The Newsroom
Quatre séries parmi les plus récentes abordent directement la bataille politique aux Etats-Unis, préfigurant les élections de novembre prochain. Avec Aaron Sorkin, père du genre en télévision, “The Newsroom” ouvre la voie d’une réflexion pertinente sur l’actualité. Sur Be1, jeudi à 20h55.
Si, dans la réalité, Barack Obama et Mitt Romney en sont encore à fourbir leurs derniers arguments et à concocter leurs dernières vidéos de campagne; en télévision, la bataille pour le pouvoir suprême fait rage depuis de longues semaines, voire de longs mois et a même, parfois, déjà trouvé son épilogue. Thème régulièrement abordé dans les fictions télévisées, il se fait central dans quatre des séries les plus récentes : Veep, Political animals, Boss et The Newsroom.
Si la première est une comédie et même une (lourde) parodie, les autres ont choisi un ton plus grave, voire parfois même tragique, pour parler de l’échiquier politique local (“Boss”) ou national (les trois autres). Offrant du même coup aux sériephiles l’occasion de creuser les dessous et ressorts d’un monde trop souvent présenté de façon binaire et simplifié par les médias comme par les hommes politiques eux-mêmes.
Or, cette vision parfois simplificatrice, voire caricaturale, de la vie politique nationale et internationale est justement au cœur de la nouvelle série d’Aaron Sorkin : The Newsroom***. Personne n’a oublié l’incroyable qualité et la formidable richesse de sa précédente création : “The West wing” (“A la maison blanche”) qui, durant sept saisons, a décrypté le fonctionnement interne et externe de la Maison Blanche.
Analyste avisé et conteur hors pair, Sorkin poursuit, ici, son œuvre vulgarisatrice en se penchant sur la façon dont les médias (et particulièrement les chaînes tout info, sur le modèle de CNN) rendent compte de la vie politique et façonnent, en partie, les opinions. Prises dans un épineux maelström politique, financier et publicitaire, les chaînes sont-elles en mesure de mener à bien leur mission qui est d’informer les futurs électeurs ? Aaron Sorkin en doute, décryptant les mécanismes puissants, et souvent souterrains, qui ruinent cette visée essentielle.
Alors que l’info va de plus en plus vite et que les sources se démultiplient pratiquement à l’infini, la tentation est grande de tenter de capter l’attention à tout prix. Avec le même respect affiché précédemment à l’égard de la fonction présidentielle, dans ce qu’elle a de plus noble, Sorkin imagine une chaîne bien cotée (ACN) soumise aux pressions des annonceurs et dont le présentateur vedette (campé par Jeff Daniels) a la réputation d’être un fieffé intervieweur. Endormi sur ses lauriers, celui-ci va être réveillé par l’engagement d’une nouvelle équipe de jeunes journalistes et réalisateurs décidés à redorer le blason de la presse. Faut-il préciser que le ton (jugé “arrogant” et “grandiloquent” par certains) et les visées pédagogiques de Sorkin en ont irrité plus d’un dans le milieu ?
Buzz des derniers screenings (présentation des nouvelles séries) de Los Angeles, la série diffusée dès le 24 juin, a essuyé nombre de critiques mais a été renouvelée pour une saison 2. Course à l’audience et bataille des ego, pressions politiques et financières, dérives des chaînes et spectacularisation de l’info, concurrence du Net : aucun des enjeux de la presse n’est oublié, rendant la série particulièrement addictive pour tous ceux qui connaissent le milieu de près ou de loin.
Mais ce n’est pas tout ! Chacun des dix épisodes est en effet centré sur un événement récent et les interactions qu’il crée au sein de la rédaction d’ACN en pleine mutation. Après l’explosion d’une plateforme pétrolière dans le Golfe du Mexique, “The Newsroom” aborde Fukushima, la révolution égyptienne et la traque de Ben Laden. Sans oublier la polarisation croissante de la société américaine entre Démocrates et Républicains, portée par une analyse brillante des dérives et mensonges du Tea Party. On se régale !
Alors que les vraies élections se profilent dans six semaines, ne ratez pas l’occasion de plonger au cœur de l’actu américaine en bonne compagnie. Car Sorkin sait, aussi, comment rendre ses personnages particulièrement attachants.
KT
(publié le 22.09.2012)
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