Michael Shannon.jpgRarement a-t-on observé pareil mimétisme entre un homme et son personnage.
Ce matin, Michael Shannon est là sans y être vraiment et le poids qui pèse sur les épaules de l’agent Van Alden dans Boardwalk Empire*** semble ne pas l’avoir quitté.
Assis, il semble attendre que les choses se passent, presque résigné. Ce n’est pas une parade, encore moins une attitude, visiblement les interviews de groupe, ce n’est pas trop son truc.
Regard un peu fuyant, il répond après un petit temps de réflexion durant lequel on entendrait (presque) une mouche voler, si on n’était pas soumis à la vigueur de la clim de ce grand hôtel new-yorkais. Il faut dire qu’avec sa mâchoire carrée, ses sourcils froncés, son regard d’acier et son 1m90, le comédien en impose fameusement. A croire que le qualificatif «patibulaire» a été inventé pour lui plaire. Mais tout peut aussi très rapidement s’éclaircir quand il se décide à sourire.

Une autre caractéristique qu’il partage avec son personnage d’ex-agent engagé dans la lutte contre la Prohibition. Un rôle d’homme torturé, qu’il assume depuis trois saisons, à retrouver dès ce samedi à 20h45 sur Be séries.

Ses réponses sont courtes, parfois évasives, souvent pince-sans-rire donnant d’autant plus de poids aux infos qu’il lâche, finalement. Sans doute l’acteur était-il plus à l’aise, la veille sur scène, mais malheureusement on ne l’y a pas vu. D’ailleurs le voilà qui s’excuse pour sa fatigue et les traces de maquillage sur son visage.

« C’est vrai que je suis souvent fatigué, pour le moment, mais c’est une bénédiction, tous les rôles que l’on m’a confiés jusqu’ici. Je ne pourrais pas travailler davantage même si j’essaie de m’améliorer de film en film. Malgré les comparaisons de certains dans la presse de Toronto, je ne pense pas que je sois le prochain Al Pacino. Je pense que c’est mon visage, la structure de mes os qui renvoie cette image de moi, intense et préoccupé. Beaucoup de mes amis me l’ont déjà fait remarquer mais ce n’est pas intentionnel, je suis né comme cela. » (Il sourit)

michael shannon 2.jpgAussi à l’aise sur le grand écran (« Les noces rebelles », « The Iceman », « Take Shelter ») que sur le petit, Michael Shannon semble habiter ses rôles avec une rare force faisant, notamment, de ses compositions de «méchants» des personnages très humains.

« J’essaie de ne pas envisager mes personnages comme étant des héros ou des méchants. Je m’intéresse surtout à ce qui les préoccupe, aux circonstances dans lesquelles ils se débattent, à ce qu’ils essaient de mener à bien. Je recherche surtout des bons scénarios, des personnages intéressants qui ont une grande part de mystère, qui représentent le plus grand défi à jouer, je ne me préoccupe pas vraiment de la façon dont ils sont perçus par le public » explique Michael Shannon.

« Aujourd’hui, Van Alden aspire à se sentir à l’abri. Il est épuisé d’être tout le temps sur ses gardes. Il vit au jour le jour avec la hantise d’être découvert et envoyé en prison. Pour cela, le personnage de Sigrid est vraiment bénéfique pour lui, elle est douce et prend soin de lui et de ses enfants. Il ne veut pas trop se mêler aux autres (employés, etc.) parce que pour éviter de se faire remarquer, il doit vivre comme une taupe, un ermite »  poursuit-il. 

Van Alden est englué dans une histoire très sombre. Est-il condamné au malheur  ?
« Je ne pense pas qu’il soit incapable d’être heureux ou d’exprimer ses émotions mais c’est un homme stoïque qui vit beaucoup dans le contrôle. Il a pas mal de problèmes à régler, voilà tout. Van Alden est comme Sisyphe: sans cesse occuper à tenter de remonter la pente. Sur ce plan, la série est plutôt sombre. Les intentions et les aspirations de Van Alden étaient tellement élevées qu’il ne pouvait que tomber de très haut. Il se voyait un peu comme un archange, un chevalier blanc, chargé de combattre le vice et les tentations, alors forcément, la désillusion a été d’autant plus forte. En fait, je suis souvent surpris de toutes les péripéties que les scénaristes inventent au sujet de Van Alden. Mais c’est le principe du drame, n’est-ce pas? »

Au-delà de la télévision et du 7e Art, Michael Shannon est aussi un fidèle des scènes de théâtre et des salles de concert. Des activités faciles à combiner dans son emploi du temps  ?
michael shannon 1.jpg« La télévision, c’est vraiment dur, avec un rythme très soutenu et irrégulier en même temps. Heureusement pour moi, une bonne moitié de l’intrigue de cette saison se déroule sans moi. Donc je ne suis pas là tous les jours. J’ai souvent des coupures, je viens pour quelques jours et puis, je m’en vais et je mène d’autres activités (théâtre, musique, etc.) en parallèle. Donc, cela requiert un peu d’organisation, pour ne pas perdre le fil de l’intrigue. Mais, heureusement, les réalisateurs sont de vrais chefs d’équipe et font en sorte qu’on ne perdre pas l’esprit de la série. »

« Mon groupe, c’est à la fois un hobby et une passion. La musique est vraiment importante pour moi, j’aimerais pouvoir m’impliquer davantage, mais mon emploi du temps ne me le permet pas pour le moment. J’ai été impliqué dans la musique (piano, etc.) très tôt, lorsque j’étais encore enfant, avant même de commencer à jouer. Si je n’étais pas devenu acteur, j’aurais sûrement été musicien. Mais pour le moment, c’est une activité parallèle. »

KT, à New York

nb: Vous pouvez retrouver l’itw de Kelly MacDonald (alias Margaret Thompson) ici, et celle du créateur dela série, Terence Winter,