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En 2017, 10 % des séries les plus regardées étaient des coproductions internationales.
Les chiffres le confirment : la tendance s’est inversée. Alors que les Etats-Unis n’ont jamais produit autant de séries; en Europe, ce sont les productions locales qui s’imposent en tête des audiences.

« La série française s’exporte mieux mais le chemin est encore long, constate Olivier Wotling, reponsable de l’unité Fiction chez Arte. L’idée est d’aider des projets français à aller en coproduction internationale. A attirer très en amont l’intérêt de coproducteurs et peut-être même d’auteurs internationaux. »

« Notre ADN, ce sont les séries européennes. On est plutôt bien parti avec celles qu’on coproduit: Occupied, Ride upon the storm ou la série italienne Il Miracolo« , primée en avril au Festival Séries Mania Lille. « Nous voulons, à présent, faire le chemin en sens inverse : attirer l’attention et la curiosité de coproducteurs internationaux sur des sujets en langue française. C’est ce qui nous a tout de suite séduits dans l’idée du Fonds Création Séries France – Europe de la SACD. »

Douze projets français sont en lice pour une nouvelle bourse délivrée par Arte et la SACD (Société des auteurs et compositeurs dramatiques) en septembre ou octobre prochain.


Des projets garantis 100 % sans europudding

scénaristes machine.jpg« C’est un projet conçu en réaction à ce qu’on reproche souvent aux coproductions européennes. Les créateurs se retrouvent autour d’une table et essaient de trouver ce qui plaira au plus grand nombre, par élimination. Ce qui donne la recette parfaite de ce qu’on appelle l’europudding », concède Jacques Fansten. A savoir : intrigue transfrontalière, acteurs de trois pays différents, tournage en anglais… et une originalité souvent en berne.

La SACD a imaginé ce projet et a contacté Arte. Le projet, annoncé durant le Festival de la fiction TV de La Rochelle, a été mis en ligne en octobre et vient de franchir une deuxième étape en mai.

Comment savoir si un projet de série va intéresser les Européens ?

« On s’est dit que le mieux, c’était de leur demander. » La SACD et Arte ont donc mis sur pied un jury européen au sein duquel on retrouve la Belge Kaat Beels (Beau Séjour), l’Allemande Rodica Doehnert (The Adlon), l’Italien Stefano Bises (Gomorra), le Suédois Ulf Kvensler (Welcome to Sweden) et le producteur norvégien Anders Tangen (Lillehammer).
Le jury s’est réuni à Lille et a tranché sur base de pitchs courts (5 pages). Seules obligations : les projets devaient comporter 3 épisodes minimum et se décliner en 26 minutes ou plus. Au final, dans les projets retenus, on retrouve des projets en 26, 45 et 52 minutes. Et des thématiques très diversifiées : « cela va de la science-fiction au drame social ».

« Sur les 212 reçus, chaque membre du jury, avant la session finale, avait lu entre 70 et 80 projets. Chaque projet était lu par au moins deux membres du jury. Une première sélection a permis de dégager une trentaine de projets. » Suite à la rencontre à Lille, 12 d’entre eux ont été sélectionnés.

Le jury était coprésidé par un représentant d’Arte et par Jacques Fansten de la SACD « mais nous n’avions pas le droit de vote », précise ce dernier. « Et on a eu des surprises dans les choix du jury, ce qui est rassurant: cela prouve qu’ils ont vraiment un regard différent du nôtre. »

Recherche producteurs activement

IMG_1677.JPGLes 12 gagnants ont reçu une première bourse de 8000 euros et il leur reste deux mois pour présenter une version plus développée (30 à 40 pages : synopsis ou versions dialoguées) de leur projet de série.

« Le jury va se réunir fin septembre ou début octobre. Ils choisiront 5 projets qui recevront une 2e bourse de 15000 euros. Arte a un droit de premier regard et pourra choisir d’en produire autant qu’elle le voudra », rappelle Jacques Fansten.

