transparent 4.jpgToute sa vie, Mort (Jeffrey Tambor) s’est senti femme. Arrivé à l’âge de la retraite, il a décidé d’assumer sa nature profonde en devenant Maura, s’offrant une re-naissance à l’heure où d’autres songent déjà à partir.
La transition de ce patriarche vers un nouveau «genre» fait sauter tous les tabous familiaux, libérant les rêves enfouis de ses trois enfants. Sur cette trame en partie autobiographique, Jill Soloway compose une chronique familiale à la fois sensible et très intime qui n’exclut pas les excès mais refuse tout regard moralisateur ou définition de ce qui est licite et illicite. Un premier essai concluant pour Amazon, dans le domaine des séries, puisque Transparent lui a permis de récolter deux Golden Globes en janvier dernier.

Une proposition singulière à découvrir en intégralité ce samedi dès 15h45 sur Be Séries.

Série grinçante forcément adulte et interpellante, Transparent accompagne les tiraillements de cinq personnages en quête d’eux-même, prêts à rire ou à sourire des déboires du voisin sans forcément être conscients du pétrin dans lequel eux-mêmes sont englués.
transparent 3.jpgQue ce soit Sarah, l’aînée de la fratrie, irrésistiblement attirée par son ancien flirt du lycée, Tammy, ou Josh toujours en quête d’une jeune fille à séduire, ou la cadette Ali, incapable de savoir ce qu’elle veut faite de son corps ou de sa vie. En cela, elle rappelle d’ailleurs, par moments, le personnage d’Hannah (Lena Duham) dans Girls. En dix épisodes, tandis que Mort chemine pour devenir Maura, chacun tente de définir sa propre voie.

Ce qui a fait dire à une critique de série que l’un des plus beaux personnages féminins de la saison écoulée était en fait tenu par un homme, en quête de sa part féminine vitale. L’assertion a de quoi surprendre ou laisser sans voix, pourtant lorsqu’on tente de comprendre la place que Mort veut désormais occuper au sein de sa famille, on réalise le poids que la société et le regard des hommes, principalement, fait peser sur des personnes qui se sentent depuis toujours «hors cadre».

La question de l’identité sexuelle pourra sembler extrêmement singulière ou ténue à certains, pourtant le fait qu’elle soit au coeur de deux séries, diffusées à quelques mois d’intervalle, prouve qu’elle reflète les préoccupations du moment.

grace et frankie.pngC’est en effet une thématique très proche qu’aborde la nouvelle série de Netflix, Grace et Frankie. On y croise deux femmes (Jane Fonda et Lily Tomlin) qui se détestent et deux hommes, leurs maris respectifs (Martin Sheen et Sam Waterston), associés dans la vie, qui s’entendent à merveille. Trop bien même pour que tout ceci soit tout à fait anodin. Ce soir, Robert et Sol ont décidé d’annoncer leur souhait de se marier car ils s’aiment depuis 20 ans…

Si Jill Soloway brouille les frontières entre le bien et le mal (ou ce qui est supposé l’être), entre homosexualité et hétérosexualité, entre genre féminin et masculin dans Transparent. Avec Grace et Frankie, Marta Kaufmann (la créatrice de Friends) professe qu’il faut s’assumer et assumer ses désirs quel que soit son âge.

grace et frankie 1.jpgEn résulte deux séries où les choses sont dites de façon assez directe. Deux séries au format court (30 minutes), deux tons assez opposés (si l’une assume son statut de drame, l’autre louche également vers la comédie) mais aux constats en partie semblables. Chacune explorant le séisme créé dans une famille par la révélation de la véritable nature de l’un des parents, arrivé à l’âge de la retraite.

Ces deux créations prouvent que l’émergence de showrunneuses telles que Shonda Rhimes (Grey’s Anatomy, Scandal, How to get away with murder), Jenji Kohan (Weeds, Orange is the new black), Lena Duham (Girls), Michelle Ashford (Masters of sex) ou Jill Soloway (Transparent) permettent d’ouvrir l’horizon télévisuel en proposant d’autres représentations de la famille, de la séduction et de l’intimité.
KT

nb: La réflexion sur la représentation de la sexualité féminine était au coeur de l’une des conférences proposées en avril dernier dans le cadre du Festival Séries Mania, causerie que l’on peut revoir sur le site du festival ou sur Daily Motion.