downton-abbey-3.jpgNe jamais sous-estimer le charme et la beauté de la campagne anglaise… Si vous avez eu la chance de déambuler aux abords de Downton Abbey, vous savez et vous voyez de quoi nous voulons parler. Pour tous les autres, quelques minutes devraient permettre d’aiguiser votre curiosité…

On en connaît que l’idée d’une fiction en costumes suffit à faire fuir, mais vous auriez tort de vous priver du plaisir que réserve cette série britannique. On pourrait dire que les décors sont somptueux, les costumes magnifiques et les acteurs fabuleux, mais tout ceci ne rendrait pas encore suffisamment grâce à la magie de Downton Abbey***. Car cette série est d’abord une réussite magistrale sur le plan de l’atmosphère et de l’univers qu’elle dépeint: l’Angleterre en pleine mutation au début du 20 siècle.

1912 et les répercussions inattendues du naufrage du Titanic sur une grande famille noble, dans la 1ère saison (7 épisodes); le premier conflit mondial et les poussées d’émancipation sociales et féminines qu’il a entraînées, de 1916 à 1919, pour la deuxième saison (9 épisodes) et enfin les années 20, pour la troisième salve, en cours de diffusion sur ITV. Soit 25 épisodes en tout au terme de cette troisième livraison qui, lancée le 16 septembre dernier, s’annonce déjà comme un grand cru.

On dit que la rareté et la densité sont souvent gages de qualité. Avec Downton Abbey, l’adage ne fait aucun doute. Chaque saison permet d’étoffer la connaissance que nous avons des diverses personnalités peuplant le domaine. Une demeure où aristocrates et domestiques s’affairent à des tâches très segmentées (écriture et réceptions, d’un côté; cuisine et mise en place, de l’autre), mais partagent souvent joies, malheurs et tourments malgré des positions (en apparence) très éloignées sur l’échelle sociale.

Si les soucis de Lord et Lady Grantham semblent souvent sans commune mesure avec ceux de leur personnel s’activant dans les entrailles de la demeure, il est pourtant de nombreux plans où nobles et gens de maison se rejoignent. Ce sont ces points de concordance, ces moments de frictions ou de solidarité que donne à observer le créateur Julian Fellowes. Comme s’il s’agissait d’un microcosme, d’une fourmillière parfaitement organisée, à défaut d’être immuable.
Avec la guerre et les débuts de l’industrialisation, l’époque est au bouillonnement des idées et aux bouleversements sociaux dont on trouve des échos jusque dans les meilleures familles. Au grand dam de la Comtesse douairière, la formidable Maggie Smith, toujours très à cheval sur ses vieux principes. Il lui a fallu avaler une première couleuvre lors de la 2e saison avec les amours plutôt révolutionnaires de sa petite-fille, Lady Sybil. Ce sera encore le cas cette année avec les menaces de faillite qui pèsent sur le domaine…

Printemps 1920. Au début de cette troisième saison, les préparatifs du mariage de Lady Mary et Matthew Crowley vont bon train à Downton Abbey. Mais coup du sort, on apprend que Lord Grantham est sur le point d’être ruiné en raison d’investissements hasardeux dans une compagnie de chemin de fer canadienne. Sybil vient assister au mariage de sa soeur aînée en compagnie de son mari Tom, ex-chauffeur des Grantham. Une présence qui ne manque pas de provoquer de nombreux grincements de dents.
Cette grande réunion familiale est l’occasion de découvrir Shirley MacLaine, dans le rôle de la grand-mère américaine, très émancipée des trois jeunes ladies (cf. photo du haut). Complice des plus jeunes, elle se révèle parfaitement perfide et sûre d’elle à l’égard des plus âgés. Et se heurte régulièrement à sa fille Cora et à son gendre, Lord Grandtham, et bien sûr, à la mère de ce dernier: la Comtesse douairière toujours campée avec délice par l’inégalable Maggie Smith. Les joutes verbales entre les deux vieilles dames (indignes) sont jubilatoires.
Si la deuxième saison a fait la part belle aux amours contrariées et parfois évanescentes de toute la maisonnée, celle-ci révèle des enjeux bien plus sérieux: maladies, héritage, revers de coeur et de fortune, accusations, menaces,… Sans oublier les coups de blues et les coups bas du personnel en cuisine. Savoureux, on vous le disait…

Par petites touches et tout en finesse, « Downton Abbey » s’intéresse moins à la nostalgie d’une certaine époque qu’aux centaines de petits changements, en apparence anodins, qui ont lentement conduit le Royaume-Uni vers la modernité. Une étude de caractères et de moeurs aussi brillante qu’addictive. Sa qualité d’écriture et de réalisation ont valu à la série de très nombreux prix dans le monde entier. Et pour une fois, on ne pourra pas dire que nul n’est prophète dans son pays puisque dimanche dernier, le sixième épisode de la saison 3 signait un nouveau record sur ITV: avec 9,69 millions de fans au rendez-vous pour 36,6% de parts de marché. Preuve que la qualité paie, aussi.
KT

Downton Abbey. Drame historique de Julien Fellowes, avec Hugh Bonneville, Jim Carter, Maggie Smith. Diffuseur: ITV. 16 épisodes + 9 en cours de production. Début: 26 septembre 2010