Une forêt sombre et lointaine, les êtres malfaisants qui l’habitent : ces deux motifs hantent les contes et légendes sous toutes les latitudes. Même les plus « innocents »: Le petit poucet, Le chaperon rouge, Hansel & Gretel, Blanche-Neige,…
Depuis la nuit des temps, arbres et futaies charrient une charge émotionnelle où se mêlent mystères, dangers et maléfices. On parle des esprits de la forêt qu’il ne faut pas déranger, d’un labyrinthe sylvestre où nul n’ose s’aventurer, d’une nature qu’il faut à tout prix préserver. Une recommandation qui prend une tonalité plus alarmante avec la perception aujourd’hui beaucoup plus fine des bouleversements climatiques en cours. Mais ni Perrault, ni Andersen, ni les frères Grimm n’ignoraient cette loi universelle.
Cet imaginaire fécond Henrik Björn, Fredrik T Olsson et Alexander Kantsjö l’invitent dans la série suédoise Jordskott** lancée ce soir sur Arte. Si l’histoire démarre comme une «banale» enquête policière, le récit prend bientôt une tout autre tournure en convoquant les figures typiques des contes et légendes suédois (trolls, esprit de l’eau, etc.) dans une trame teintée de fantastique. Le sous-titre de la série, à savoir «la forêt des disparus», prend dès lors une résonance particulière. Et l’on suit l’enquête menée par l’inspectrice Eva Thörnblad, de retour dans son village d’enfance à la mort de son père, avec un œil averti.
Sept ans auparavant, la jeune femme (campée par l’actrice Moa Gammel) a perdu sa fille Joséfine alors qu’elles s’apprêtaient à pique-niquer toutes les deux au bord d’un lac, au milieu de la forêt. La disparition d’un jeune garçon dans des circonstances très similaires éveille son instinct policier et la pousse à prolonger son séjour à Silverhöjd. Eva est en effet persuadée que les deux enlèvements sont étroitement liés. Pendant ce temps, l’entreprise sylvicole gérée jusque là par son père connaît de sérieuses difficultés.
Un forêt très présente en 2016
Si la version française nuit à l’ambiance d’étrangeté voulue par l’équipe suédoise, le téléspectateur suivra sans doute avec curiosité cette plongée dans des traditions scandinaves méconnues. Pour peu, bien sûr, qu’il ne soit pas allergique au fantastique.
Découverte l’an dernier lors du Festival Séries Mania à Paris, la série en 10 épisodes a connu un grand succès lors de sa diffusion en Suède où elle a rassemblé 1,5 million de téléspectateurs, soit près de 15 % de la population. Entre mousse, feuillage et cours d’eau, le public était ravi de renouer avec des récits traditionnels et légendes populaires. Visiblement cette fascination est dans l’air du temps puisque le mouvement dépasse largement le cadre de la Suède. Nombre de séries récentes font en effet appel aux mystères forestiers.
Lors de la dernière édition de Séries Mania, en avril, pas moins de cinq séries y faisaient une référence directe : The Five, la toute première série écrite par le romancier Harlan Coben ; The Kettering Incident dont l’intrigue, également nimbée de fantastique, se déroule sur fond de forêt menaçante et de nature en danger en Tasmanie. La forêt fait également une courte mais intense apparition au coeur de la trame d’Au-delà des murs, la nouvelle mini-série signée par Hervé Hadmar et Marc Herpoux. Une liste à laquelle il faut bien sûr encore ajouter La Trêve et Ennemi Public, les deux pionnières d’un nouveau cycle de création de séries francophones made in Belgium.
KT
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