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christopher eccleston.jpgAvec son regard intense, mêlant douceur et ironie, Christopher Eccleston est un visage qu’on n’oublie pas. Un interprète qui impose sa stature partout où il passe.
Après son implication dans Doctor Who et un nombre impressionnant de séries britanniques ou intrenationales (Fortitude), son rôle de pasteur illuminé dans The Leftovers, la série de Damon Lindelof pour HBO, l’a replacé au centre de l’échiquier télévisuel.

« J’ai toujours voulu faire partie de l’aventure d’une série HBO car j’étais fasciné par le fonctionnement de leurs ‘writing rooms’. En Grande-Bretagne, le processus est tout à fait différent. Vous recevez un texte avec un début, un milieu et une fin et vous savez où vous allez. Jimmy Mc Govern et Russel T. Davies, avec qui j’ai beaucoup travaillé, fonctionnent comme cela. Alors qu’ici, je savais que ce serait une sorte de ‘work in progress’ et qu’il faudrait s’adapter. Mais une fois que vous savez avec quel showrunner vous vous engagez, et qu’il s’agit de quelqu’un d’intelligent, vous savez que ce processus de création sera intéressant… J’avais beaucoup discuté avec Damon Lindelof. Une discussion informelle sur notre rapport à la religion, entre autres, l’a décidé à donner plus de place au personnage de Matt Jamison qui ne fait que deux pages dans le roman (“Les disparus de Mapleton” de Tom Perrotta, NdlR). Les showrunners profitent toujours de ce type de conversation pour vous étudier », glisse le comédien avec un air entendu.

« Je n’avais jamais lu la Bible avant ce rôle »

christopher eccleston 2.jpg« Notre thèse de départ était qu’un événement tel que la disparition de 2% de la population mondiale rendrait forcément Matt Jamison plus religieux encore. Damon Lindelof a tout de suite fait le lien avec le livre de Job. Matt est un homme qui se bat pour ses convictions, ce qui est très loin de ce que je suis au quotidien. » Pourtant, par deux fois, avant de commencer le tournage, Christopher Eccleston s’est retrouvé dans une église et, à chaque fois, par hasard, la Bible était ouverte à la page du livre de Job… « Je n’avais jamais lu la Bible avant cela », précise-t-il. Une coïncidence à laquelle l’acteur a forcément repensé en endossant son personnage de révérend épiscopalien.
« J’aime l’ambiguïté de Matt, sa vigueur, sa volonté tenace, la façon dont il poursuit ses objectifs, c’est un fanatique mais il a une évolution vraiment intéressante.« 

Son entrée dans le monde des Leftovers n’a rien de fortuit.
« J’avais lu et aimé le livre de Tom Perrotta et je savais qu’HBO en avait acheté les droits, j’ai donc décidé de me présenter et d’auditionner pour le rôle principal, celui que Justin Theroux a endossé… A la suite de notre conversation, Damon Lindelof a décidé de me caster et de voir ce qu’il pouvait faire du personnage de Matt Jamison. Damon Lindelof écrit vraiment avec ses tripes et ses sentiments, son ressenti personnel, cela s’illustre à travers la série. »

Les vertus de l’écriture collaborative

christopher eccleston 3.jpgL’aventure de cette série à la fois intense et très particulière, s’apparente à un processus très organique, selon lui.
« Quand on commence à tourner la saison, personne ne sait comment l’histoire va se terminer. Damon Lindelof tient beaucoup à ce que les autres auteurs le challengent et si l’un d’eux arrive en disant : ‘je suis un grand fan’, il n’obtient pas le job. (Il rit) Se mettre au défi de trouver la meilleure idée pour le scénario est vraiment la réflexion au coeur de cette création. Damon veut que les autres le jugent, le critiquent et proposent d’autres idées. Il croit avant tout aux vertus de l’écriture collaborative. »

Fan de la série depuis le début, Christopher Eccleston ne peut s’empêcher de s’étonner du changement de regard du public au fil du temps. « Les premières critiques étaient bonnes, mais les choses ont pris une tout autre ampleur pendant la saison 2 et aujourd’hui, on sent une attente impressionnante. Je pense qu’au début, les gens ne savaient pas très bien où la série allait les emmener, ni à quel genre la rattacher… Aujourd’hui, beaucoup de personnes en ont entendu parler et ont décidé de se lancer dans l’aventure. »

« Il suffit de se fier à son instinct et foncer »

Christopher Eccleston 4.jpg« Pour le choix d’un rôle, je me fie toujours à mon intuition lors de la première lecture. Souvent, les premières pages suffisent à me convaincre. Ce fut le cas pour mon rôle dans ‘Cracker’ série écrite par Jimmy McGovern. » Et pour les 7 autres séries que Christopher Eccleston a faites avec lui.

Quant à la complexité de l’intrigue de The Leftovers, elle ne l’a pas rebuté. Que du contraire.
« Je n’hésite jamais à poser des questions basiques et stupides, j’ai vu tant d’acteurs et de réalisateurs s’empêtrer car ils n’osaient pas mettre les choses à plat. Je n’ai pas peur du ridicule et comme je n’ai pas été à l’université, j’ai une bonne excuse… » conclut-il en riant.
« Pour le reste, j’ai un bon instinct et je m’y fie. Avec les meilleurs auteurs, vous réalisez souvent qu’il n’y a qu’une façon d’appréhender les choses et qu’il suffit de se lancer. »

« Je ne peux rien dire sur la fin, mais je pense que chaque personnage va trouver sa voie…
Dans chaque saison, j’ai eu droit à un épisode centré sur mon personnage ce qui est très intéressant et un pari vraiment agréable à relever. La seule chose que je peux dire au sujet de la saison 3 est «lion» c’est un spoiler, je n’en dirai pas plus… » Il rit.
Deuxième indice: cela concerne l’épisode 5 diffusé ce soir et jeudi soir sur Be Séries…

Christopher Eccleston en quelques mots

the a word.jpgAmateur de musique et plutôt bon vivant, Christopher Eccleston avoue regarder moins la télévision aujourd’hui même s’il a été fan de nombreuses séries comme Les Soprano ou Breaking Bad.
C’est en lisant le livre «Des hommes tourmentés: le nouvel âge d’or des séries» («Difficult Men» en VO) de Brett Martin qu’il a conçu sa fascination pour la méthode HBO.

« Peter Flannery, Tom Merchant sont des créateurs avec lesquels je souhaiterais travailler, ainsi que David Simon, bien sûr, dont j’ai adoré The Wire et Treme » confie le comédien né en 1964 à Salford, dans le « Grand Manchester ».

Il tourne en ce moment la saison 2 de The A Word (photo), formidable récit sur un petit garçon qui souffre d’autisme. Adapté d’une série israélienne, ce drama plein de délicatesse et d’humour conte la façon dont sa famille tente de gérer ce diagnostic. Six nouveaux épisodes seront à découvrir à l’automne sur la BBC.

Entretien: Karin Tshidimba à Paris