Le lien, ténu, entre certains fans de la série Game of Thrones et l’auteure du roman Chaussures à son pied se trouve là : dans cette volonté de transcender une mythologie, de réécrire une histoire mondialement célèbre en améliorant sa recette, en la revisitant « à sa sauce » selon la métaphore propre à un autre genre télévisé ultra-populaire : le concours culinaire. Et cela tombe bien car séries et cuisine sont les deux grandes passions de Marianne Levy qui signe son deuxième roman chez Pygmalion. Un livre qui explore les mystères de l’écriture, le métier d’écrivain et de scénariste car les séries, et singulièrement les feuilletons quotidiens, ne sont jamais bien loin lorsqu’on sonde le mythe de Cendrillon.
Jeu de piste et Bison futé
En 2019, il n’y a plus personne pour croire qu’une jeune fille normalement constituée poireauterait à côté de son feu ouvert, ou sous un plaid, en attendant l’arrivée de « l’être aimé ». Qu’on l’appelle l’âme sœur, le compagnon ou la moitié, les modes de recherches ont bien changé depuis le XVIIe siècle qui ne connaissait ni Tinder ni Instagram comme le rappelle Filomena à Samuel « Corazon« , son cher colocataire au cœur brisé, grand admirateur de Shakespeare devant l’Éternel. Et selon elle, le fait que la petite bande des quatre habite tout près de Notting Hill est un signe… Surtout que Samuel ressemble étrangement à un célèbre acteur britannique (que les lecteurs de la précédente note reconnaîtront sans peine…)
Outre son humour savamment distillé et ses scènes éminemment cinématographiques, la grande force de ce récit est double : un casting impeccable, qui nous entraîne vers les meilleures heures de Friends avec une colocation plus vraie que nature dans laquelle on rêverait de s’incruster et un récit caméléon célébrant l’écriture sous toutes ses formes.
Textos, mails, messages vocaux, roman et scénario, à une époque où la communication est souvent jugée lacunaire ou déficiente, Chaussures à son pied réinvente le récit en même temps qu’il en bouscule la chronologie.
Scénario méta offrant de multiples points de vue sur une même réalité, ce livre tient aussi du jeu de piste, ce qui en fait une lecture ludique qui ne demande qu’à prendre vie sur le petit écran. En tordant le cou aux contes de fée tout en se jouant de notre propension à croire secrètement au destin ou au miracle, le roman finit par prendre le lecteur à son propre jeu… Ou le plus « épris » n’est pas celui que l’on croit…
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