baker, bien loin du rôle qui l’a rendu célèbre : l’inimitable Frank Gallagher de la série Shameless. Créée par Michael Crompton, la série a été réalisée par James Strong.

Si les personnages et le récit ont été fictionnalisés, la découverte de l’ADN a bien eu lieu en Grande-Bretagne au début des années 80. L’empreinte génétique découverte par Sir Alec Jeffreys a bel et bien révolutionné le domaine des enquêtes criminelles. C’est même la contribution scientifique la plus importante depuis la découverte des empreintes digitales. Le scientifique britannique a d’ailleurs été fait chevalier pour ses travaux en 1994 ; il a pris sa retraite en 2012.

« Le Code du tueur » (Code of a Killer) retrace la découverte de l’empreinte génétique, primordiale dans les enquêtes criminelles.

Rosalind Franklin, la scientifique oubliée qui a découvert l’ADN

Il a fallu près de 50 ans pour que le nom de cette physico-chimiste britannique soit sorti des oubliettes de l’Histoire et que ses collègues reconnaissent qu’elle aurait « également mérité le prix Nobel »

Si Sir Alec Jeffreys est bien le premier généticien à développer des techniques de relevé d’empreintes génétiques, la découverte de l’ADN est le fruit du travail d’une scientifique oubliée par l’Histoire : Rosalind Franklin, physico-chimiste britannique. Le 18 octobre 1962, le prix Nobel de médecine est attribué à trois hommes, James Watson, Francis Crick et Maurice Wilkins, pour la découverte de la structure en double hélice de l’ADN. Cette découverte, pourtant, est le fait de cette pionnière de la biologie moléculaire qui a étudié un temps à Paris.

Rosalind Franklin, la scientifique britannique, un temps oubliée, qui a permis la découverte de l’ADN.

De retour en Angleterre en 1951, Rosalind Franklin se consacre à la structure de l’ADN, au King’s College à Londres, où elle travaille avec le physicien Maurice Wilkins. Mais leurs relations se détériorent rapidement, d’autant que les premières recherches de Rosalind Franklin lui permettent de réfuter les modèles d’ADN établis par Wilkins. Le cliché 51, pris par la scientifique, va devenir primordial pour les recherches menées ensuite par James Dewey Watson et Francis Crick sur la structure hélicoïdale de l’ADN. Quand, en mars 1953, Rosalind Franklin finit par quitter le King’s College pour le Birckbeck College, ses travaux sur l’ADN doivent rester sur place.

James Watson, Francis Crick et Maurice Wilkins, qui finissent par collaborer, obtiendront le prix Nobel de médecine en 1962 pour cette découverte cruciale. Dans son discours de remerciement, seul Maurice Wilkins cite le nom de Rosalind Franklin en indiquant qu’elle y a apporté une contribution précieuse. Il faudra attendre 2003 pour que James Watson, qui avait désigné la scientifique comme « une personne acariâtre » dans son best-seller La Double Hélice, finisse par reconnaître que Rosalind Franklin aurait également mérité le prix Nobel. Décédée en 1958, la scientifique a peu à peu été réhabilitée par l’Histoire en réaction au livre de Watson.

Karin Tshidimba