Rendue mondialement célèbre par son rôle de Minerva McGonagall dans la saga Harry Potter, l’actrice britannique avait conquis les cœurs des fans de Downton Abbey en Lady Violet, formidable et intraitable comtesse douairière… Comédienne multirécompensée, elle a quitté la scène ce vendredi à 89 ans.
L’actrice britannique Maggie Smith, légende du théâtre et du cinéma, est décédée à l’âge de 89 ans, ce vendredi, viennent d’annoncer ses deux fils. “Elle s’est éteinte paisiblement à l’hôpital tôt ce matin”, ont indiqué ses enfants, Chris Larkin et Toby Stephens. “C’était une personne très réservée, mais elle était avec ses amis et sa famille. Elle laisse deux fils et cinq petits-enfants aimants qui sont dévastés par la perte de leur extraordinaire mère et grand-mère”, ont-ils précisé.
L’actrice va aussi terriblement manquer à ses innombrables fans à travers le monde.
Au cours de sa carrière, Margaret Natalie Smith, dite Maggie Smith, a en effet connu de multiples visages et transformations. L’une des plus populaires est sans nul doute celle de Minerva McGonagall, professeure de “métamorphose” dans les films Harry Potter (2001-2011), saga qu’elle avait rejointe pour “faire plaisir à ses petits-enfants” et à travers laquelle elle a démontré un indéniable savoir-faire.
L’actrice reste tout aussi inoubliable dans le costume de l’acariâtre et pince-sans-rire Lady Violet Crawley, Comtesse douairière de Grantham dans la série Downton Abbey – transposée ensuite sur grand écran – rôle qui lui a valu une nouvelle génération d’admirateurs. Ces deux rôles, prisés par les fans, pourraient presque éclipser ses prestations antérieures. Mais qui peut réellement oublier sa prestation de chaperon névrosé dans Chambre avec vue (1986), de Mère supérieure aux côtés de Whoopi Goldberg dans Sister Act (1992) ou de vieille dame SDF (Margaret Shepherd) dans The Lady in the Van (2015) ?
Un humour féroce, une franchise cinglante
Tous ceux qui ont eu la chance de travailler avec la comédienne ne tarissent pas d’éloges à son sujet. Maggie Smith “peut capturer en un instant plus d’émotions que de nombreux acteurs peuvent en transmettre tout au long d’un film. Elle peut être en même temps vulnérable, féroce, sombre et hilarante et apporte chaque jour, sur le plateau, l’énergie et la curiosité d’un jeune acteur qui vient de débuter”, disait à son sujet Nicholas Hytner, qui l’a dirigée dans The Lady in the van (2015).
Perfectionniste, la comédienne était connue pour son humour féroce, sa franchise souvent cinglante et son souci du détail. “C’est vrai que je ne tolère pas les imbéciles et, par conséquent, ils ne me tolèrent pas non plus, donc je me hérisse. C’est peut-être pour cela que je suis assez bonne pour jouer les vieilles dames acariâtres”, a-t-elle avoué en 2014 au quotidien The Guardian.
Son interprétation de la très snob et glaçante Lady Constance dans le film Gosford Park de Robert Altman, en 2001, a préfiguré celui qu’elle tiendra plus tard dans Downton Abbey, univers également décliné sur grand écran. Rien de très étonnant à cela puisqu’un autre point commun lie les deux univers, ils ont le même scénariste : Julian Fellowes. Le succès de l’un ayant sans aucun doute fait germer l’idée de l’autre.
Ces rôles n’éclipsent pas la centaine de pièces de théâtre dans lesquelles la comédienne s’est illustrée. Un art éphémère qui “vient et disparaît comme un fantôme” auquel la comédienne restait extrêmement attachée. Au fil des productions, elle a été Cléopâtre, Lady MacBeth, Virginia Woolf, la Reine Elizabeth (dans Richard III) et même, dans la plus récente, Brunhilde Pomsel, secrétaire de Goebbels dans A German Life. Preuve qu’aucun grand rôle ne l’a fait reculer.
