Leur première série Beau Séjour*** a connu un incroyable destin à l’international grâce à sa diffusion sur Arte. Leur nouvelle création The Twelve*** suit un procès d’assises au plus près. Bert Van Dael et Sanne Nuyens forment un duo de scénaristes belges primés et reconnus bien au-delà de nos frontières. Grâce aux prix glanés au Festival CanneSeries et au Festival du film policier de Liège mais aussi à la diffusion de De Twaalf (en VO) sur Netflix depuis début juillet. Ils nous expliquent la genèse de leur série mise en images par Wouter Bouvijn.


Durant tout le procès, relaté au fil des dix épisodes de The Twelve***, deux questions taraudent le public. Frie Palmers a-t-elle tué sa fillette Rose pour punir son ex-mari et l’empêcher de les séparer ? Et est-elle aussi responsable du décès de sa meilleure amie Britt, survenu il y a vingt ans ? Dans ce procès d’assises, où l’on suit le cheminement de six jurés en particulier, on se rend compte que tout le monde ment… Et que la recherche de la vérité s’annonce bien plus complexe qu’on le pensait.
Sanne Nuyens et Bert Van Dael avaient commencé à parler de ce projet, avec la société de production Eyeworks Film, avant l’aventure de Beau Séjour. « Dès que la série a été terminée, nous nous sommes donc remis au travail. » L’écriture a été un très long processus : « deux ans et demi dont six mois de recherches préalables. »

On est influencés par les séries américaines mais cela ne se passe du tout de la même façon en Belgique !

« Nous avons beaucoup appris parce qu’on pense connaître le mode de fonctionnement de ces procès mais on est influencé par ce que les séries américaines en montrent et cela ne se passe pas du tout de la même façon en Belgique ! »

« Nous avons parlé avec six ou sept vrais jurés. Nous nous sommes beaucoup inspirés d’eux pour définir les personnages de notre série. On voit souvent des procès d’assises mais rarement du point de vue des jurés », souligne Bert Van Dael. Si on excepte bien sûr le fameux film Douze hommes en colère de Sidney Lumet.

« L’une des premières jurées avec laquelle nous avons parlé était une femme coincée dans une relation avec un mari très violent, poursuit Sanne Nuyens. En découvrant le prévenu du procès, elle a réalisé qu’elle pourrait finir comme sa victime et a donc commencé à chercher de l’aide après le procès. Cela a vraiment changé sa vie. C’est ce qui a donné la ligne de notre série : comment votre propre vie interfère et influence votre travail de juré. »

Durant trois semaines, le duo a suivi le procès d’une femme qui avait tué son bébé « et nous avons aussi été influencés par les fameuses affaires du meurtre en parachute ou du meurtre du châtelain. Ce sont trois procès qui nous ont beaucoup inspirés. Nous voulions être sûrs d’avoir suffisamment de matière dramatique pour bâtir nos dix épisodes ». Suivent des discussions avec différents avocats, psychologues… afin d’être « les plus proches possible de la réalité belge. Tout a été scrupuleusement vérifié ! »

« Nous avons été aidés par un juge célèbre en Flandre à qui nous pouvions poser toutes nos questions et qui a relu tout le scénario lorsqu’il a été terminé », précise Sanne Nuyens.

Un témoin se dévoile à chaque épisode

« La série débute par le point de vue des policiers, ensuite chaque épisode suit un des témoins pour percevoir l’affaire à travers son regard, explique Bert Van Dael. À la fin, on suit les délibérations du jury. C’est l’épisode que nous avons surnommé les ‘Douze hommes en colère’ même s’il n’y a pas que des hommes dans la salle… La grande différence avec le film, c’est que vous connaissez déjà les jurés puisque vous les suivez depuis le début du procès. Vous connaissez le contexte de l’affaire et la psychologie de chacun. »

Finalement, le duo a choisi de mettre « six personnalités en avant car douze cela aurait été trop imposant. Nous nous sommes inspirés des personnes que nous avions rencontrées mais aussi de nos propres vies car nous nous connaissons très bien », plaisantent-ils.

Le duo s’est rencontré lors de ses études à Sint-Lukas (Bruxelles). Il a quatre courts métrages à son actif et deux séries, désormais.
Son processus d’écriture est à la fois complexe et organique. « Nous faisons toutes les interviews et le brainstorming ensemble. La première année se passe en discussions et définitions des trajectoires des personnages. » Ensuite, ils écrivent séparément, réécrivent beaucoup et parlent sans cesse des changements à faire. « Nous nous envoyons les parties déjà écrites, nous nous relisons, nous proposons des changements et nous nous battons pour nos idées », admettent-ils en riant.

« Nous sommes des ‘slow writers’, nous mettons vraiment beaucoup plus de temps que les scénaristes américains pour boucler une saison. » Mais seul compte le résultat, in fine.

Entretien: Karin Tshidimba