« C’est totalement ouvert. Cela peut aller de 0 à 5 projets choisis, plaisante Olivier Wotling d’Arte. On partira alors en développement et en convention d’écriture sur le projet. L’auteur devra encore trouver un producteur. »

 

Encourager les regards croisés

« Notre espoir, c’est que chaque projet trouve un diffuseur, les producteurs peuvent se manifester en masse dès maintenant« , précise Jacques Fansten.

« Pour nous, avoir le regard de 5 jurés internationaux sur le projet était très intéressant. On espère qu’il y aura de la coécriture entre auteurs de différents pays », poursuit Olivier Wotling.

Comme pour la série Eden de Dominik Moll avec Sylvie Testud, en cours de tournage. Elle est portée par un auteur allemand (Deutschland 83) « et dans l’équipe d’écriture, il y a deux jeunes auteurs français. Il y a donc une vision croisée sur la crise migratoire en Europe, venant de deux pays qui l’ont gérée complètement différemment. »

Fonds création séries SACD.jpg« La bourse doit aider les scénaristes à développer leur projet : l’une des possibilités est de faire appel à un consultant technique ou spécialisé ou à une personnalité étrangère qui les aidera dans leurs recherches. Il y a aussi la possibilité d’avoir recours à une résidence d’écriture comme le Festival de La Rochelle l’a proposé. » Pas de doute, on entendra reparler d’eux après un été studieux.

 

Voici les 12 projets retenus au terme de cette première phase de sélection

A la frontière, de Catherine Klein (6 x 52). Un réseau de prostitution de mineurs dans une petite ville de Moselle, entre Allemagne et Luxembourg, doit être démantelé.

Allez, champagne, d’Aurore Dumas & Ludovic Pion-Dumas (12 x 45). L’histoire méconnue du pillage des vins français pendant la guerre et celle de la résistance des vignerons.

Bandana, de Raphael Stora (10 x 26). Comment lutter contre la férocité des réseaux sociaux et parvenir à s’épanouir dans la danse ?

Ils arrivent, d’Alexandre Gavras, Marie Eynard et Emma-nuel Leduc (6 x 52). Dans 423 jours, la terre sera envahie…

Laurene, de Richard Bean (12 x 52). Histoire de migration et d’organisations criminelles entre France et Roumanie.

Le sexologue, d’Emmanuel Mauro (6 x 52) La série interroge la place du sexe dans notre société à travers le parcours d’un psychologue spécialisé à la vie trépidante, Jacques Ester.

M.I.R.I.A.M, de Vincent Hazard (8 x 26). La vie quotidienne à la Mutuelle Inter Religieuse d’Invalidité et d’Assurance-Maladie, c’est “The Office” avec des prêtres, imams et rabbins.

Motel, de Leslie Menahem (10 x 26). Le quotidien de Gino qui tient à son motel désuet sur l’A4 plus qu’à sa propre vie.

Ovalie, de Solenn Le Priol & Saskia Waledisch (8 x 52). Un entraîneur déchu atterrit dans le club féminin d’une ville du Tarn.

Tout est bon dans le patron, de Jennifer Have (3 x 52). Une histoire de lutte syndicale dans une France sinistrée qui pourrait mener les ouvriers excédés jusqu’au cannibalisme…

Travail famille party, de Zazon Castro & Gaëtan Matis (12 x 26). Julie, 38 ans, et Tom, 24 ans, attendent un enfant et sont persuadés que cela ne va rien changer à leur vie.

Unités de vie, de Boris Le Roy & David Crozier (12 x 26). On y suit le parcours de trois détenus et leurs familles dans une Unité de Vie familiale, zones grises où ils ne sont ni libres, ni surveillés.

Entretiens: Karin Tshidimba, à Lille

 

nb: Tous renseignements sur les projets finalistes peuvent être obtenus auprès de [email protected]

nb2: La SACD dispose d’autres programmes développés avec les diffuseurs français: fonds pour les webséries conçu avec France Télévisions, fonds pour des séries «podcasts natifs» avec France Culture et prix pour l’animation avec TF1.