La rançon de la gloire
Deux Oscars – meilleure actrice pour The Prime of Miss Jean Brodie (Les Belles Années de Miss Brodie) en 1969 et meilleur second rôle féminin pour California Suite en 1978 -, trois Golden Globes, quatre Emmy awards, un Tony Award et six Baftas : Maggie Smith avait récolté un nombre impressionnant de récompenses, s’assurant l’attachement indéfectible du public. Au point de trouver cet engouement largement exagéré.
”C’est ridicule. Je menais une vie parfaitement normale avant Downton Abbey”, confiait-elle en avril 2017 au British Film Institute (BFI). “J’allais au théâtre, dans des galeries d’art, des choses de ce genre, toute seule. Maintenant je ne peux plus”, se lamentait-elle. Une confession aux accents vachards qui trahissait sa proximité avec son personnage de comtesse. En six saisons (2010 à 2015), celui-ci lui a permis de décrocher un Golden Globe et trois Emmy Awards, les plus prestigieuses récompenses de la télévision américaine. Tandis que son port altier, son sourcil levé et son regard d’acier s’affichaient sur les petits écrans dans plus de 150 pays.
Une vie palpitante sur les planches
Inscrite à l’affiche de 68 longs métrages, c’est sur les planches qu’elle a fait ses débuts en 1952. Née le 28 décembre 1934 à Ilford, dans le sud-est de l’Angleterre, Margaret Smith débute sur la scène de l’Oxford Playhouse au début des années 1950. Elle rejoint ensuite la troupe du théâtre londonien de l’Old Vic puis celle du Royal National Theatre où elle enchaîne les succès, aux côtés de son premier mari, l’acteur Robert Stephens. Maggie Smith a deux fils nés de cette union : les acteurs Chris Larkin et Toby Stephens. Elle divorce en 1975 et se remarie peu de temps après avec le dramaturge Beverley Cross, avec lequel elle part vivre et travailler au Canada.
Ses débuts au cinéma remontent à 1958 dans Le Criminel aux abois de Basil Dearden et Seth Holt. Elle est nommée pour la première fois aux oscars, en 1965, pour son interprétation de Desdémone dans l’adaptation de Othello, filmé par Stuart Burge. Elle y donne la réplique à un géant du septième art britannique, Laurence Olivier. Sa prestation sur scène, l’année précédente, reste marquée à jamais dans la mémoire de Julian Fellowes. Elle joue aussi dans la pièce Rhinocéros d’Eugène Ionesco, mise en scène par Orson Welles. Quant à sa prestation dans Mort sur le Nil, en 1978, elle marque durablement les rétines.
Au cours de sa longue carrière, Maggie Smith a également travaillé avec quelques-uns des cinéastes les plus prestigieux comme Joseph L. Mankiewicz (Guêpier pour trois abeilles), George Cukor (Voyages avec ma tante) ou encore Steven Spielberg (Hook ou la revanche du Capitaine Crochet) qui lui a offert son premier rôle de grand-mère… Rôle qu’elle tenait encore à la perfection dans l’un de ses derniers longs métrages, Le Club des miracles.
Preuve de sa détermination à toute épreuve, la comédienne avait non seulement battu à plates coutures un cancer du sein, diagnostiqué en 2007, mais elle avait participé au tournage du film Harry Potter et le Prince de sang-mêlé (2009) en pleine chimiothérapie.
Artiste britannique parmi les plus connues, Maggie Smith a été faite Dame Commandeur de l’ordre de l’Empire britannique en 1990 et Membre de l’Ordre des Compagnons d’honneur en 2014, récompenses obtenues pour “services rendus au pays dans le domaine des arts”. Ce titre rare, elle le partage notamment avec une autre très grande artiste, née la même année qu’elle, mais à York, Dame Judi Dench.
Karin Tshidimba
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