Un trio de pieds nickelés prépare un attentat, sous couverture d’élevage fermier, mais ils vont bien vite être rattrapés par la réalité de la vie à la campagne. Une dramédie attachante à voir sur arte.tv

Sur papier, le plan était d’une simplicité quasi enfantine : Marwan allait emmener sa fille Kristin en vacances chez ses parents en Iran. Ne restait qu’à attendre que le passeport de sa fille soit prêt. Mais, soudain, le sort s’acharne contre Marwan (Nader Khademi), sans emploi fixe et bientôt sous la menace de perdre la garde de Kiki au profit de ses beaux-parents en contact avec les services sociaux. Lorsqu’il croise la route d’Adil (Ayaz Hussain), ancien copain de lycée, il se croit sauvé : le voilà en route pour se mettre au vert à la campagne, loin d’Oslo, pendant quelque temps.

Pour Adil, Tariq et Khabib aussi, sur papier, le plan était d’une simplicité quasi enfantine : à l’abri des regards, dans cette ferme nichée en pleine campagne, les trois apprentis djihadistes vont pouvoir fabriquer une bombe. Le projet dépasse visiblement leur compétence même si le trio ne veut pas se l’avouer.

Tariq (Jonas Strand), nouvellement converti à l’islam, a l’aval de son oncle pour occuper la ferme et dispose de tout le matériel nécessaire. Ne leur manque que la tranquillité. Mais ça, c’est en théorie car, en pratique, très rapidement de nombreux obstacles viennent se placer en travers de leur route, les obligeant à modifier considérablement leurs plans. Entre les voisins curieux, envahissants ou complètement à l’ouest, le responsable du syndicat d’initiative, soucieux de les aider à démarrer leur activité champêtre de façon “innovante et durable” et le troupeau de chèvres dont ils ont hérité, les apprentis fermiers se retrouvent rapidement dépassés par les événements. Les secrets de chacun risquant à tout moment de se retrouver éventés.

Terroristes, mais pas trop

Loufoque et pleine de tendresse, cette série se joue des préjugés et des a priori pour dévoiler quatre (jeunes) hommes pris au piège de leurs propres mensonges et de leur volonté de réussir envers et contre tout, mais finalement incapables de réfléchir calmement à leur destinée. D’autant que Kiki (Erika Mamelund), petite fille ingénieuse, mais têtue et ultra-déterminée, leur donne rapidement du fil à retordre.
Réalisé sur le mode du faux documentaire, chacun venant confier ses états d’âme et ses interrogations face caméra au fil de l’action, Countrymen révèle les failles de ceux qui pensent être prêts à tout pour prouver qu’ils sont à la hauteur des attentes de leurs commanditaires ou des espoirs de leurs proches. Au risque de se perdre ou de nier leur nature profonde.
Cette série détonante, scénarisée par Anne Bjornstad (Lilyhammer) et Izer Aliu (Hunting Flies) qui en est aussi le réalisateur, interroge avec beaucoup d’humour et de causticité les préjugés, l’appartenance identitaire et les différentes nuances de la paternité. Traiter ce sujet par ce biais est plutôt culotté, mais le résultat se révèle plein d’humanité. Remarquée en 2021 lors de sa présentation à CanneSeries, cette coproduction de la NRK et d’Arte a été doublement primée, décrochant le prix de la meilleure interprétation collective et le prix des lycéens.
Karin Tshidimba