Sélectionner une page

La nouvelle production de Shonda Rhimes éclaire les coulisses et le profil du personnel de la Résidence*** présidentielle américaine. Une enquête ludique et passionnante à suivre dès ce jeudi 20/03 sur Netflix

Jasmine Heney (Susan Kelechi Watson) est dans tous ses états. Elle vient de découvrir son patron, AB Wynter (Giancarlo Esposito), gisant sur le tapis du salon bleu de la Maison-Blanche. Sa stupeur contraste avec l’ambiance habituellement feutrée des lieux et encore plus singulièrement avec les réjouissances qui se déroulent au rez-de-chaussée de l’édifice : un dîner d’État, donné en l’honneur de la délégation australienne, s’y déroule en ce moment même.

En l’absence d’AB Wynter, dont le corps vient d’être découvert, la voici nommée Huissière en chef de la Maison Blanche, soit une super-intendante en charge de la gestion de la partie habitée par le Président et la Première Dame. Et de l’ensemble du personnel qui y est attaché : des serveurs aux cuisiniers en passant par le plombier, l’homme à tout faire, le fleuriste, la responsable des espaces verts, la chargée des événements, etc. Or, ce soir forcément, tout le monde est sur le pont.

En quelques minutes à peine, les coulisses de la Maison-Blanche se transforment en ruche, envahie par des pontes en tous genres, inquiets que la nouvelle de cette mort tragique ne s’ébruite. Il y a là Harry Hollinger (Ken Marino), le bouillonnant ami et conseiller du président ; l’agent Colin Trask des services secrets ; Wally Glick, le directeur du FBI ; Irv Samuelson, chef de la police des parcs nationaux et Edwin Park (Randall Park), agent spécial du FBI. Tous s’agitent bruyamment et tentent d’imposer leur point de vue, sur la façon de procéder aux premières constatations. Ils ignorent encore que cette enquête va se dérouler d’une façon totalement inédite à leurs yeux.

« The Residence »: Aux yeux de Cordelia Cupp (Uzo Aduba), chaque employé de la Maison-Blanche est un suspect potentiel.

La charismatique et énigmatique Cordelia Cupp

Pour élucider cette sombre et délicate affaire, Lawrence Dokes, chef du département de la police métropolitaine de Washington DC, a en effet décidé de faire appel à Cordelia Cupp, la « meilleure détective au monde », par ailleurs passionnée de l’observation des oiseaux. Extrêmement perspicace, l’enquêtrice aux méthodes très singulières, fait preuve d’une logique implacable, servie par une capacité de déduction redoutable. Son tailleur-pantalon en tweed n’est pas qu’un clin d’oeil vestimentaire à l’élégance de Holmes, l’esprit de Sherlock vit en elle.

Sous les traits de Cordelia Cupp, personnage unique et haut en couleur – à la fois perspicace, têtue, obsessionnelle et d’une patience à toute épreuve – on retrouve l’excellente Uzo Aduba, révélée par son rôle la série carcérale féminine Orange is the New Black. La comédienne campe une détective qui semble inscrite dans la lignée des Miss Marple et autres Hercule Poirot, tant sa mémoire visuelle et son sens de l’observation hors du commun donnent du grain à moudre à tous les amateurs de mystère. Sa personnalité est le pivot de cette comédie policière où le moindre dérapage pourrait créer un incident diplomatique majeur, vu le profil des personnes invitées lors de cette soirée du 11 octobre à la Maison-Blanche.

La série aux allures de Cluedo géant mêle un sens aigu de l’observation, une bonne dose de suspense mais aussi de dérision avec les habitudes toutes plus farfelues de la détective Cordelia Cupp. Une série en huit épisodes qui offre une pause salvatrice au sein d’un corpus d’enquêtes criminelles d’ordinaire toujours plus sombres et sanglantes.

On connaît le goût de l’Américaine Shonda Rhimes pour les personnages charismatiques (telle l’avocate et professeure de droit Annalise Keating dans la série How to get away with murder), les situations alambiquées (terrain de prédilection d’Olivia Poppe, spécialiste de la communication de crise, dans la série Scandal) et les démonstrations rhétoriques brillantes (dont sont coutumières les deux héroïnes précédemment citées). A cela s’ajoute une furieuse tendance aux longs monologues démonstratifs, source d’inspiration idéale pour une plaidoirie. On retrouve tous ces ingrédients dans sa dernière production en date pour Netflix : The Residence créée par Paul William Davies. Et si vous persistez à penser que cette tonalité vous rappelle quelque chose, il n’y a rien d’étonnant à cela puisque l’homme est un complice de longue date de Shonda Rhimes, en tant que scénariste et coproducteur de sa série Scandal.

Une enquête désarçonnante

Inspirée du livre The Residence : Inside the Private World of the White House de Kate Andersen Brower, la série suit l’enquête découlant de la découverte d’un meurtre présumé au sein de la Maison Blanche. Alors que les membres du personnel sont tous soupçonnés et soumis à interrogatoire par la détective Cordelia Cupp. L’occasion d’arpenter la célèbre résidence présidentielle en long, en large et en travers, soit 132 pièces réparties sur 4 étages, au sein desquels circulent pas moins de 157 suspects…

En parallèle des découvertes et observations de Cordelia Cupp, nous suivons les travaux de la Commission d’enquête, menée par le sénateur Filkins, qui tente de statuer, plusieurs semaines après le déroulement des faits, sur les résultats obtenus par l’enquêtrice. Résultats dont le public ignore tout au moment où débute la série. Vous suivez toujours ?

L’intrigue, ludique à souhait, développe un goût prononcé pour le verbe qui fuse à toute vitesse, laissant l’assistance en partie ébahie, autant que l’ont été tous ceux qui ont eu l’occasion d’observer les méthodes de l’inimitable Cordelia Cupp.

Karin Tshidimba

The Residence Cluedo diplomatique géant Création et Scénario Paul William Davies, d’après le livre de Kate Andersen Brower Avec Uzo Aduba, Giancarlo Esposito, Susan Kelechi Watson, Randall Park Sur Netflix Dès jeudi 20/03 (8 x 52’)